8.25/10
Man of the West de Anthony Mann - 1958
C'est du Mann donc c'est bien et c'est même quasiment du niveau des meilleurs Stewart.
Script de Rose ( le scénariste de
12 Hommes en Colère quand même ), et c'est vraiment un script sans faille bon c'est plutôt sans surprise, on devine aisément où ça va nous mener mais Mann est un très bon raconteur d'histoire et donc on entre facilement dans le film tant les personnages sont efficacement campés et encore la rédemption du personnage de Cooper est quand même loin de tomber dans la facilité, la fin est finalement plutôt ambigue. Comme toujours avec Mann ça prend son temps et ça avance par à coup avec des brusques montées de violence (Cooper qui tabasse son cousin notamment, alors sur la réal les limites physiques de Cooper font que la scène est pas impressionnante mais sur le fond on se retrouve devant un viol bien violent et osé même). Chez Mann on en prend toujours plein la tronche en quelques secondes et puis il y a pas d'histoire d'amour à la con.
J'aime bien comment est construit le script, pendant 30 minutes c'est plutôt léger on se croirait chez Ford (entre autre mais c'est pas un défaut hein puis en une seule scène le film bascule dans l'oeuvre noir, presque crépusculaire avant l'heure, et vu le passif de Mann dans le film noir ce basculement n'est pas surprenant et il est maitrisé, cette scène peut laisser pas mal de monde sur le carreau, de part sa longueur notamment (quasiment 30 minutes avec énormément de dialogues) mais elle est essentielle au récit en nous montrant que Cooper n'est pas le héros infaillible qu'on pourrait penser et que si il veut s'en sortir il va devoir en chier.
Le script réserve quand même des idées originales, sur l'idée mainte fois vu du changement d'époque Mann en a une magnifique avec l'attaque de banque finale, les pauvres gars sont tellement à la ramasse qu'ils attaquent une banque déserte dans une ville fantôme.
Filmé en scope comme pour le très maitrisé
l'Homme de la Plaine ici on passe encore au niveau supérieur, franchement c'est un truc de fou comment ça put la classe ce film, alors y a rien de tape à l'oeil (le film a même un aspect très statique), il y a pas de panoramique où ça se la pète, rien n'est gratuit et chaque plan est carré et surtout pensé ( les mouvements de caméra sont à tomber et le placement des acteurs dans les décors naturels sont ultra classes, on voit bien que Mann cherche toujours a intégrer ses personnages dans le décor pour que ce soit le plus cinématographique possible), à un moment j'ai cru déceler une double focale (lors de la longue scène de la cabane avec Cooper au premier plan et Cobb au second plan qui sont tous les 2 zoomés sauf erreur, l'utilisation de cette technique est ici fort intelligente car y a un mini dialogue et quand on voit Cobb dans le plan on se dit que forcément il va avoir son mot à dire). La narration passe quasiment entièrement par l'image (avec Mann souvent en gros c'est une idée, un plan, en un plan il nous fait comprendre une action a venir où une pensée d'un personnage mais c'est jamais un plan pour neuneu avec zoom à l'appui). Alors bien entendu je pourrais mettre en avant le merveilleux climax final dans la ville fantômes qui fait un peu penser au
Trésor du Pendu ( en mieux parce que c'est pas Sturges mais Mann ) avec une utilisation intelligente du décor et du placement de caméra où Mann nous montre comment on gère une profondeur de champ avec un scope ( et cette scène c'est vraiment du pur Mann où avec une économie de mouvement on arrive à avoir des séquences merveilleuses ) mais je vais mettre en avant la longue scène centrale où on découvre qui est vraiment Gary Cooper, on sent la tension, on sent qu'a n'importe quel moment ça peut exploser et franchement on se croirait plus dans un film noir que dans un western avec une ambiance nocturne oppressante et pour l'époque on a même une scène de strip tease plutôt osée, et puis l'intrigue prend un coté Shakespearien très réussit.
Gary Cooper dans un de ses tous dernier rôles en vieux cowboy qui voudrait se débarrasser de ses vieux fantômes est un peu un prolongement des persos de Stewart et il est vraiment bon en héros fatigué et humanisé ( un homme qu'on sent rongé par ses démons intérieurs ), j'aime bien comment le personnage évolue tout au long du film ( ça commence gentiment avec un perso un peu gauche qui découvre le train et ça se termine avec un homme qui a retrouvé son instinct de survie mais jamais Mann ne fait tomber le truc dans l'héroïsme primaire ) et franchement Cooper signe ici peut être bien sa meilleure prestation, Julie London a de sérieux atout à faire valoir et elle s'en sert à merveille, Lee J. Cobb campe un bad guy qui change des stéréotypes, et il est très bon en perso complétement exubérant et complétement cinglé et il a un rôle vraiment important tant il a une place centrale et une tonne de dialogues, les 3 seconds rôles Royal Dano,Jack Lord, et John Dehner sont très bien et ont la gueule de l'emploi.
Mann le meilleur réal de western des 50's signe ici une oeuvre majeur du genre, alors qu'on cite toujours évidemment ses collaborations avec Stewart, il ne faut vraiment pas oublier son western avec le grand Gary Cooper.