Véra Cruz de Robert Aldrich
(1954)
Un bon film mais pas la grande œuvre que laisse penser sa réputation,
Véra Cruz a surtout le mérite d'être un western classique en apparence qui se montre finalement assez noir que ce soit sur son propos ou sur les actes de certains personnages. D'ailleurs, il est assez étonnant de voir à quel point le film se détache de plus en plus de ce qui a été fait auparavant au fil de l'avancée de son intrigue, avec notamment la mise en place de l'action au Mexique durant la guerre civile, période traitée trop souvent en surface, et même si
Véra Cruz ne se concentre pas totalement sur cette période historique il a néanmoins le mérite d'apporter une certaine originalité, avec notamment une séquence de bal qui permet d'approfondir les personnages au sein d'un lieu qui ne leur va pas ainsi que quelques plans sympathiques dont le passage devant une pyramide aztèque. La première partie du film est clairement la plus réussie, avec la mise en place d'une amitié entre un sudiste désabusé et un homme à l'allure séduisante et charismatique mais qui restera jusqu'à la fin sans foi ni loi. Entre rivalité, tromperie et complicité, cette relation est de loin la plus bonne idée du métrage, elle donne une véritable ambiguïté à l'ensemble du récit et plus le film avance, plus les éléments qu'ils rencontreront feront en sorte que ces deux personnages se révèleront totalement opposés (les deux personnages féminins notamment) et ce, malgré quelques séquences où chacun révèlera son lourd passé (encore que vu le personnage de Lancaster, ça ne m'étonnerait pas du tout que ce qu'il raconte soit totalement faux). On regrettera donc que le film s'enlise un peu trop dans une seconde moitié qui casse beaucoup trop avec la première. Si l'idée de la défense d'un convoi est plus qu'alléchante, elle donne lieu finalement à peu de scènes marquantes et les quelques embuscades sont loin d'être réussies avec une gestion de l'espace bordélique (et puis paye tes coups de feu qui atteignent toujours leurs cibles), le pire étant de voir un climax final éclipsé en l'espace de cinq minutes et qui ne vaut que pour le duel final, non pas pour la forme (très classique pour le coup) mais bien pour le fond, une séquence presque déchirante qui aurait pu être véritablement marquante avec un peu plus de scènes intimistes auparavant.
Néanmoins, force est de constater que
Véra Cruz ose franchir pas mal de barrières avec ces deux dernières minutes qui annonçaient déjà la venue d'un western plus violent et nihiliste dans les années à venir. Niveau mise en scène, c'est assez classique comme souvent chez Aldrich, on trouvera quand même quelques plans sympathiques dont un panoramique suivant le regard de Lancaster pour découvrir que celui-ci est encerclé (sacré scène par ailleurs même si sa résolution est moins convaincante). Quand au casting, difficile de ne pas garder en mémoire Burt Lancaster, véritable attraction du film et dont l'interprétation sert un personnage très intéressant (j'adore son sourire permanent qui peut à chaque fois être perçu d'une manière différente), quand à Gary Cooper, malgré le fait que j'ai un peu de mal avec lui, il faut avouer qu'il se débrouille plutôt bien mais il ne rend clairement pas son perso plus intéressant. Sinon, sympathique vision de Charles Bronson et passons sur les quelques scènes d'Ernest Borgnine, un acteur avec qui j'ai vraiment du mal et qui me gâche toutes les scènes où il apparaît. Un bon film donc mais dont le potentiel était bien plus grand que le produit fini, reste néanmoins un Burt Lancaster magistral et surtout l'amorce d'un western plus moderne.
NOTE : 6,5/10