Après un Reservoir Dogs très original, Tarantino garde bel et bien sa patte artistique et son don de dialoguiste avec un film plus long, plus épique, aussi violent mais parfois à rallonges que ne sauve pas une mise en scène un poil moins inspirée que son premier film.
Pulp Fiction est certainement l’œuvre la plus Scorsesienne de Tarantino ce qui la rend d'autant plus jouissive, surtout lorsque le cinéaste tort littéralement les codes du genre ainsi que les attentes du public en prenant largement en dérision ses icônes de gangsters. C'est tout un cinéma que Tarantino tourne à sa sauce : De Palma, Scorsese, Leone...
Le mix offre un film générationnel et coup de poing aux ambitions similaires à Reservoir Dogs mais avec plus de moyens, de possibilités et de charisme : le casting 4 étoiles impose le respect, la direction des acteurs est fantastique (Uma thruman, Travolta, Samuel Lee Jackson...), une écriture non-linéaire assez surprenante où les flashforwards se mêlent aux flashbacks avec une fluidité imparable et une lisibilité absolument parfaite. Les gimmicks et la signature du réalisateur sont présents : le chapitrage, l'utilisation des musiques et on retrouve même Harvey Keitel dans un petit rôle bien sympa en plus des costards noirs du de la fameuse contre-plongée intérieur d'un coffre sur les personnages. Quelques hors-champs mythiques (l'intérieur de la mallette qu'on ne voit jamais), le combat de boxe auquel nous n'assistons pas, etc...Concernant les protagonistes, Tarantino nous attache plus à Vega et sa relation avec Mia : la scène de danse c'est vraiment le moment le plu sympa de leur amour latent. La partie avec Butch c'est moins passionnante tandis que le tandem Vega/Jules est à mourir de rire, totalement décalé et jouissif. Juste dommage que la partie avec Bruce Willis ne vienne jamais se recouper avec les autres car le seul point commun c'est le boss joué par Ving Rhaymes.
Tarantino , sans être passé par la case académique des études du 7ème art, se retrouve pourtant à la tête d'un des plus grands changements cinématographiques du sicèle en marquant au fer rouge son style et ses influences , subtilement ou non mais avec un panache et un savoir-faire indéniable.Tordant le cou aux règles établies, le jeune metteur en scène régaler ses fans d'oeuvres parfois loufoques, décalées (les monologues et dialogues à rallonges où les personnages discutent comme n'importe qui, sur n'importe quel sujet, avec une nonchalance vis à vis de ce qu'ils s'apprêtent à accomplir par la suite que ça en dégage quelque chose de sympathique tout comme cela ridiculise les gangsters : le coup des vêtements de beaufs pour le duo Vega/Jules, la discussion sur les pieds (préfiguration de Boulevard de la Mort et coming-out du fétichisme de Tarantino) , les philosophies de comptoir, les rapports à la Bible etc..., jouissives et divertissantes tout en sauvegardant son univers, ses dialogues étalés (sa façon à lui de dilater le temps), la violence très prononcée et la culture débordante de ses récits.
Des hommages, des clins d’œils, des plans piqués à des films qu'il adore...Tarantino s'oublie parfois un peu dans cette recherche artistique en allongeant inutilement des scènes, pataugeant dans ses références plus qu'autre chose et son second film, pourtant réputé comme son chef d'oeuvre, ne déroge pas à ce léger défaut. La mise en scène parait aussi plus posée que dans Reservoir Dogs. Quelques éléments annoncent clairement Kill Bill comme le sabre dont se sert Butch , Uma Thurman au casting et le pilote de série TV dans lequel elle a joué qui expose les mêmes persos que dans son diptyque.Un film à analyser tant il regorge d'idées, d'ambition de subtilités et de codes transgressés. Ne peut-on considérer Pulp Fiction comme un énorme mélange de genres et de styles à travers lequel plusieurs genres ont émerger ? Le tortur-porn movie ne vient-il pas de la scène du magasin avec Butch et Wallace ? Ne contient-elle pas les germes de ce que sera Hostel et cie ? Le montage déstructure mais ô combien efficace et intelligent n'a t-il pas influencé des cinéastes comme Inarritu ?