Le Giallo :Autant dire de suite que mon entrée en matière fut déstabilisante.Fils ainé de Psycho d'Hitchcock et frère du slasher contemporain, ce genre italien peut facilement rebuter pour son esthétique baroque et aujourd'hui un brin vieillotte et ringarde, dépassée mais ô combien efficace pour ce qui est de l'angoisse justement : ce n'est pas « agréable » de s'immerger dans l'univers d'Argento. Il faut dire que certains choix artistiques sont surprenants : les éclairages , les décors théâtraux...choix indiscutablement personnels mais en découvrant cela de nos jours forcément ça peut dérouter. Loin de léché ses films, Argento parsème pourtant Deep red d'une technique irréprochable où les plan-séquences multiples façonnent l’œuvre comme rarement nous l’avions vu auparavant : la caméra se balade parfois longtemps avant d'en arriver au sujet principal (des personnages, un objet etc...) : parfois, c'est justifié parfois c'est purement gratuit mais le tout forme essentiellement le style du cinéaste. Le mouvement de caméra qui dévoile plusieurs objets importants est une bonne idée ; certains plans sont très atypiques (on ne cadre jamais ainsi) mais ça colle à l'ambiance voulue et au style.
En ne découpant que très peu son film cela instaure deux choses paradoxales : l'ennui et la fluidité de l'intrigue marquant ainsi un vrai fossé (aujourd'hui franchement obsolète) entre celle-ci et les meurtres bien plus cut. Un plan de la main du tueur, un pal des ses chaussures, un plan de l'arme , un plan de sa main qui prend l'arme etc... On ne peut nier l'impact qu'à eu ce genre sur le cinéma : le slasher et même certains épisodes TV où les protagonistes poursuivent un tueur mystérieux , toujours montré sous la taille ou un peu au-dessus. Les gants de cuir, la veste de cuir, le chapeau, les armes tranchantes et reluisantes, la vue subjective du tueur qui met le public dans la peau d'une personnage malsain (le méchant donc) dont il ne connait pourtant pas l'identité et la mise en abyme aurait pu être géniale si le film avait traité d'un délire schizophrénique qui aurait pu impliquer plus profondément le spectateur....Tout un pan de ce cinéma est emprunt de codes aujourd’hui traités différemment mais se basant sur les mêmes principes dramaturgiques.
Les meurtres sont très graphiques, mais loin d'être choquant (ou alors à l'époque) sans tomber dans le gore. Le tueur ne bénéficie hélas pas d'une aura fascinante ou au contraire très angoissante : c'est surtout l'ambiance qui s'en charge car l'histoire, le background et les scènes ne caméra subjective du meurtrie ça reste des procédés assez banals dans le film et pas très subtils. Pour se sentir happé par la storyline faut quand même pas être très exigeant : le creux des personnages et le spontané « vide» qui les entourent parfois laisse de marbre : la scène dans la rue, de nuit, face au bar c'est assez choquant à ce niveau.
Bref, le suspens n'est pas très passionnant à cause d’une narration qui se veut intelligente (tout est fait pour que l'on croit dur comme fer que le tueur est en fait une tueuse, la journaliste, mais en fait il s 'agit d'une autre femme, qu'on voit une fois dans le film, qui n'a aucune présence ni crédibilité tout comme son background et celui de son fils(c'est passer à la trappe pour surprendre à la fin mais ça ne surprend pas du tout puisque rien ne donnait du relief au personnage). Autant le tout est très bien géré autant ça semble gratuit : en faisant de la journaliste la vraie tueuse, on aurait pu avoir un trauma super développé avec une femme schizophrène qui entend des voix , qui mène l'enquête pour effacer les preuves etc... mais Argento, préfère laisser ça de coté et parler d'un truc dont on se fout royalement. A côté de ça le casting n'est pas exceptionnel et l’interprétation très moyenne (le flic est ridicule, certaines scènes sont vraiment minables en terme de jeu : la blonde du début...)
Avec un style très épuré bourré de travellings et de zooms (technique du pauvre pour faire croire à un travelling), le réalisateur s'accorde une bande originale assez horrible et inaudible où le main theme atroce , répétitif et strident met pourtant mal à l'aise. Les autres morceaux sont atroces , mal utilisés et paraissent franchement en décalage avec le film. Tout comme l'utilisation de la musique enfantine (encore un élément repris dans plusieurs slashers ou film violent : on pense notamment à du Kubrick (Orange Mécanique) où encore le coup de la marionnette assez flippante qui jaillit de nulle part sur son vélo (on pense à Saw et Dead Silence). En définitive, Les Frissons de l'angoisse inquiète autant qu'il déplait par un maniérisme limite amateur.