Goodfellas (Les Affranchis) de Martin Scorsese
(1990)
Un peu moins ultime que dans mes souvenirs (c'est seulement ma seconde vision, ma première datant de mes dernières années du collège) mais ça reste néanmoins l'un des meilleurs films de Martin Scorsese et tout simplement l'un des meilleurs films sortis dans les années 90. Se basant sur une histoire déjà contée à de nombreuses reprises (l'ascension et la chute d'un gangster), Scorsese renouvelle totalement ce sur quoi il se base. Ainsi, la chute n'en est pas vraiment et le personnage principal est loin d'être un gangster mémorable et n'est finalement qu'un homme de main parmi tant d'autres qui tente de se faire sa place dans un univers qu'il admire par dessus tout mais qu'il finira tout de même par quitter trahissant ses fondements mêmes. C'est notamment sur la forme que Goodfellas se démarque très rapidement des autres films du genre puisque sa construction scénaristique se révèle à la fois épurée (le film n'est finalement qu'une histoire racontée) et extrêmement dense (un nombre incalculable d'informations visuelles et auditives en l'espace de quelques minutes) et s'éloigne d'un certain classicisme. Idem pour le traitement des personnages et de l'univers, car si l'iconisation apparaît parfois (notamment au début lorsque le personnage enfant admire les gangsters de sa rue) elle est toutefois rapidement abandonnée au profit d'un soucis de réalisme. Les mafieux cools deviennent alors finalement des hommes comme tant d'autres, avec leurs forces et leurs faiblesses et surtout la tendance très humaine à détruire soi-même ce que l'on a construit sans vraiment le vouloir. Entre un personnage principal qui finira par se révéler plus lâche qu'autre chose, un De Niro qui, à force de vouloir trop coller à ses principes, deviendra la cause de sa chute, et un Joe Pesci qui ressemble plus à un dingue aux yeux du spectateur, Goddfellas dépeint la vision nouvelle d'un univers que l'on avait cru connaître déjà par cœur. De plus, Scorsese a la très bonne idée de traiter aussi la vie privée de ces mafieux et obtient quelques-unes de ses scènes les plus mémorables (toute la séquence de la journée sous coke, Liotta se réveillant devant sa femme qui pointe son arme sur lui, etc...).
Si le film se révèle quasi-parfait en lui-même, il souffre toutefois de quelques petits défauts, notamment en terme de montage. Car si celui-ci est difficilement attaquable à première vue (tout le rythme du film est basé sur le montage, ce qui rend très intéressant ce qui ne l'est pas forcément), il manque une certaine cohésion dans l'ensemble. Certaines séquences importantes sont traitées de façon trop rapide (le final aurait mérité quelques minutes de plus) et surtout on a parfois l'impression d'avoir plus affaire à un enchaînement de scènes (géniales) dans un ordre chronologique avec notamment des scènes à part (la journée sous coke, une séquence excellente mais qui a du mal à s'inscrire pleinement dans la logique du récit). Enfin, si la mise en scène n'atteint pas le brio de celle d'un Casino (pas les mêmes ambitions ni le même budget) il reste néanmoins un style scorsesien bien présent, où la bande-son minutieusement choisie s'allie à merveille avec les travellings fluides et travaillés. Quand aux acteurs, premiers ou seconds rôles, ils sont tous excellents, comme toujours cher Scorsese, mention spéciale à Ray Liotta qui aurait mérité une carrière plus conséquente et surtout à Joe Pesci qui obtient à lui seul la majorité des meilleures scènes du métrage ("
You think i'm funny ?"). Bref, un film que je revois un peu à la baisse depuis ma redécouverte de
Casino, mais néanmoins un très grand film que tout cinéphile digne de ce nom se doit d'apprécier.
NOTE : 9,5/10