Le Réalisateur Français d'origine Allemande
Dominik Moll à qui l'on doit
Lemming (2005) et
Le Moine (2011) nous gratifie en 2000 d'un hommage clair au Cinéma de
Sir Alfred Hitchcock en distillant parfaitement bien le dosage suspense/humour noir, le tout agrémenté d'un ton sérieux ainsi que d'une interprétation ex-cep-tion-nel-le du comédien Catalan
Sergi López...
Comme écrit ci-dessus, l'inspiration '
Hitchcokienne' se fait clairement ressentir tout au long du métrage et on peut également rapprocher le travail de
Moll à celui d'un autre metteur en scène plus proche de notre époque actuelle en la personne de
Michael Haneke. Au niveau de la mise en scène et, donc, de la façon dont l'ambiance inquiétante est posée, on peut dire que les 2 talentueux réalisateurs opèrent de manière très similaire. Car, c'est largement au niveau de la mise en atmosphère que le Film de
Dominik Moll gagne ses plus beaux galons...
Dès les premières minutes, on peut commencer à ressentir la température et l'hygrométrie élevées dans une scène pourtant totalement anodine : un couple (interprété par
Laurent Lucas &
Mathilde Seigner) roule en voiture. La canicule est là et le duo de comédiens tente tant bien que mal de canaliser l'énergie dévastatrice emmagasinée et expulsée par leurs 3 jeunes filles à l'arrière du véhicule. Situation banale sur la route des vacances d'été mais déjà, le climat suintant pose ses bases et l'arrivée imminente de
Sergi López ne fera qu'enfoncer encore plus la petite famille apparemment tranquille dans une mise en abîme perverse et langoureuse.
Que dire de cette fameuse première rencontre dans ces toilettes de cette aire de repos d'autoroute ? Sans quasiment ouvrir la bouche et uniquement de par sa présence et posture, le génial
Sergi López nous glace déjà les sangs. Cette rencontre est-elle le fruit du hasard ? Impossible d'y répondre. A ce moment précis du script, peut-on parler de préméditation dans l'esprit du personnage d'
Harry ? Encore une fois, difficile de le savoir.
Finalement, on s'aperçoit très vite -et là c'est encore une autre force énorme de l'Oeuvre- que ce scénario machiavélique repose essentiellement sur toute une série de questions que le spectateur s'amène forcément à se poser à un moment donné et dont les réponses ne seront jamais véritablement dévoilées, la virtuosité de la mise en scène aidant clairement à instaurer petit à petit cette atmosphère glauque et malsaine où les plausibles théories que l'on tente vainement de proposer s'assimilent à la recherche d'un antidote dont le poison serait inconnu. Difficile donc, à partir de là, d'anticiper les directions que le Film prendra tout du long des 110 minutes...
Et c'est dans cette maison isolée de la campagne Auvergnate que va se dérouler le pire et l'impensable. En revoyant le Film, ce lieu a certainement dû faire tilt à
Laurent Lucas car très proche en apparence de celui habité par le personnage '
Bartel' interprété par le flippant
Jackie Berroyer dans le Film
Calvaire de
Fabrice Du Welz où, déjà, le perso de
Lucas subissait un harcèlement moral et physique avilissant. Dans
Harry Un Ami Qui Vous Veut Du Bien, point de tortures physiques, l'objectif précis en première intention du personnage de
López (et c'est peut-être le seul décelable) étant de vouloir faire muter '
Michel' en une personne indépendante, emplie de confiance et d'optimisme, mature et tournée vers un passé d'écrivain amateur. En somme, '
Harry' un Ami qui veut votre liberté...
Niveau casting, comme vous pouvez vous douter, c'est du 5 étoiles !!!
Lucas est parfait en abruti anesthésié par sa petite vie bancale et minable, son épouse jouée par
Seigner est très juste en sachant éviter de justement trop faire du
Seigner en restant plus tempérée qu'à l'accoutumée faisant ainsi gagner à son personnage de '
Claire' une empathie et un réalisme adéquats. La petite amie de baise de
Sergi López '
Prune' jouée par l'opulente
Sophie Guillemin et son visage de "doll" remplit parfaitement son cahier des charges en gérant bien son léger retrait du reste des autres personnages et, enfin, que dire de l'immense acteur Catalan ? Son '
Cesar' du Meilleur Acteur ne souffre d'aucune contestation possible tellement il survole son métier avec une facilité déconcertante pour ce rôle titre. Il insuffle à son personnage d'
Harry une telle intelligence, une telle perversité dans cette maîtrise de la manipulation d'autrui qu'on peut l'autoriser sans mal à entrer dans le Panthéon des personnages psychotiques les plus emblématiques de l'Histoire du Cinéma. Le genre de personnage dont l'accent "chantant" gagne votre confiance afin de mieux vous happer dans une spirale de conditionnement à la haine et à la violence. Enfin, une question demeure et demeurera pour toujours : Pourquoi ? On en sait finalement peu sur les motivations profondes d'
Harry et ce détail d'apparence frustrante donne un cachet et une puissance certaine à cette Oeuvre déjà incontournable de
Dominik Moll...
Un dernier mot concernant la Bande Originale de
David Sinclair Whitaker en harmonie avec la tension palpable au sein du duo de couples et avec, par instant, des envolées lyriques très '
Herrmanniennes'. A noter également qu'en plus du '
Cesar' du Meilleur Acteur, l'Oeuvre de
Dominik Moll rafle 3 autres récompenses dans les sections Son, Montage et Réalisation...