Warrior de Gavin O'Connor
(2011)
Vraiment l'une des plus belles surprises de l'année. Après un Pride and Glory sympathique mais perfectible où seuls les interprétations d'Edward Norton et Colin Farrell étaient à retenir, Gavin O' Connor revient avec un film aux apparences très trompeuses. En effet, Warrior conte l'histoire de deux frères, issus de la middle-class américaine, séparés par les années et les disputes qui se retrouvent confrontés l'un à l'autre durant un championnat mondial de MMA. Avec un tel sujet, il aurait été facile de tomber dans la pathos à outrance et dans le cliché ultime de la success-story sportive. Pourtant, le film frappe fort là où on ne l'attendais pas du tout, le film étant un drame familial puissant teinté d'une grande tragédie humaine. A l'instar de Pride and Glory et son contexte qui rappelait fortement les films de James Gray, Warrior décrit de façon convaincante une Amérique que l'on a un peu trop tendance à oublier, une Amérique touchée par la crise où les salariés sont obligés de cumuler plusieurs emplois pour vivre correctement et où l'on perd rapidement ses ambitions passées. C'est donc ancré dans des traumas spécifiques de son époque que Warrior dévoile un récit réellement touchant, la confrontation d'une même famille séparée (l'une ne prenant jamais le pas sur l'autre, le spectateur se trouve donc à la fin devant un combat où aucun il n'y a aucun favori), les deux ne cherchant jamais à suivre la fameuse american way of life, préférant se battre soit pour effacer le déshonneur soit pour survivre dignement avec les siens. Au milieu de cette histoire qui ressemblerait presque à une superbe tragédie humaine, il y a le personnage du père, certainement le plus important tant son implication au sein des événements passés est grande. On touche d'ailleurs ici certainement l'une des plus belles qualités du métrage, celle de ne pas chercher à tout expliquer à son spectateur. Ainsi, la déchirure familiale est souvent évoquée mais jamais décrite, idem pour le trauma irakien du personnage de Tom Hardy ou encore concernant le passé du personnage de Joel Edgerton dans la MMA, le point d'orgue étant cette fin tout simplement parfaite, tout en non-dits et en subtilité via des regards qui en disent longs, preuve une nouvelle fois que la qualité d'un film dépend énormément de la possibilité offerte au spectateur pour se l'approprier personnellement.
Si la réalisation de Gavin O'Connor est loin d'égaler la puissance de celle d'un James Gray (les dialogues familiaux) ou celle d'un Martin Scorsese (les combats), force est de constater que le réalisateur a réellement évoluée dans le bon sens. Avec un grain cinématographique prononcé et sans jamais tomber dans le penchant documentaire (certainement l'un des plus gros défauts de Fighter, ici battu à plate couture), O'Connor livre ici un travail non pas exemplaire (les combats de Joel Edgerton, malgré leur forte intensité, sont difficilement compréhensibles, notamment au niveau des prises de plaquage) mais de très bonne facture tout de même, arrivant à offrir au spectateur quelques plans vraiment très beaux (le plan d'ensemble sur la plage, le plan final) ainsi que quelques scènes mémorables, comme ce dernier combat (l'un des plus beaux qu'il m'ait été donné de voir sur un écran de cinéma) et surtout les deux scènes principales de Nick Nolte, notamment sa discussion nocturne avec Joel Edgerton qui prend véritablement aux tripes de par sa puissance émotionnelle. Mais bien entendu, le gros point fort du métrage est son casting, Tom Hardy livre ici certainement sa prestation la plus remarquable en terme de subtilité de jeu, il est aussi vraiment étonnant de voir la puissance animale qu'il dégage, ce qui ne laisse aucun doute désormais concernant la qualité de son futur rôle de Bane au sein de la trilogie Batman. Nick Nolte, quand à lui, livre là son rôle le plus marquant depuis des années, prouvant ainsi qu'il est encore capable de beaucoup. Enfin, Joel Edgerton est véritablement LA bonne surprise du film, malgré un personnage un poil moins bien écrit que les autres il arrive sans peine à créer l'illusion, de quoi donner réellement envie de regarder ses autres films. Si Warrior ne brille clairement pas par son originalité, il sera difficile de lui trouver des défauts, cela fait véritablement plaisir de voir une success-story aussi bien traitée et ne tombant jamais dans les clichés énormes. Certainement l'une des plus belles surprises de l'année et sans aucun doute l'un des meilleurs films de 2011, tout simplement.
9/10