SPOILERS
L'ouverture du film est sublime avec des photos d'archives d'une humanité qui commence joliment avec la nature, les paysans, le petit garçon qui pêche puis la suite des photos présentées deviennent de plus en plus négatives avec l'industrie, les poteaux électriques, la surpopulation, et le montage s'accélère sur fond musical nostalgique rythmé exprimant nécessairement la douce et folle ironie de notre évolution.
Classique et précurseur d'un genre (le post apo et dans une moindre mesure la fiction spéculative) au même titre que Thx1138 ou 1984, Soleil Vert (titre trompeur puisqu’on réalité le titre anglais veut dire "Soja vert") peut se targuer d'avoir été très avance sur son temps sur le fond: la terre est surpeuplée, l'océan se meurt, le plancton disparait, la pollution a détruit la couche d'ozone ce qui provoque une forte hausse de la température et le temps est à la disette. Les foules font la queue pour un bout de nourriture chimique verte et la vraie boustifaille est devenue très rare sauf pour les puissants (les riches). Écologie, inégalité sociale, cité totalitaire coupée du monde (la campagne est interdite), complot des lobby , flics corrompus, émeutes et désordre (là c'est assez gentillet par contre et je trouve que le film exploite très mal ses atouts) etc...La toile de fond est excellente et pour l'époque, indétrônable. Malgré tout, le film parait aujourd'hui un peu plan-plan et fainéant dans son montage , ses péripéties et son écriture. Jamais profond, un peu trop en retrait quant à la dite toile de fond et les acteurs du film sous-exploité ne permettent pas au film de vraiment gagner en épaisseur. L'émotion est très avare mais parfois présente (simple mais efficace et très honnête) comme la scène du diner entre les deux colocataires qui (re)découvrent la saveur des aliments naturels avec un sourire et un enthousiasme attachant :
Le personnage interprété par Edward G. Robinson est paradoxalement celui auquel on s'identifie le plus: il est le témoin rescapé d'un passé multicolore où les éléments de la Nature se déchaine parfois avec violence mais surtout avec grâce, volupté et fraicheur. Source de notre propre existence, elle ne résiste pas à l'Homme. Tout est devenu suffoquant, invivable, irrespirable, le ciel lui-même semble s'être enfuit sous les fumées jaunâtres et verdâtres. Les rares souvenirs proviennent d'un clan de vieillards occupés à raviver la cutlure et l'enseignement afin que l’Humanité et le monde qui se met puisse posséder une "mémoire" vu le désordre qui l'anime en 2022. Les gens dorment dehors,sur des escaliers et s’entassent dans les rues ou dans le dernier refuge d'espérance: l’Église (qui n'échappe pas à la violence: headshot pour un prêtre , coup de couteau dans le bide d'un poursuivant et c'est là que se fait arrêter le héros du film, détenteur d'une vérité secrète qui mourra certainement avec lui)
La mise en scène est très honnête, de bonne facture avec un super scope assez statique pour épouser encore une fois l'ambiance quasi dépressive de l’œuvre. Le gros problème vient de l'intrigue : pas passionnante pour un sous avec cette pseudo enquête par un mec habillé comme un plombier et 90% du cast est bien trop au second plan. On ne peut pas dire que ce soit bien ficelé, ni haletant ni prenant. Le rythme est assez lent, l’atmosphère très silencieuse (pas muette) devient parfois soporifique ce qui engendre un certain ennui pendant le film. Le scénario tente de nous intéresser par les multiples protagonistes qui ne servent quasiment à rien malgré une tentative évidente de taper dans une histoire à tiroirs/complot/cliffhanger. Dommage que trop d'aspects intéressants du film sous trop au second plan. Reste le personnage de Charlton Heston assez sympa, nonchalant, qui se permet tout et se sert sans demander.
Il est comme un enfant qui découvre pour la première fois certains plaisirs naturels (la douche chaude, le savon...).
Le final est assez intense et on retrouve même la force de l'ouverture du film avec le vieux qui se décide à mourir euthanasié (là aussi le film avait de l'avance
) sur du Tchaikovsky et du Beethoven en contemplant virtuellement les fragments d'un monde désormais en perdition dont seule la mort peut nous délivrer :
La fin très pessimiste montre l'Humain comme détenteur d'une conscience qu'il pourrait écouter mais dont il refuse les conseils : la cupidité nous rend aveugle. Les puissants enterrent petit à petit le monde (les ressources s'épuisent et , afin de survire et de gagner de l'argent tout en en dépensant quasiment pas, ils fabriquent de la nourriture avec des cadavres humains) tout en étant lucide sur le destin qui nous est réservé (cf: le meurtre du William Simonson qui accepte sans broncher sa mort car elle est "nécessaire") tandis que les plus faibles ne lèvent pas ou peu le petit doigt et, même quand la vérité leur pète aux yeux.