The Yards
9/10The Yards est un grand film, on va pas tourner autour du pot pendant 4 heures! Il rentre directement au panthéon des plus grands films noir. Mais pourquoi tant de louanges me demanderont les plus sceptiques?
Parce que le film noir ou le film de mafieux n'est jamais aussi beau que quand il est mélé à la tragédie pure. Et cet adage, James Gray l'a parfaitement bien intégré dans son premier film, dans la nuit nous appartient et dans celui-ci. Aux antipodes de l'approche clinquante et sanglante d'un Scorcese (que j'adore pourtant!), James Gray reste dans le cadre de la famille. Le but est d'en montrer la face sombre et d'amener le spectateur a voir que le danger et la gangrene peuvent provenir de l'intérieur. Là est tout le sujet du film. Il amène donc par petites touches tous les éléments qui vont mener à l'implosion de la cellule familiale. Evidemment, nous ne sommes pas dans n'importe laquelle puisqu'il s'agit de truands (Pas de haut vol, on est pas dans le monde du Parrain, il s'agit plutot de magouilles ferroviaires).
La grande force du film au delà de son intensité, c'est de pouvoir prendre son temps en mettant en place tous les personnages, acteurs malgré eux pour certains de cette tragédie. Alors oui, le rythme est lancinant mais jamais dénué de tension et d'interet. Gray se permet de mixer les genres tout en restant dans son approche du monde des malfrats. Dans un premier temps, le film explique le monde dans lequel gravite la famille de Léo. Combines, arnaques, pressions en tout genre, tout est limpide et raconté avec grande simplicité. Pas de montage cut et musical Scorcesien mais des plans larges nantis de magnifiques ralentis. Dès lors que l'étau se resserre sur Léo, le film devient encore plus passionant, délaissant le monde des arnaques ferroviaires pour se focaliser sur la cavale d'un mec et les choix cornéliens de sa famille.
Coté réalisation, c'est une totale maitrise des codes et un sens épuré du cadre. Pas de chichis, pas de rajouts opportunistes ou racoleurs, Ce mec filme façon 70's, c'est un fait! On retrouve tous les standards de la grande époque des Pakula, Pollack, Lumet. Les cadres sont soignés, étudiés, pensés et les jeux d'ombre lors de la fuite de Walhberg sont de toute beauté, participant grandement à l'ambiance si particulière du film. Le film se passe très souvent de nuit et Gray en joue énormément dans ses plans les plus iconiques (la rencontre Caan-Walhberg, c'est une tuerie!).
Encore une fois, la caméra prend son temps, s'adapte au rythme du film et nous sort des plans d'une beauté sombre à couper le souffle. On sent que le but n'est pas d'en mettre plein les mirettes en faisant du gangsta movie bling bling. On est clairement à l'opposé de ça. Ici pas de gunfight, de bastons sanglantes, de méchant tout désigné, de parrain, de morale sur la loi de la rue. Dans The Yards, rien n'est propret, rien n'est blanc ou noir. Tout le monde est dans la mouise à la solde d'un destin tragique commun.
Coté casting, Je ne sais pas comment ce mec fait, mais à chaque fois c'est du quatre étoiles. Ici il récupère le "bon" Mark Walhberg, celui qui sort de Boogie Nights et en qui tous les espoirs sont encore fondés (Allez il s'est repris depuis avec l'excellent Fighter! Il était temps!). Joaquin Phoenix porte tout simplement la marque des grands. Autant de dualité dans le meme regard (surout lors de la séquence finale) c'est juste la tres grande classe. Les seconds roles sont un peu plus mitigés. Pour une Elen Burstyn magnifique de souffrance (quelle actrice quand meme!) vous avez un James Caan et une Faye Dunaway qui se demandent encore ce qu'ils foutent là. C'est d'autant plus dommage que leurs roles sont quand meme important dans le cheminement de l'histoire. Reste Charlize Theron et je ne sais pas trop quoi en penser. Elle ne sert à rien de tout le film mais malgré tout elle se paie la séquence la plus intense du film (bon surement grace à la composition sans faille de Phoenix).
Pour toutes ces raisons, le film de James Gray est une réappropriation des codes du genre qui pourra en déstabiliser certains. J'entends déjà les "Il est trop chiant ce film, je prefere Scarface!". D'un classicisme totalement assumé, le film commence comme un polar noir pour se muer très vite en drame familial d'une intensité incroyable. Musique, jeu d'acteurs, photographie, tout concourent à magnifier cette histoire somme toute très classique. La tragédie Shakespearienne, c'est finalement des histoires très banales (amour, trahison, mort) que seule la forme peut transcender ou dézinguer. Pour the Yards, Gray a été touché par la grace et fait de son second film une oeuvre majeure à ne surtout pas oublier. Il s'agit peut etre meme d'un des rares films du genre à pouvoir tutoyer le Parrain. Voilà c'est dit!
A la gare y’avait trois manteaux, dans ces trois manteaux y’avait trois mecs et dans les 3 mecs y’avais trois techniques. Image 7/10: Putain Bac films!!! La gestion des noirs est catastrophique et le film se passe au deux tiers dans une nuit noire. C'est le mal récurrent de cet éditeur! Tous les noirs sont bouchés et fourmillants. Le visionnage ne s'en ressent pas mais pour un film qui base sa dramaturgie sur des images fortes, c'est quand meme pénible.
Son 9/10: On est pas chez Cameron mais ça fait son boulot en étant clair, ample et précis. Comme d'hab, un avantage à la VO!