Panic sur Florida Beach |
Réalisé par Joe Dante
Avec John Goodman, Cathy Moriarty, Simon Fenton, Omri Katz, Robert Picardo
Comédie atomique, USA,1h49 - 1993 |
8,5/10 |
Résumé : 1962, la crise des missiles de Cuba plonge la ville de Key West, située à 150 km des cotes cubaines, dans la psychose nucléaire. Au milieu du tumulte, Gene Loomis, un adolescent solitaire, attend la venue du producteur de films d'épouvante Lawrence Woolsey. Ce dernier doit présenter "Mant !", projeté en Atomo Vision, un évènement qui va bien plus loin qu'une simple séance de cinéma...
Panic sur Florida Beach est un film à multiples facettes. Tout d’abord, film à la gloire du cinéma de science-fiction ou d’épouvante (
The Fly, Them !, The Tingler , Panic in Year Zero…) et notamment du cinéma de série B, voire carrément du nanar, avec ses monstres en caoutchouc, ses héroïnes hurlantes, ses savants fous, ses dialogues neutroniques et incompréhensibles, ses créatures et ses mutations improbables issues de l’ère atomique… qui firent les beaux jours des « matinées » des salles obscures. Dans la passion du cinéma de Gene Loomis, le personnage principal du film, il y a assurément beaucoup de
Joe Dante, mais il y a aussi un peu de tous les amateurs de cinéma. Ce qui rend cet adolescent interprété, très justement par
Simon Fenton, particulièrement attachant à tous les cinéphiles ou cinéphages.
Le personnage de Lawrence Woolsey (magistral
John Goodman) est à lui seul déjà, un vibrant hommage au cinéma avec son profil très hitchcockien (ventre, cigare) et son humour noir. Son goût du spectaculaire rappelle
Orson Welles. Il ya quelque chose de la diffusion radiophonique de la
Guerre des mondes dans
Panic sur Florida Beach. Le goût de surprendre le spectateur, de lui procurer frisson et peur, de renouveler l’expérience cinématographique pour captiver son attention. Quel cinéphile n’a pas rêvé de tester le Rumble-Rama ou l’Atomo-vision et de vivre une séance telle que celle de l’avant-première de «
Mant » ? Le film catastrophe interactif poussé à son paroxysme. A ne pas manquer, la genèse du cinéma d’épouvante version Woolsey : où il est question de mammouth… ou encore la prestation pince-sans-rire et caustique de
Cathy Moriarty, dans le rôle d’une ancienne starlette, devenue la compagne et collaboratrice de Woolsey. Porte-monnaie officiel d’un réalisateur constamment fauché et accessoirement infirmière glamour en cas d’éventuelle crise cardiaque d’un spectateur lors de la très mouvementée projection de «
Mant ».
Hommage, mais aussi critique ironique d’une production cinématographique allant toujours plus loin pour attirer dans les salles. Ainsi ce producteur qui voit la manne financière du nouveau système inventé par Woolsey. Film assurément visionnaire, puisque si les effets 4D (tremblements, fumées, explosions…) ne sont pas vraiment de mise, un autre effet, la 3D a définitivement envahit les salles pour le plus grand bonheur financier des majors hollywodiennes. On notera la petite pique envoyée par
Joe Dante, aux studios de cinéma tout puissants, avec ce producteur qui souhaite remanier la fin du film, afin de ne pas trop traumatiser le public. On ne badine pas avec la menace nucléaire !!
Panic sur Florida Beach est aussi un retour sur une époque où la paranoïa « rouge » et la peur du nucléaire dominaient les USA. Une chronique parodique, mais aussi acerbe de cette Amérique des abris anti-atomiques, des stocks de nourritures, des exercices ridicules pour se protéger des radiations (le fameux «Plonger et se couvrir»), des cours de nutrition à la gloire du hamburger (où comment l’école favorisa l’obésité !!!), des ligues de vertus, du spectre de la liste noire, de la ségrégation… le tout sur fond de crise des missiles cubains avec un zest de «
McCarthysme ».
Joe Dante ne s’embarrasse pas de réalité chronologique, pour nous offrir une plongée au cœur des phobies américaines des années 50 et 60, même si son film se situe en 1962.
Enfin
Panic sur Florida Beach est un « Teen movie », nostalgique de cette époque où le cinéma était pour les adolescents, lieu de convivialité, de rencontre, de drague… un plaisir peu onéreux abordable pour tous.
Teen movie avec les aléas typiques du collège et ses différentes « strates » (les sportifs, les filles canons, les intellos, les solitaires, le blouson noir…), avec les joies des balbutiements amoureux et parce que tous le film est perçu à travers le regard que porte ces adolescents, sur la peur du nucléaire, sur la crise cubaine….En somme, de l’horreur réelle à l’épouvantable Homme-fourmi.
Comédie drôlissime, douce-amère, passionnante et politiquement incorrecte proposée par un Joe Dante qui nous livre une œuvre nimbée de ses souvenirs d’enfance. Ultime hommage au cinéma d’autrefois, Panic sur Florida Beach, c’est aussi, deux films pour le prix d’un, comme un clin d’œil au double programme des salles de cinéma de quartier des années 60.