L'ENFER DU DIMANCHE d'Oliver Stone
Sorti en 1999, L’enfer du dimanche n’est pas le film le plus connu de son auteur. Et pourtant, 12 ans après sa sortie, il demeure à mes yeux l’un de ses meilleurs films.
Etant lui même un grand fan de foot US, Stone s’approprie totalement le sujet et délivre une fresque sauvage, épique, d’une densité scénaristique incroyable et au casting parfait, jusque dans le moindre petit rôle. Il nous offre une plongée dans les coulisses d’un sport typiquement américain, univers ultra codé duquel il ne se contente pas de faire l’apologie, mais au contraire en souligne les failles au travers d’une galerie de personnages absolument passionnants.
A commencer par l’entraineur des Miami Sharks, Tony D’Amato, personnage ambigu tiraillé entre les exigences des dirigeants du club, les conflits au sein de l’équipe et sa vie privée sans issue. Un rôle en or pour l’immense Al Pacino, ici au sommet de son art (son speech avant le match final devrait figurer au panthéon des scènes fédératrices). On peut voir ce personnage comme une sorte d’alter ego du réalisateur, et le monde du foot comme un parallèle avec celui du cinéma.
On suit également l’histoire d’un joueur arriviste et prétentieux, Willie Beamen (Jamie Foxx, dans son premier grand rôle, est excellent), contraint de prendre la place du quaterback star de l’équipe, Cap Rooney (Dennis Quaid), blessé et vieillissant, mais qui a depuis longtemps le respect de toute l'équipe.
Cette situation permet à Stone et son scénariste John Logan (qu’on retrouve cette année au générique de l’excellent Rango) de creuser en profondeur la thématique du conflit de générations.
On retrouve d’ailleurs ce conflit en haut de la pyramide, puisque la jeune et ambitieuse présidente des Sharks, Christina Pagniacci (Cameron Diaz dans son meilleur rôle) prône une modernisation de l’équipe alors que D’Amato demande juste qu’on lui fasse confiance pour mener l’équipe à la victoire.
Les principales thématiques du film reposent sur ces quatre personnages principaux, mais le reste du casting n’est pas en reste et chaque petit rôle du film a son importance. On retrouve notamment James Woods, LL Cool J, Aaron Eckhart ou encore un véritable joueur de foot US, le monstrueux Lawrence Taylor.
Hormis ce casting démentiel, son scénario et ses dialogues aux multiples niveaux de lecture, une des grandes forces du film réside dans sa mise en scène. C’est bien simple, c’est la parfaite symbiose entre le fond et la forme. Rarement un sport n’aura été aussi bien filmé et retranscrit à l’écran, à tel point qu’il rend immédiatement obsolète les retransmissions télévisuelles.
Stone multiplie les effets visuels et sonores, aidé par un montage hallucinant de maitrise, filme ses acteurs comme des guerriers au cœur d’une bataille incroyablement immersive et brutale. Il est aussi à son aise lors des passages plus intimistes, réussissant à nous faire vivre ce championnat de l'intérieur, suscitant ainsi chez le spectateur une palette d'émotions aussi contradictoire que bouleversante.
La bande originale n'est pas en reste et colle parfaitement aux différentes ambiances du film, la photographie est superbe, faisant ressortir davantage la tonalité estivale de la ville de Miami.
Il y aurait encore beaucoup à dire sur cette incroyable plongée au cœur du football américain, une œuvre virtuose à la puissance visuelle et émotionnelle rare, qui s'impose directement comme la référence du film sportif. Cependant, il serait dommage de limiter le film à cette catégorie, tant il est avant tout un film centré sur ses personnages, le sport devenant simplement le cadre idéal pour traiter des thématiques universelles et profondément humanistes.
Every inch counts !
10/10