LE DERNIER DES MOHICANS
D'entrée de jeu, Mann nous met dans l'ambiance : date historique, petit texte mettant en avant le contexte géopolitique américain de l'époque, et mention de trois mystérieux hommes. Tambours, suspens, ouverture légendaire où nos yeux suivent avec effort une traque dans la forêt. trois hommes, apparemment des indiens et un blanc, courent avec endurance et vélocité après quelque chose. Vu le texte précédent on s'attend à ce que ça commence par une bataille vu l’engagement physique des personnages mais c'est une scène de chasse. Ouverture parfaite dans les ténèbres des sous-bois avec trois "fantômes" harcelant le cerf tout en lui demandant pardon et en le trissant d'éloge sur sa force et son endurance. Tout est là: l'esprit Native, la Nature, l'entrée en scène des trois figures quasi légendaires du film dans cette séquence qui nus montre que ce trio est déjà bien professionnel quand il s'agit de chasser alors imaginons-les dans une bataille...
On croirait que l'éclairage est naturel : la lumière qui filtre à travers les arbres, la fumée légère , les ténèbres des bois.. début u long métrage et déjà c'est plus époque que n'importe quel film dit "d'aventure" d’aujourd’hui. Comme le dit Scalp, voir Day-Lewis courir (ralentit ou non) c'est plus fort et iconique que toutes les merdes du genre réunies.
Tout est installé.
Le film ne se veut absolument pas biopic de qui que ce soit ni de faire l'apologie d'un peuple ou de ne se mettre que du côté des indiens (le film n'est ni pro-indien ni anti-européen). c'est juste une fresque à la fois épique/romantique/historique et c'est comme un puissant hommage rendu à tout un pan du cinéma et de la littérature. Des guerriers, des soldats, des batailles, de la politique, de l'honneur, de la fraternité, de l'amour, de l'aventure, de la trahison, de l'innocence...
Le dernier des Mohicans résume parfaitement les enjeux géopolitiques de l'époque sans s'y attarder (pas besoin) ni trop se positionner: il y a du "gris" chez les Anglais, chez les Français, les Indiens. Chacun ne se battant que pour soit finalement et ses proches. Là où d'autres sont prêt à mourir pour l'honneur en délaissant l'amour, la famille etc... c'est même là je dirais le principe du film. Les motivations personnelles différentes : Nathanaël se battant pour les siens et celle qu'il aime quand Duncan se bat pour son pays ,Magua se bat par vengeance, Munro pour l'honneur, la Milice pour leur terre et leurs fermes etc...
Tous les personnages correspondent à un cliché il faut l'avouer mais plus le film avance plus ce cliché devient équivoque. Le film n'e noublie pas son côté sauvage, violent et brutal.
Michael Mann réalise sans doute ici son film le plus atypique et le plus éloigné de son style (enfin les trois héros sont quand même des
professionnels de la traque
) pourtant il réalise là certainement le meilleur film sur cette époque de la 'histoire américaine en mettant clairement en avant des personnages qui préfèrent fuir des combats inutiles et puériles que d'aller de l'avant périr au combat eux pour qui la famille et le prolongement de la l'existence compte plus que tout. Malgré tout, ils vont devenir combattants malgré eux, par passion, par amour et Mann n'alourdit jamais le discours ni le coté romantique pourtant bien présent.
Outre la photographie sublime (qui n'en fait pas des tonnes) , le film possède une bande originale magistrale où tous les symboles du film fusionnent et composent des morceaux mémorables. L'affiche rend honneur au personnage puisque qu'il coure très souvent et saute et cours et saute et le tout au ralentit (ou pas) afin de sauver l'élue de son cœur, certainement la seule femme qui le lie à ses origines.
Décors, costumes, canons, fumée (quelle scène ce siège de nuit ! l’ambiance, les effets sonores...
), la reconstitution parait crédible , jamasi ridicule et les moyens sont exploités et les combats définitifs : les chorégraphies et le rythme en impose. C'est du grand cinéma et rarement le cinéma a su mettre en avant la vraie figure héroïque ; la bravoure et la vaillance comme véhicules du désir, de la passion , de l'altruisme, de l’amour et de l'honneur.
L'acmé du film clou le spectateur à son siège tant par la musique que par le rythme et les cadrages, le paysage et le sens. Émouvant, tragique, furieux, pessimiste..le final rentre au panthéon des meilleures séquences du Cinéma.
9/10