LAST ACTION HERO de McT
Injustement boudé lors de sa sortie en salles en 1993, Last Action Hero est pourtant l’un des films les plus passionnants de son auteur. Alors que tout le monde s’attend à un énième blockbuster calibré grand public avec Schwarzie dans le rôle principal, McT livre un film protéiforme: hommage parodique aux actionners des 80’s, véritable film d’action spectaculaire et ultra référentiel, mise en abime du monde du cinéma et réflexion sur le rapport qu’entretient le spectateur avec ses mythes cinématographiques.
Ce mythe, c’est Jack Slater (interprété par un Schwarzie en pleine forme), incarnation ultime du héros de film d’action et personnage principal d’une franchise dont le quatrième épisode est sur le point de sortir.
Le spectateur, c’est Danny Madigan, jeune cinéphile qui voue un véritable culte aux aventures de Slater. Son seul ami est un vieux projectionniste qui lui propose de venir découvrir "Jack Slater 4" avant tout le monde, en lui confiant au passage un ticket d’or réputé magique, qui aurait appartenu au magicien Houdini. En pleine séance, Danny se retrouve propulsé au cœur du film, et se voit contraint de devenir le sidekick de Slater dans sa nouvelle aventure. Et c'est à ce moment précis que nous, spectateurs, sommes également emportés dans ce tourbillon génial d'humour, d'action ultra-spectaculaire et de réflexion sur le rôle fondamental que tient le cinéma dans nos vies de cinéphiles.
Dans cette première partie, c’est donc un personnage réel qui va se confronter au monde fictionnel de Slater, un monde où il fait toujours beau, où l’on conduit sans regarder la route, où une balle suffit pour faire exploser une voiture, où les filles sont toutes superbes. Bref, tous les clichés véhiculés pendant les 80’s dans les films d’actions, comme une vision absurde de la réalité, que McT détourne avec un plaisir communicatif. Il se sert de la vision et des connaissances implacables de Danny sur les codes du genre pour confronter Slater face aux paradoxes de son univers fantasmé.
D’ailleurs, le fait de placer Danny comme le partenaire du héros est une façon de se moquer gentiment des buddy movies, dont les duos sont souvent formés par deux personnalités totalement opposés.
Danny, totalement conscient que tout ceci est hautement improbable, va s’efforcer d’ouvrir les yeux à Slater en tentant de lui faire comprendre qu’il n’est qu’un personnage, incarné par un acteur nommé Arnold Schwarzenegger, et que toute sa vie a été écrite par des scénaristes.
A force de persuasion et de situations rocambolesques (dont le vol du ticket magique par le méchant de l’histoire), Slater va enfin comprendre et accepter son statut de personnage de fiction, et non du héros qu’il croyait être. C’est à ce moment là que les codes vont s’inverser, et c’est maintenant lui qui va se confronter à la dure réalité du monde de Danny, et par extension le nôtre. Un monde sombre et beaucoup plus glauque, où les gens saignent quand ils prennent une balle, où les filles ne sont pas toutes des canons de beauté, et surtout, un monde où les méchants peuvent régner, chose jusqu’alors totalement impossible dans le quotidien de Slater. Il se rend compte qu'il n'existe vraiment qu'a travers la passion que lui voue Danny, moment qui résonne comme une déclaration au spectateur, sans lequel la magie du cinéma n'aurait aucun sens.
Hormis cette intelligente réflexion sur le rapport au réel et à l’imaginaire, Last Action Hero est avant tout une comédie d’action magistralement réalisé, où McT prend un malin plaisir à détourner tous les codes du blockbuster d'action pour en montrer le coté ouvertement caricatural. Il met en scène un petit bijou aux multiples références cinématographiques, aussi bien visuelles que scénaristiques, et dont la finesse d’écriture du scénario et des dialogues représente la quintessence du travail de Shane Black. Le rythme est implacable, les acteurs géniaux (mention spéciale au jeune Austin O’Brien, véritablement touchant), le montage et la bande son dépotent autant que les scènes d’actions, et les nombreux caméos raviront le cinéphile averti.
Avec Last Action Hero, John McTiernan donne tout son amour du cinéma au spectateur, et prouve s'il le fallait encore qu'il est l'un des plus grands.
Rater ce chef d'œuvre serait une Monumentale erreur !
10/10