Source code
Un film de Duncan Jones
3.5/10
Un film de Duncan Jones
3.5/10
Grâce à son premier film très remarqué (Moon, sorti en 2009), Duncan Jones est dorénavant un réalisateur attendu : en détournant les codes d’une industrie formatée au sensationnel, le cinéaste anglais (qui est aussi le fils de David Bowie) était parvenu à imposer un regard neuf et nouveau sur la science-fiction. Deux ans plus tard, le voici de retour avec Source code, film de transition plus que de confirmation, mené par le charismatique Jake Gyllenhaal. Malheureusement, le constat est plus que mitigé : par une approche qui se veut faussement moderne, Source code déçoit par la multitude de ses petites et grandes maladresses qui en font un film légèrement gaffeur mais surtout très démodé. On dit souvent que le second film représente pour un réalisateur le déterminant de toute une carrière : espérons que Duncan Jones parviendra à prouver le contraire.
Un thriller sans enjeux
Colter Stevens, un soldat de l’armée américaine, se réveille brusquement dans un train en destination de Chicago, accompagné d’une jeune femme qui semble le connaitre. Déboussolé, il cherche à comprendre sa présence dans ce train quand celui-ci explose. Le jeune soldat se réveille alors attaché dans un caisson et comprend qu’il est le fruit d’une expérimentation de l’armée qui consiste à revivre les huit dernières minutes d’une victime d’un attentat dans le but d’identifier le terroriste à l’origine du drame.
Source code partait d’un bon sentiment : le scénario, plutôt alléchant, paraissait suffisamment travaillé pour ne pas tomber dans la caricature extrême du film reposant sur la sublimation d’un personnage héros malgré lui. Si les vingt premières minutes, qui mettent en place avec tranquillité un récit relativement intriguant, semblaient annoncer un film divertissant et réussi (les allers-retours temporels, subis par le spectateur au même titre que le personnage, sont géniaux), on ne peut pas dire que la suite de ce film claustrophobe – l’enfermement d’un homme dans un caisson, dans un train, dans un système – soit autant réussie. Car très vite, le film change radicalement de direction, abandonnant son coté le plus fictionnel pour adopter les facettes du film existentiel et exigeant. La trame du complot tombe alors rapidement à l’eau au profit d’une romance peu crédible : comment sauver un amour impossible, contrarié par un destin déjà écrit ?
Difficile de comprendre un tel choix tant celui-ci relève d’un fatalisme inévitable : l’enlisement de l’intrigue dans un propos faussement philosophique rend ce film pontifiant profondément ennuyeux. Si la volonté de réaliser une prouesse si difficile (dénaturé un film calqué sur une doctrine ayant fait ses preuves) est évidemment à saluer, celle-ci emmêle le fil conducteur de ce récit ambitieux dans des tourbillons de maladresses : Source code est un thriller sans véritables enjeux qui épuise par la lourdeur de son inéluctable classicisme.
Beaucoup trop lisse
En reniant de la plus mauvaise des façons son identité de film conçu pour la plus grande masse – objectif qu’il semblait pleinement assumer dans ses premiers instants –, Source code apparait aussi comme un film baignant dans une approche prosaïque de la mise en scène cinématographique. Satiné au possible, propre dans ses moindres détails – les décors et les personnages sont d’une perfection physique étonnante pour un train de banlieue –, le film de Duncan Jones repose sur une bienfaisance caricaturale de la représentation de ses composantes. A l’image de son introduction qui semble calquée sur celle d’une série télévisée, Source code ne brillera jamais par la crédibilité de son apparence plastifiée, insipide et inodore.
En ce sens, les yeux bleus de Jake Gyllenhaal et le sourire accompli de Michelle Monaghan apparaissent comme les symboles les plus parfaits de cette manipulation du réel – les acteurs n’assurant leur performance que par leur apparence physique des plus stéréotypés. Si Source code n’hésite pas à brasser les genres avec une certaine habilité (thriller, science-fiction), son obsession à travestir le quotidien – quoi de plus quotidien qu’un train de banlieue ? – en fait un film qui transpire le mensonge et la tromperie.