Qu'est ce que le "No Reason" ? C'est une philosophie que va vous expliquer un Sherrif dès le début du film, sachant que le Sherrif avant de vous parler, il va sortir du coffre de sa voiture, voiture qui a bien pris le temps d'exploser toutes les chaises disposées sur la route quelques secondes avant. Le No Reason c'est ça, des choses, des gestes, des péripéties qui n'ont aucune raison d'avoir lieu, mais qui se produisent quand même. Il nous fait donc une liste d'exemple de No Reason qu'on retrouve dans quelques grands films, en concluant par "le film que vous allez voir, c'est que du No Reason".
Rubber est donc un Road Movie ultra-étrange, mais pas seulement. Oizo a décidé d'y installer aussi un public (nous quoi), avec des jumelles, en pleine interaction avec l'histoire du pneu. Je ne dirai rien sur le déroulement de l'intrigue, préparez-vous quand même à quelques chose en opposition avec le film traditionnel. Rubber est un enchaînement de scènes sans trop de sens, même si ça suit quand même une légère ligne directive. ça mélange beaucoup de genre, horreur, humour, policier, etc... On a pourtant le sentiment de voir un film d'un genre nouveau, un genre à part entière. Peu de dialogues, beaucoup de comique de situation, mais c'est pas un comique qu'on cerne facilement, c'est très implicite, et on peut vite passer à côté. Avec un peu de réflexion on pourrait trouver multiples symboliques, satyres de notre monde. J'y reviendrai peut-être suite à ma prochaine vision, là sur le coup j'ai pas envie.
Tout ça n'aurait pu être qu'un court-métrage, un film avec un script qui sent beaucoup l'amateurisme, le passionné de cinéma qui veut tourner son film fou. Si on lui enlève l'aspect humoristique, Rubber m'a pas mal fait pensé à Duel de Spielberg, ce style de film concept qui fait mouche parce que derrière ce script, il y a un talent et une technique irréprochables. Oizo le dit dans une interview, le tournage de Steack lui a paru vachement long, il a décidé de tourner Rubber avec le minimum de gens et le minimum de moyen. Le film a été tourné intégralement avec un Appareil Photo, en 2 semaines. Tous les effets spéciaux tiennent seulement de simples trucages sans grands mystères, mais qui pourtant fonctionnent toujours.
J'ai toujours pas cité la musique qu'a composé Oizo avec l'aide de Augé (de JUSTICE). C'est très très grand, inspirations éclectiques, la petite touche Oizo mêlant l'ambiance sonore à la musique elle-même (le tremblement du pneu lorsqu'il s'apprête à tuer quelqu'un est juste génial!). C'est hyper varié sans pour autant caricaturer l'image et le pneu, tout est composé avec subtilité. C'est grand.
Donc voilà, gros gros coup de coeur. Je ne me vois pas lui reprocher quoi que ce soit, tant le film penche vers le conceptuel. Un trip artistique loin de la technique hollywoodienne dont nous sommes aujourd'hui esclaves. Que du bonheur.
10/10