Le soupirant (Pierre Etaix - 1962) 8,5/10
Un jeune homme lunaire, incité par ses parents, décide de chercher la femme de sa vie... Ne sachant comment s'y prendre, il imite le comportement de ses semblables... Le résultat n'est pas toujours heureux...
Une comédie cartoonesque
C'est en circulant parmi des statues de nus que notre héros prend conscience de ses envies romantiques...
Le soupirant est le premier film de Pierre Etaix, un film qui, pour des raisons de droits, est resté hors des écrans pendant longtemps. Pierre Etaix est pourtant un comique de grand talent. Le soupirant est le premier film de ce réalisateur que j'aie pu voir, et le résultat est plus que concluant : je suis sous le charme.
Le coeur du film tient dans son coté burlesque, cartoonesque, même. En effet, le personnage principal du film, incarné par Pierre Etaix, parle peu. Le ressort comique vient donc de sa gestuelle, de sa façon naïve d'imiter les gens qu'il rencontre dans la rue, d'être tout entier dans ce qu'il fait.
Toutes sortes de petites scénettes viennent ponctuer le film, notamment avec les parents du jeune homme, le père multipliant les techniques de sioux pour fumer et piccoler sans que sa femme ne s'en aperçoive.
La plupart des gags ne viennent donc pas des dialogues, mais de la gestuelles des comédiens, des situations (les ruses que développe le jeune homme pour emporter des affiches de son actrice préférée, par exemple). Du coup, on pense souvent à Jacques Tati ou aux burlesques muets. Mais avec une certaine modernité dans le découpage qui inscrit plus facilement le film dans son temps.
Un travail sur la parole
Garçon, une autre bouteille !
Heu... Non, non...
La parole est omniprésente dans le film, mais il n'y a pour ainsi dire pas de dialogues : pendant que les gens parlent, on regarde surtout ce qu'lls font. Ou alors, éventuellement, une phrase annonce une intention ou une envie, et introduit le gag suivant. On pense ainsi à la jeune femme très envahissante que le héros a eu le malheur de séduire un soir. Son babil devient aussi pénible pour le spectateur que pour lui... Et quand elle insiste pour qu'il l'accompagne, son "non" insistant devient drole du fait qu'au plan suivant il est en train de s'exécuter...
Bref, cette utilisation de la parole autant comme bruit que comme élément de dialogue est une vraie réussite, et contribue beaucoup au charme du film.
Un coté romantique charmant
Le soupirant est vraiment un film charmant, qui décline la naïveté de son héros, que l'on suit avec indulgence pour la légèreté de ses gags, qui s'énoncent comme des gags simples, visuels ou de situation. Cela dit, et c'est une des forces du film, à force de subtilité, on s'attache à ce petit univers, où même la femme trop envahissante, dont on a ri un moment, finit par trouver un compagnon qui lui convienne, et ce qu'il nous suggère des relations hommes-femmes ou parent-enfant n'a rien perdu de son actualité. Cette belle capacité d'observation resservie avec humour fait indéniablement partie des grandes qualités de la mise en scène d'Etaix.
Il me tarde de découvrir d'autres films de ce cinéaste.