Kill Bill Volume 2 de Quentin Tarantino
(2004)
Après visionnage du premier opus, difficile de ne pas attendre avec une impatience difficile à contenir
Kill Bill Volume 2. Et pour cause, le premier film se terminant non seulement sur une vengeance inaboutie (trois personnes de la Death Five List étant encore vivants) mais aussi sur un cliffhanger de taille qui laisserait penser que la vengeance de The Bride ne se passera pas vraiment comme elle l'avait prévue et qui pourrait même la mener à sa perte. Un second opus prometteur donc, en terme d'histoire, de séquences cultes (le combat The Bride vs Bill faisant imaginer les scènes les plus folles dans l'esprit du spectateur) mais aussi tout simplement pour compléter un premier film déjà grandement ambitieux.
Dans ce second volet, pas de rappel ou d'explications pour ceux qui auraient oubliés ou tout simplement jamais visionnés
Kill Bill Volume 1. Le film commence sur un monologue de The Bride, tourné en noir et blanc dans sa voiture en route vers une destination inconnue. Elle annonce qu'elle est plus proche que jamais de son but, enfin prête à arriver à l'endroit où se trouve sa dernière cible. Puis retour en arrière, à El Paso, pour connaître un peu plus en détail la répétition du mariage qui donnera lieu au massacre qui fera débuter cette violente histoire de vengeance. Vous l'aurez compris, Quentin Tarantino use encore de son montage non-linéaire pour raconter son histoire. Un gimmick un peu inutile à première vue mais qui se révèle l'une des grandes forces du film à l'instar du premier opus puisqu'il crée avec ce montage une certaine frustration du spectateur et donc une envie bien plus grande de connaître le fin mot de l'histoire.
Toutefois, cette scène à El Paso est loin d'exister uniquement pour créer de la frustration puisqu'elle permet de présenter enfin le personnage-clé du récit, à savoir Bill, bad guy jusque là totalement invisible. Cette scène toute particulière est d'ailleurs l'un des grands moments de cinéma de Quentin Tarantino. Une scène filmée au millimètre près, où chaque plan est mûrement réfléchi, où les références s'enchaînent (la musique d'Ennio Morricone, The Bride se tenant comme John Wayne dans le plan final de The Searchers, etc...) et surtout où Bill, joué sublimement par l'excellent David Carradine qui trouve là le rôle de sa vie, va devenir en l'espace de quelques secondes l'une des icônes cinématographiques les plus marquantes de ces dernières années. Dans un dialogue déjà culte où chaque plan, chaque mot prononcé est véritablement lourd de sens, le spectateur connaissant déjà la conclusion, et se terminant sur un travelling arrière d'une beauté sans pareille, Tarantino marque son film d'une pierre blanche en annonçant la couleur : cet opus sera très différent du premier film et marquera son apothéose filmique comme peut-être plus jamais il ne pourra le faire.
Car oui, si
Kill Bill Volume 2 complète son prédécesseur, il n'en est pas moins totalement différent à tout les niveaux. Plus posé, plus réfléchi, plus bavard aussi mais surtout plus marquant en terme d'intensité dramatique, c'est un tout autre film qui se présente au spectateur. Un film pensé comme un véritable hommage au western-spaghetti et notamment à Sergio Leone (inscrit au générique de fin avec Charles Bronson, Sergio Corbucci ou encore Lee Van Cleef), mais avec une démarche plus subtile, moins tape à l'œil. Ainsi, même la musique, utilisée volontairement à outrance dans le premier volet, est ici un moyen efficace de donner une puissance symbolique comme lors de cette sortie claustrophobique d'outre-tombe, un entraînement pour le moins douloureux ou encore un monologue de Budd face au corps impuissant de The Bride.
Ce second volume est pourtant loin de délaisser l'action au profit d'un récit mieux construit. Et même si ce second est bien présent, on ne pourra qu'être ébahi par une scène de combat entre The Bride et Elle Driver dans une caravane (à noter que la seconde "meure" de la même façon que son personnage dans
Blade Runner, clin d'œil très sympathique). Un combat qui relève presque du génie par son inventivité (n'importe quel objet, même le plus insolite, peut servir d'arme) et surtout sa réalisation, avec une lisibilité de l'action phénoménale, une gestion de l'espace qui ne l'est pas moins et une technique irréprochable (split-screen, champ/contre-champ ou encore un superbe plan en double focale). Cette séquence, clairement le sommet du cinéma de Tarantino en terme de scène d'action, est aussi le point d'orgue où The Bride pourra reconquérir son identité avant de s'attaquer à sa dernière cible : Bill.
Et c'est dans cette dernière et ultime partie du film que Tarantino ose prendre son public au dépourvu en faisant du duel tant attendu The Bride/Bill un combat verbal de plus d'une demi-heure pour à peine dix secondes de combat physique. Un pari osé mais remporté haut la main tant il se révèle passionnant dans sa construction, ses dialogues et sa puissance dramatique. La mort de Bill est d'ailleurs surement l'une des plus belles visibles dans un film, un moment qui noue les entrailles du spectateur comme peu de films savent le faire.
Terminant son film sur une note mélancolique mais heureuse, Tarantino signe là surement sa plus belle œuvre tout en concluant son diptyque de la manière la plus classe qu'il soit. Aucun doute là-dessus,
Kill Bill est destiné à devenir l'un des monuments cinématographiques des années 2000, un film d'ores et déjà culte et qui mérite amplement son statut, c'est assez rare pour être souligné. Merci QT.
"The lioness has rejoined her cub, and all is right in the jungle."
NOTE : 10/10