ONDINE
Neil Jordan réalise ici un film touchant au doux parfum poétique traversé par un visuel lugubre et habité par des personnages au destin tragique , monotone et douloureux dont les cicatrices d'une vie agitée se rouvrent peu à peu.
Ondine est un conte vécut par des protagonistes qui ont littéralement "besoin" de vivre quelque chose d'étrange et de merveilleux pour palier leurs troubles affectifs. Colin Farell en père ex-alcoolique qui menait une vie de débauche avec sa femme (qui elle ,continue de dégringoler la pente avec un mari peu recommandable) avant que naisse leur petite fille handicapée aujourd'hui rêveuse, curieuse cultivée tout mignonne et fragile ; Ondine, sirène recueillie dans le filet d'un pê(é)cheur( Farell) torturé en voie de rédemption qui s'éprend petit à petit d'une femme mystérieuse, à la beauté hypnotique, Naïade amnésique dont l'interprétation et l'écriture emprunte directement à un style d'icône féminine purement fantaisiste (La jeune fille de l'eau fonctionne sur le même genre de portrait) où la fragilité côtoie la douceur, l'innocence, la pureté, la beauté et le lyrisme.
Intervenant dans la vie de gens simples -mais au mal-être évident- comme une providence, Ondine possède dès le départ quelque chose d'ambigu: le spectateur devine aisément que rien de fantastique ne jonche le film mais certaines scènes laissent un doute et l'évolution des personnages et de l'intrigue nous invite à ressentir une telle empathie envers eux que l'on espère sincèrement qu'Ondine est réellement une "Selkie" perdue sur Terre afin de changer le destin d'une vie fissurée en quête d'amour, de rédemption et du salut.
Neil Jordan reste simple et hormis quelque passage caméra à l'épaule pour nous rapprocher au plus près des personnages, le film reste simple (ce qui colle énormément à l'ambiance côtière/champêtre Irlandaise/Écossaise dont le cinéaste s'approprie vraiment l'environnement et le folkore ainsi que la culture musicale contemporaine: il emprunte quand même Sigur Ros. Le casting est composé d'Irlandais et Ondine " Alicja Bachleda-Curus vient vraiment des pays d'Europe de l'Est) mais la portée émotionnelle est sublime. Les rôles secondaires mettent surtout en scène le prêtre et l'ex-compagne alcoolique de Farell. Les background sont survolés mais les émotions en disent longs, les quelques dialogues en révèlent juste ce qu'il faut pour ne pas alourdir unstyle de récit qui veut vite devenir lourd et niais. Le relation père/fille est très originale, on sent vraiment l'amour et la simplicité et la realtion prêtre/père est sympa aussi avec un humour légèrement cynique et quelques répliques croustillantes.
Farell signe un de ses meilleurs rôles où la majorité de ses ticks de comédien sont mis au placard. Outre son changement physique il dégage une sincérité débordante, on le sent impliqué dans son personnage. L'actrice qui endosse le rôle de la Selkie est magnifique (au sens propre et figuré).
Les musiques ne sont pas très bien utilisées et trop redondantes même si elles collent à l'univers et à l'ambiance. Ça appuie trop l'émotion et ça la transforme en ressentit négatif: on a l'impression d'avoir affaire à une histoire simpliste et niaise alors que pas du tout. La happy-end est totalement méritée et justifiée pour ce père tourmenté et sa rêveuse de fille qui se révèle être bien plus mature qu'on ne le croit. c'est justement le père qui se laisse emporter par le charme d'une rencontre irréelle et qui face à la vérité se renferme et perd sa force intérieur pour replonger dans l'alcool un court moment. La jeune fille accepte facilement la réalité.
Le passé et les circonstances de la rencontre avec Ondine sont trop explicatives. Neil Jordan aurait du rester plus évasif car on en devinait assez: le film possède beaucoup de non-dits mais la narration et la mise en scène souligne largement certains détails.Cela dit les révélations et l'acceptation (un peu trop facile?) du passé d'Ondine révèle le véritable fond du film: la quête de rédemption. Pour Farell et Ondine justement.
Anything strange or wonderful?
Why do you always say that?
It’s a kind of wish.
8/10