Phenomena de Dario Argento (1984)
Après avoir lu un article sur l’utilisation d’insectes par des inspecteurs pour résoudre des enquêtes criminelles, Dario Argento trouva le sujet de son nouveau film : les insectes, et leur utilisation à des fins judiciaires. Phenomena renoue avec le caractère fantastique de l’œuvre Argentienne, après le retour au giallo que marquait
Ténèbres (1982). S’ouvrant sur une séquence fascinante au sein d’une nature suisse magnifique et dangereuse, le film capte notre intention dès les premières minutes. La vision subjective du meurtrier inconnu pourchassant son innocente victime au sein des montagnes suisses est un des grands moments du film, mention spéciale au montage ultra cut nous rendant littéralement perdu, à l’image de la future victime. Recyclant une grande partie des éléments présents dans
Suspiria (1977) (la jeune fille américaine fraichement débarquée dans un pays étranger, la demeure entourée par les bois menaçants,…), le film n’a toutefois peu à voir avec son illustre prédécesseur. Jennifer Connelly campe donc la bien nommée Jennifer, fille d’un acteur célèbre, qui débarque en Suisse pour étudier et va enquêter, avec son ami entomologiste, pour démasquer un assassin de jeunes filles qui sévit dans la région. Il est surprenant de voir que le scénario est ici beaucoup plus développé que dans certains films de Dario Argento où ce dernier est souvent plus un prétexte à une succession de scènes qu’une véritable raison d’être du film. On est ici face à un thriller et à un film fantastique de haute tenue, faisant sans aucun doute parti des sommets de la carrière d’Argento. L’interprétation des personnages principaux est à ce titre de très bonne qualité, ce qui tranche une fois encore avec d’autres films du cinéaste transalpin qui ne brillent pas par le niveau d’excellence de leurs interprètes. Jennifer Connelly, ici dans son deuxième film, est absolument parfaite dans ce rôle de jeune femme solitaire qui noue une relation toute particulière avec le génial Donald Pleasance, habitué de plateaux de tournages Carpenteriens. J’ai toutefois des réserves sur Daria Nicolodi, que son réalisateur de mari nous ressort dans chacun de ses films et qui, si elle n’est pas mauvaise, ne m’a jamais énormément convaincu. Les séquences marquantes s’enchainent tout au long des 145 minutes du film : le premier meurtre, le premier soir à l’école (et son meurtre dont plus personne ne parle par la suite d’ailleurs), l’attaque des insectes sur l’école ou encore la scène où Connelly se retrouve plongé dans un véritable bain où les cadavres des victimes faisandent. L’utilisation d’un singe comme second rôle aurait pu être extrêmement casse-gueule mais se révèle étrangement être très convaincant. La relation de cet animal avec Donald Pleasence ou Connelly est une grande réussite. J’étais un peu incertain vis-à-vis de l’œuvre de Dario Argento, vouant une passion à
Suspiria et ayant eu un peu de mal avec
Profondo Rosso et ayant détesté
Trauma. Phenomena m’a en quelque sorte réconcilié avec le cinéaste en montrant qu’il était capable de réaliser de très bon films. Une totale réussite.
8/10