The town, de Ben Affleck : 4/10
Ben Affleck est assurément une personnalité hollywoodienne atypique. Propulsé sous les feus des projecteurs grâce à des succès internationaux, Pearl Harbor en tête, l’acteur est parvenu à tirer les ficelles d’une industrie en pleine mutation en faisant preuve d’une intelligence indéniable : en réussissant à surmonter ses rôles de « belles gueules », il est parvenu à assurer à sa carrière une longévité certaine.
Désormais passé derrière la caméra depuis Gone baby gone, qui reçu un accueil plutôt élogieux à sa sortie, l’acteur/réalisateur revient sur le devant de la scène avec The Town, un thriller plutôt efficace mais incroyablement classique et sans surprises. L’ensemble manque de saveurs et, malgré un exercice de style réussi, le film ne parviendra jamais à émerveiller, faute d’un scénario beaucoup très simpliste et d’un ensemble trop peu perfectionniste.
Du déjà-vu… en plus grossierThe Town est un film qui pourrait bénéficier d’une double lecture. D’un coté, le film est le récit d’une bande de braqueurs professionnels qui, coups après coups, enchaine les réussites. De l’autre, The Town est aussi le portrait d’un malfrat qui, sous le charme d’une charmante demoiselle, décidera d’arrêter ce qui, jusqu’aujourd’hui, faisait toute sa vie. Malheureusement, sous ces différents angles, le film ne parviendra jamais à exceller.
Tout d’abord, en s’inspirant de très nombreuses œuvres (Les infiltrés, Les affranchis, Les évadés, Inside man, Heat, etc.), Ben Affleck fait de son film un melting-pot d’idées déjà vues et déjà sublimées par de très grands cinéastes. L’entreprise semblait arrogante, elle sera finalement suicidaire. Car même si l’acteur/réalisateur est, dans ses propres fonctions, d’une efficacité plutôt remarquable, l’ensemble de The Town manque indéniablement de fraicheur et cumule de nombreuses maladresses : scénario prévisible, dialogues ratés, propos simpliste et personnages caricaturaux ne peuvent former les racines d’un film réussi. La recette ne parviendra ainsi jamais à prendre, malgré un début plutôt encourageant qui place le spectateur dans aux premières loges d’un braquage mouvementé.
A titre de comparaison, là où Les infiltrés parvenait à déjouer le fil conducteur de son récit, The Town ne fera qu’avancer sur le chemin qui lui était tout tracé. Là où Les affranchis proposait une vision empirique et hyperbolique d’une société bâtit sur le pouvoir et l’argent, The Town ne fait que brasser les éternelles caricatures qui ne semblent pas vouloir se détacher des films qui touche, de près ou de loin, au banditisme (parrain italien intouchable, enfance malheureuse, etc.). La scène finale, grotesque et recyclée d’une cinquantaine de films, finira d’achever les plus septiques.
Quant au coté sentimental du film, celui-ci est malheureusement d’une niaiserie rarement atteinte. Particulièrement épurée de toute complexité, la trame émotionnelle du récit est souvent synonyme de néant : rencontre amoureuse éclaire et simpliste, dialogues pauvres, relations amicales caricaturales, scènes surjouées… Incontestablement le principal point faible du film, l’émotion affichée n’est qu’un mirage aveugle et superficiel. Dommage, car le background du personnage, simple mais relativement efficace, aurait mérité un meilleur traitement.
Assez divertissantMalgré ce florilège de défauts, The Town est-il un film totalement raté ? Certainement pas. Loin d’être excellent, ce dernier reste néanmoins un divertissement d’une qualité acceptable. Les scènes d’action sont relativement bien tournées, en s’appuyant sur des plans serrés et mouvementés, les acteurs sont, d’un point de vue général, plutôt concentrés sur leur sujet, et le rythme est, avouons-le, d’une efficacité redoutable : il sera en effet impossible de s’ennuyer devant le spectacle offert tant celui-ci est constamment relancé par de nombreux évènements plus ou moins excitants. A l’aide d’une vision multilatérale, à savoir la double face du personnage principal, le spectateur sera sans cesse confronté aux problèmes de ce dernier et en suivra les évolutions avec une certaine curiosité, basée essentiellement sur un voyeurisme de surface. On parvient avec difficulté à s’attacher au personnage, mais l’ensemble manque tout de même de sincérité.
L’important reproche que l’on peut attribuer au film de la star américaine est donc indéniablement son manque de perfectionnisme lié à une conventionalité fatigante. En misant tout sur une plastique de bonne facture empruntée aux plus grands classiques contemporains du genre, The town est une vision imparfaite du thriller sentimental nouveau. Souvent grossier, parfois efficace, le film ne laissera surement pas une trace indélébile dans la mémoire de ses spectateurs. Il ne fera que le bonheur d’une brutalité soudaine et, disons-le, pas très exigeante.