Voyage Au Bout de l'Enfer de Michael Cimino
Fresque tragique décrivant l'impact psychologique du conflit Vietnamien sur une Amérique insouciante
Dès les premières images Cimino donne le ton, le réalisateur délivre son chef d'œuvre jouant sur la longueur pour tracer un lien communautaire fort, un triangle amoureux, une amitié slave, la vie d'une classe ouvrière ou les fourneaux d'une usine de sidérurgie domine un quotidien terne montagnard.
Durant les préparatifs d'un grand mariage Orthodoxe, Cimino tisse les liens entre les personnages dans un bar arrosé par la mélodie de "Can't Take My eyes Off You" toute l'insouciance, la joie et l'allégresse transpire dans l'interprétation pour être subjugué dans un rassemblement de foule tant affectionné par son réalisateur.
Bien sur quelques excès viendront gâcher la fête montrant la fragilité de ce bonheur, le seul échappatoire d'un destin tragique: la chasse chaotique d'un cerf.
Sans transition le réalisateur nous embarque au coeur du conflit, dans un camps de prisonniers flottant au bord d'une rivière, Cimino délivre l'ultime séquence viscérale : La roulette russe rythmé par les cris des Viêt-cong "pai pai" et les gifles qui rougissent leur visages, un duel imposé monument de tension, de violence et de cruauté. Un passage qui prend aux tripes, véritable charnière du long métrage qui sera décliner sans perdre son intensité émotionnelle.
Finalement Cimino se concentre sur l'avant et l'après guerre pour mieux narrer les répercussions du traumatisme qu'il soit physique ou psychologique. Le retour est une longue fuite en avant entre le frêle John Savage qui n'ose plus voir ses proches maintenant privé de ses membres préférant voir son hospice comme un hôtel de luxe, un DeNiro barbu excelle une nouvelle fois reclus (le plus grand acteur du monde ?) dans un motel il ne peut parler de son vécu préférant se réfugier dans les bras d'une Meryl Streep rayonnante dans son souvenir et un Christopher Walken glaçant au visage d'ange bercé dans la folie (son meilleur rôle ?) ne pouvant s'extirper du cauchemar qu'il revit à l'infini.
Grâce à l'éblouissante interprétation, Cimino peut se permettre de réduire les dialogues au strict minimum intériorisant au travers des regards le malaise ambiant, une dénonciation ample et vertigineuse soutenu par l'hymne national entonné par un peuple immigré en deuil.
10/10