LE LIVRE D'ELI
Le dernier film des Frères Hugues est clairement (après la route) le meilleur film post-apocalyptique.
Mélangeant plusieurs genres dont il emprunte certains codes et dont les références saute aux yeux, Le Livre d'Eli s'impose comme un requiem visuellement et musicalement hypnotique.
Du western en passant par le genre post-apocalyptique et en saluant évidemment au passage Mad Max et des œuvres de Leone, le film est littéralement nourri par toute une culture et sachant que les cinéastes sont passionnés de comics ont comprend aisément tout le travail iconique sur le personnage d'Eli.
Le travail sur la photographie est ultra léché. L'utilisation des filtres impose clairement graphisme abstrait, trop léché pour être dépressif et très souvent on peut presque penser à une colorisation de bande-dessinée. Retouches numériques, filtres, le tout pour justement rendre le film irréel.
Les movuements de caméra son nombreux, fluides et c'est une mise en scène efficace qui donne vie à un film post-apocalyptique au rythme lent ponctué de ci de là de scènes d'actions rapides, performantes et très bien découpées. C'est lisible, carré, court et joliment shooté.
L'introduction du film plonge directement le spectateur dans l'ambiance du film. Un lent plan-séquence nous emmène d'un corps étendu dans un bois sous les cendres, survivant d'une probable apocalypse tandis qu'un chat s'avance afin de survivre tant bien que mal. rachitique, la peau sur les os, il est observé par un homme immobile, l'arc tendu, la flèche prête à partir. Le rythme posé scotche la rétine. Âme solitaire dans un monde dévasté, Eli marche au ralentit, plan et gimmick iconique à souhait sans pour autant surcharger leur film les Frères Hugues savent imposer des cadrages éclairés de telle façon qu'il n'y pas besoin de contre-plongée ou plongée pour susciter la grandeur ou la domination d'Eli sur les autres.
C'est jamais grotesque ou trop appuyé. Pas de pathos ici. Juste une quête spirituelle dans un monde anéantit.
L'interprétation de Denzel Washington est à saluer tant il en impose. Sa voix, ses dialogues, ses postures, son visage, ses vêtements, ses lunettes de soleil, sa machette (il a un gun qu'il utilise quasiment jamais) et son aura mystique...Tout cela est attractif, charismatique et envoutant.
D'ailleurs la scène du combat dans le "bar" fait énormément penser à un western et son saloon. La gestion de l'espace est ultra précise, le fight est presque en un seul plan et on pense presque à du chambara tellement ça va vite e: plan large ça doit donne toujours un côté authentique à la chorégraphie. On évite ainsi de passer par 150 plans différents , tous des gros plans en plus et qui rendent le tout illisible. Les Hugues démontrent un savoir faire indéniable. Et puis putain un prophète qui cite la Bible en se préparant à un fight ça tue bordel !
L'intrigue du film n'est pas révolutionnaire mais c'est suffisamment bien raconté pour suscité un minimum de suspens. D'ailleurs c'est rare qu'un film face croire que l'on peut deviner la suite alors qu'en fait les réalisateurs jouent avec nous. Évidemment il y a des codes "trop respectés et le coup de la fille qui suit partout Eli c'est le genre d'éléments qu'on est vite gavé de voir aussi souvent. Comme si le héros "devait" obligatoirement s'attacher pour perdre en liberté et se faire avoir (c'est ce qui se passe ici et dans 4000 films). il n'empêche que c'est crédible, c'est logique même vu qu'Eli est un homme qui a la Foi, qui tente de suivre les préceptes d'un livre qui l'habite et qui lui donne espoir. Sa solitude n'est pas "voulut", elle est inéluctable. En tout cas au départ. La suite lui fait partager ce que contient le livre tel un prophète il n"apprend" pas ni ne donne de leçons mais cite et la jeune fille prend ce qu'elle veut, interprète ce qu'elle veut. Eli n'impose pas et ne fait jamais de discours religieux.
On devine aisément de quel livre mais la fin remet les pendules à l'heure et là où les Hugues font fort c'est qu'ils permettent aux spectateurs de se dire sur la première partie "ah baj c'est la Bible on a deviné c'est nase" et de finir le film en se disant "merde c'était carrément pas le fait que ce soit la Bible qui était important". Les codes sont donc respectés mais aussi utilisés d'une bonne façon. Ils sont là pour que la fin surprenne -non pas de manière direct comme face à un révélation ponctuelle- par sa dimension spirituelle, envoutante, comme une acmé à la portée humaniste mémorable.
Eli n'est même pas vraiment un héros : Il reste sur son chemin et malgré ça, il ne peut s'empêcher de venger les victimes alors que certains combats auraient pu être évités. Presque un anti-héros. Une icône et un prophète des temps futurs qui prophète non pas sa vie , sa seule vie, gratuitement mais un livre, objet à la fois dangereux par l'utilisation de certains (Gary Oldman sait que la Bible possède un grand pouvoir de persuasion et d'asservissement "consentant" ) et d'une pureté absolue dans ses plus grands grands piliers fondamentaux. Ce sont les hommes qui utilisent mal un livre et l'interprètent mal avec des arrières-pensées négatives et violentes.
Eli protège une relique à l'importance cruciale tant il fait partie de l'histoire de l'humanité. Les Hugues devaient choisir un livre religieux: il en existe trois "principaux" et à la fin on voit bine la Torah et Le Coran. Donc il n'y a pas lieu de dire que le film fait l'apologie de la religion catholique. Il fallait choisir un livre et la Bible étant le plus largement "connu" ça coulait de source.
Certains y voient un message pro-religieux alors que pas du tout. Il ne faut pas s'arrêter au livre et aux passages cités (qui sont d'ailleurs des extraits "neutres" car ils ne tente pas de "convertir" les auditeurs mais se contentent de délivrer un message pacifiste et humaniste sous une écriture très imagée). d'ailleurs on n'entend pas une seule fois le mot "dieu" dans le film. "notre père". Point barre. Les frères Hugues ne tentent-ils justement pas de repousser aux maximum l'imagerie que l'ont peut avoir du Créateur pour bien nous faire comprendre que le film ne porte pas du tout en lui un semblant d'analyse théologique ?...c'est bien plus "large" que ça dans le fond.
Eli porte le feu, porte l'espoir d'un renouveau dans un monde que l'humanité à détruit par la guerre (et d'ailleurs c'est ùêm évoqué que ce serait la religion la cause mais encore uen fois dans une guerre ce n'est jamais la religion l'élément déclencheur.Il faut encore plus se rapprocher de la source. Le déclencheur c'est l'homme qui décide d'en arriver là. Peu importe les raisons. LA religion n'a jamais dit "faite la guerre et sciez la branche sur laquelle vous êtes assis". Dieu a laissé le lire arbitre à l'Homme. C'est écrit mot pour mot dans le textes religieux. Cela veut tout dire.
Le livre d'Eli. Le titre n'est pas "la Bible d'Eli". Les cinéastes indiquent clairement la portée du message. Le livre de Scalp, d'Heatmann, de Zack, de Moricenlive, de waylander etc...chacun son "livre". Chacun sa Foi.
Bon pour en revenir au film je le trouve vraiment excellent. Très bien réalisé, ya une vraie ambiance, une vrai fond, une bonne interprétation et c'est loin d'être manichéen. Eli tue de sang froid et plus tard il avoue qu'il n'applique pas les préceptes du livre sacré comme il le souhaiterait. Gary Oldman reste fidèle à lui-même en bad guy boitillant. Pas mémorable comme interprétation mais ça suffisait.
9/10