[Niko06] Mes critiques en 2009

Modérateur: Dunandan

Re: [Niko06] Mes critiques en 2009

Messagepar Niko06 » Mer 02 Sep 2009, 11:10

Alors qui déconstruisent à ce point le genre je vois pas... par contre dans les plus originaux, qui utilisent le genre du western pour en faire autre chose je pense, scalp confirmera il est plus calé que moi là-dessus, qu'il faut voir Django, Tire encore si tu peux et Keoma
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Re: [Niko06] Mes critiques en 2009

Messagepar Johtaro » Mer 02 Sep 2009, 12:40

Bon après quelques recherches, je me lance avec ce cinéma de genre...
Sergio Corbucci & Lucio Fulci apparemment sont des monstres, je vais voir ça !
Merci ! :super:
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Re: [Niko06] Mes critiques en 2009

Messagepar Scalp » Mer 02 Sep 2009, 13:27

Le western spaghetti reserve quelques petites pépites, comme niko l'a dit Django et Keoma sont indispensables, apres faut taper dans la filmo de Corbucci, Milian, Lee Van Cleef, par contre les westerns de Fulci sont pas top.
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Crime Story - 9,5/10

Messagepar Niko06 » Jeu 03 Sep 2009, 17:26

Crime Story
de Kirk Wong

Image

Jackie Chan a toujours à peu près suivi la même ligne de conduite dans ses films: pas de sexe, de l'humour, une violence modérée, peu de sang... les exceptions les plus notables de sa carrière son Island of Fire et ce Crime Story, deux films qu'il a d'ailleurs plus ou moins reniés par la suite... Et si le titre fait bien sur immédiatement penser à un ersatz de la série des Police Story, sommet de la carrière de Jackie qui laissait voir un vrai talent d'acteur en plus du cascadeur et dont le troisième volet était sorti l'année précédente, il n'en est rien. Ici pas de flic invincible, on est dans du réalisme à la Ringo Lam, le scénario est d'ailleurs tiré d'une histoire vraie dont l'enquête a été simplifiée. Et si le film a pu souffrir au cours de son exploitation de coupes et modifications du montages dues à Jackie, la version de Kirk Wong se pose non seulement comme un des meilleurs films de Jackie Chan mais surtout comme un des plus grands polars hard boiled produits à Hong Kong.

Kirk Wong on le connaît surtout pour Gunmen, variation chinoise imparfaite des Incorruptibles et film emblématique de l'âge d'or de la Film Workshop de Tsui Hark. C'est aussi le réalisateur du con mais fun The Big Hit avec Mark Wahlberg... c'est d'ailleurs malheureusement son dernier film derrière la caméra car depuis plus de dix ans il semble avoir disparu de la circulation... ce qui est bien dommage car il fait partie, et ce grâce à une poignée de films à peine, des plus grands maîtres du polar HK, en plus d'être un excellent acteur! Ce sont sans doute ses déboires habituels avec ses producteurs qui l'ont dégouté du milieu... en tout cas il manque aux amateurs de ce cinéma et il est clair que son absence fait cruellement défaut au genre.

Et dix ans avant le très bon New Police Story, on se trouve d'entrée de jeu face à un Jackie vulnérable. Sa première scène se passe chez un psy pour policiers, il a tué plusieurs malfrats et le vit assez mal, ce qui lui vaudra de trimballer pendant tout le film une mine déconfite, c'est un des rares films de sa filmographie dans lequel il n'esquisse qu'un sourire... Personnage dramatique qui se retrouve face à une violence qui le dépasse et à la dure réalité de son métier, prendre des risques immenses pour finalement pas grand chose. Il y a dans Crime Story un propos social évident mis en avant par le personnage de Kent Sheng, second rôle récurrent du cinéma HK qu'on a pu voir dans de nombreux films de catégorie III, qui trouve ici un grand rôle de bad guy, à la fois humain et complètement pourri. La confrontation entre les deux est excellente et confirme qu'il faut un "méchant" de taille pour mettre en valeur le héros.

Mais on retrouve également un message dans le personnage de l'entrepreneur kidnappé qui traîne à payer ses ouvriers ou dans son discours à propos de ce qui va se passer en 1997.
En fait on tient sans doute là la meilleure prestation de Jackie Chan en tant que véritable acteur! Moralement fragile, affecté par la situation (la mort d'un collègue en particulier), il est loin de l'image que ses précédent films ont façonné. D'ailleurs il n'est absolument pas drôle et même s'il assure des cascades assez démentes lors des combats, il s'en prend quand même plein la gueule pendant tout le film, se faisant tabasser bien comme il faut! Vulnérable psychologiquement et physiquement, c'est clair qu'on l'a rarement vu dans de telles postures... A tel point que pour une fois on en vient à douter de l'issue des évènements, ce qui rend toute cette histoire de kidnapping carrément crédible.

Le scénario à la base plutôt simple avec une trame classique de kidnapping puis traque des ravisseurs, prend donc une belle dimension grâce à des personnages torturés dans un contexte social difficile. La noirceur qui en découle est presque étonnante si on ne connaît pas le cinéma de Kirk Wong, spécialiste pour mettre en scène des films qui tourne autour des forces de police. Sans concessions il filme le côté glauque de Hong Kong avec ses bordels, tripots et autres lieux peu fréquentables ainsi que la facilité pour certains policiers de tomber dans le vice et le crime, de quoi dresser un beau portrait d'un agent véritablement intègre, qui fait son métier par passion. Selon les dires de Kirk Wong, le film est même devenu un modèle pour les flics de HK (il aurait vu un poster dans les locaux de la criminelle près de chez lui!)

Niveau mise en scène, là où il restait bizarrement sobre sur Gunmen, qui fonctionnait surtout sur un montage très serré, il livre le film modèle. Alternant les beaux plans à la grue comme seuls les réalisateurs de HK savent les faire avec des mouvements rapides et chaotiques sur les scènes d'action, il filme tout ça de façon plutôt énervée, recréant à merveille cette situation d'urgence nécessaire à l'intrigue. La longue scène dans le cargo restera dans les mémoires tant elle est efficace tant au niveau de la gestion d'espaces confinés que de la tension qui s'y ressent. Et puis Wong se lâche carrément dans un final remarquable, étouffant et dans lequel il va détruire tout un quartier dans des explosions gigantesques...
En bref, on est devant une grosse performance de Jackie Chan et de Kent Sheng, pour ce qui restera une de ces nombreuses grandes réussites que le polar HK nous a apporté dans les années 90. A voir et à revoir donc...


9.5/10
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Messagepar Scalp » Jeu 03 Sep 2009, 17:30

Faut que je le revois celui là, quand je l'ai découvert j'avais été un poil déçu par rapport à sa réputation.
Parait que le dernier Jackie de Derek Yee est tres bon avec un Jackie qui baise et tue, bon par contre casse couille le blu ray est zoné et le dvd zone 3.
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Re: [Niko06] Mes critiques en 2009

Messagepar Niko06 » Jeu 03 Sep 2009, 17:34

Syndrome des films dont on entend trop de bien... en principe ça passe la 2ème fois :wink:

Sinon ouais le Shinjiku incident ou quelque chose comme ça j'ai grave envie de le voir aussi... à mon avis on est bon pour attendre un blu-ray UK, en espérant pas de cut... mais voilà vu comment Derek Yee il donne de l'importance à l'image faudra carrément le voir en blu-ray!
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Re: [Niko06] Mes critiques en 2009

Messagepar jean-michel » Jeu 03 Sep 2009, 17:55

Scalp a écrit: Le western spaghetti reserve quelques petites pépites, comme niko l'a dit Django et Keoma sont indispensables, apres faut taper dans la filmo de Corbucci, Milian, Lee Van Cleef, par contre les westerns de Fulci sont pas top.


moi il y en a un que je conseil c'est " la vallée de la poudre" un western avec de l'humour d'excellente qualité avec glenn ford et shirley mc laine...
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Re: [Niko06] Mes critiques en 2009

Messagepar Scalp » Jeu 03 Sep 2009, 17:58

Sauf que vu le casting je pense pas que ce soit un western spaghetti :mrgreen:
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Re: [Niko06] Mes critiques en 2009

Messagepar jean-michel » Jeu 03 Sep 2009, 19:01

:eheh: non mais c'est pas grave! :mrgreen:
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3:10 to Yuma (2007) - 8/10

Messagepar Niko06 » Mer 09 Sep 2009, 12:29

3H10 pour Yuma
de James Mangold

Image

Le western au cinéma est mort il y a déjà longtemps, précisément en 1992 pour le western américain avec Impitoyable du grand Clint et bien plus tôt, en 1968 pour le western italien par l'ultime Il était une fois dans l'Ouest... deux chefs d'oeuvre à jamais inégalables qui ont scellé le destin d'un genre qui a pourtant fait vivre le cinéma pendant de longues années. Mais malgré ça, on voit de temps en temps ressurgir, le temps d'un film ou deux, cet univers magique fait de crasse, de poussière, d'alcool et de sang... le genre n'étant plus vraiment bankable, c'est toujours des réalisateurs intéressants qui s'y collent! Sam Raimi sur Mort ou Vif, Ed Harris sur Appaloosa, Takashi Miike avec Sukiyaki Western Django, Alex de la Iglesia avec 800 Balles, les frères Coen avec No COuntry for Old Men, Andrew Dominik avec l'assassinat de Jesse James... soit des purs westerns soit des variations passionnantes du genre. Et puis il y a l'inégal James Mangold qui décide de sortir un remake du classique 3h10 pour Yuma de Delmer Daves (1957)... fait rare, le remake est vraiment réussi!!!

Mangold s'est déjà frotté au western mais de façon détournée sur son excellentissime CopLand, cette fois il l'aborde de façon frontale en réadaptant la nouvelle d'Elmore Leonard et en développant certaines parties du film de Daves comme le voyage de la ferme de Evans jusqu'à Contention. S'il y a un gros problème dans ce film c'est qu'il est très (trop) classique... dans sa construction, dans sa mise en scène, donc loin de l'extravagance de Raimi mais sans pour autant atteindre la perfection d'Eastwood. C'est dommage car il y avait matière à faire un nouveau classique, il n'est que très bon. Le script, cinquante ans plus tard, reste d'une efficacité redoutable, certes rempli de clichés du genre mais qui fonctionnent toujours. Ainsi on n'évite pas les passages obligés: duels, attaque de diligence, attaque des apaches... mais si ça peut donner envie à de nouveaux spectateurs de découvrir le genre, c'est tant mieux!

Le film fonctionne à travers de nombreuses scènes d'actions très réussies, de superbes paysages... mais il serait juste moyen sans un casting formidable et des personnages à la psychologie complexe est très bien écrite. Ainsi leurs relations prennent une dimension qu'on ne soupçonnait pas, à tel point surprenante qu'à la première vision du film, certaines décisions nous paraissent carrément incohérentes! Mais quand on le revoit et qu'on se penche un peu plus dessus, tout s'éclaire. La relation entre Evans et son fils qui le regarde avec dédain prend tout son sens à la toute fin, c'est cette relation, mise en parallèle avec sa propre enfance, qui va motiver les choix de Ben Wade, choix qui peuvent paraître incohérents. Car Wade, à la différence d'Evans, connaît la sensation d'être admiré (par Charlie, une admiration et un respect qui sont même très proche de l'amour, l'homosexualité latente étant une figure récurrente du western tout comme de ses pendants asiatiques) alors qu'il ne sait rien de celle d'admirer.

Wade et Evans sont à la fois complètement opposés (l'un s'enferme dans sa faiblesse, l'autre a un ego démesuré) mais très proches (tous deux ont sans doute servi pour le Sud, mais l'un d'eux à choisi de devenir hors-la-loi pour continuer sa guerre contre les yankees). Wade, par sa prestance et son audace, devient rapidement un modèle pour le fils d'Evans... alors que lui n'a jamais pu admirer son père... Tout cela va entraîner le film vers une illustration d'une sorte de syndrome de Stockholm mais dans l'autre sens, car le dominant n'est pas celui qui devrait l'être. Bref c'est une idéologie plutôt intéressante qui est développée ici! Et bien sur sans acteurs de talent ça n'aurait jamais fonctionné!

Christian Bale assure comme toujours, et comme d'habitude c'est dans les rôles de personnages faibles qu'il est le meilleur, il est servi ici avec un looser borderline pris entre l'argent facile et une ligne de conduite qu'il cherche à dicter à son fils. En face de lui, un autre poids lourd, Russel Crowe, parfait en bad guy capable des pires atrocités mais très attirant par sa forme de raffinement et son intelligence. Un bon western mérite toujours un beau duel d'acteurs, on est servi. Au niveau des seconds rôles ça fait plaisir de retrouver Peter Fonda dans le rôle d'un Pinkerton, ordre de pourritures (à la base ils étaient les gardes du corps de Lincoln) perpétuant des massacres au nom d'une soit-disant justice... Et Ben Foster en Charlie, qui encore une fois nous gratifie d'une performance hallucinante. Son personnage est d'une classe folle mais c'est la figure parfaite du bandit à la gachette qui lui démange... son regard halluciné en fait presque le personnage le plus effrayant, après son maître Wade.

Et bien sur on retrouve autour d'eux toute une galerie de sales gueules indispensables à tout western qui se respecte.
Niveau mise en scène, comme je l'ai dit plus haut il n'y a rien d'extraordinaire, c'est simplement élégant et efficace, icônisant à mort le personnage de Charlie à chaque apparition contrairement aux autres qui sont traités avec plus de simplicité... le score de Marco Beltrami colle bien aux images même s'il est un peu en retrait, il se permet lors d'une scène un beau clin d'oeil à Morricone et prend enfin de l'ampleur lors du final.
On est là devant une réussite indéniable. Certes c'est un remake, ce n'est pas un modèle d'originalité... mais ça reste un bel hommage en plus d'être un excellent film, avec un scénario efficace, des personnages hauts en couleurs qui lui font prendre vie et un final bien couillu... Pas inoubliable, ni même le renouveau du genre, mais une belle pierre apportée à l'édifice de sa pseudo-renaissance et la confirmation que James Mangold reste capable de grandes choses.


8/10
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Prophète (Un) - 9/10

Messagepar Niko06 » Mer 09 Sep 2009, 12:33

Un Prophète
de Jacques Audiard

Image

Le 16 mai 2009, trois jours après le début de la compétition la presse unanime acclame ce film en lui décernant un peu prématurément sa palme d'or... la suite on a connaît, la palme revient à Haneke et Audiard repart avec "l'autre palme", le grand prix, un peu comme cela était arrivé à OldBoy quelques années plus tôt. Des critiques aussi emballés et tombant dans un flot de compliments à propos d'un film français, cela m'a fait douter de leur sincérité... la propension au chauvinisme de mes compatriotes n'étant plus à démontrer. Comme j'ai eu tord d'émettre des doutes sur ce film... je ne connais pas le cinéma d'Audiard, ceci explique peut-être cela. Toujours est-il qu'Un Prophète, après Les Etreintes Brisées, Antichrist et Inglourious Basterds, confirme que le festival était d'un très haut niveau cette année. Et je découvre là un immense réalisateur qui vient de créer un diamant noir de cinéma.

Déjà il s'attaque au film de prison, genre peu fréquenté chez nous, et dont chaque tentative se voit comparée à ce qui restera à jamais le maître étalon, la série Oz. Et Audiard peut être fier, il n'a pas à rougir de la comparaison, l'univers carcéral qu'il dépeint est noir, réaliste, pue la violence, la corruption, le sexe et le racisme. Mais son modèle plus ou moins inconscient c'est Don Siegel et le cinéma des années 70 en général pour un portrait de l'ascension d'un caïd... Sauf qu'en partant d'un scénario de Abdel Raouf Dafri (scénariste du diptyque Mesrine) largement re-écrit, Audiard et Bidegain ne font pas qu'utiliser des figures de style classiques du genre, ils explorent une nouvelle idée en révolutionnant complètement l'éducation d'un gangster. Car Un Prophète c'est ça, de l'inédit, chez nous comme ailleurs!

Le but est de se démarquer de l'image de Tony Montana, qui colle à toutes les tentatives depuis Scarface. Pour cela, il fallait un personnage nouveau, c'est Malik... petite frappe qui s'est pris 6 ans fermes pour violence contre un flic. Il est jeune, il est arabe, et surtout il ne porte pas sur son visage la moindre trace d'une tragédie, il n'a pas d'histoire, son histoire commence en prison. C'est là toute la différence... il n'a pas d'ambition, les gangsters à tendance mafieuse avec leurs signes extérieurs de richesse le répugnent complètement, il est solitaire... Entré en prison sans le moindre avenir ou sans même en chercher un, la violence qui va l'entourer va peu à peu lui faire prendre conscience de ses capacités insoupçonnées, il est très intelligent.

L'intelligence d'Audiard est d'avoir pris la figure classique de l'arabe, toujours utilisée soit comme propos social chiant dans des films qui se veulent le reflet d'une réalité ridicule soit comme ressort comique dans des comédies non moins ridicules dont notre public est si friand... Sauf qu'ici, il en fait son héros, un héros comme on n'en a jamais vu, qui ne va pas se construire par la violence mais va utiliser celle des autres, et surtout un héros au regard d'enfant qui ne connaît rien de la vie à l'extérieur! Le propos social n'est pas oublié avec bien entendu une description minutieuse de la prison centrale de Paris, la quasi-impossibilité de réinsertion suite à un long séjour car au sein même de la prison une forme de société hiérarchisée existe et que lorsqu'elle représente le seul modèle connu, l'extérieur sera calqué sur ce modèle.

Réussir par la culture et l'instruction, c'est aussi ça le propos d'Un Prophète, sauf que ce n'est pas réussir au sens politiquement correct puisqu'il s'agit de devenir un caïd. D'ailleurs le titre plutôt énigmatique prend de plus en plus de sens au fur et à mesure que se déroule le film, Malik est un gangster d'un genre nouveau, assez malin pour ne pas sombrer dans le cliché du gros bras bagarreur, et qui utilise toutes les communautés présentes autour de lui pour monter son entreprise criminelle... Dans le politiquement incorrect on peut citer également le constat irréfutable de l'importance grandissante de l'islam en prison ou les tendances mafieuses des corses (image qui a d'ailleurs fait débat), mais ce n'est qu'une fiction...

Pour une nouvelle figure du genre, nouvel acteur, le jeune Tahar Rahim impressionne vraiment avec son visage angélique qui cache un cerveau en permanente ébullition. Il souffre beaucoup, fait le larbin, met de côté son honneur... jouer le faible pour ressortir comme le plus fort. En face de lui Niels Arestrup est tout aussi grandiose en parrain corse qui voit le monde qu'il s'est crée et qu'il domine partir en lambeau devant ses yeux impuissants. A ce propos et comme souvent, certains acteurs abusent un peu sur l'accent corse en le ridiculisant légèrement... de quoi en faire tiquer quelques uns. Tous les seconds rôles, pour la plupart des inconnus, ont vraiment la gueule de l'emploi, des sales gueules de taulards et de voyous... et ne font qu'élever un peu plus la présence de Tahar Rahim dont la performance est juste hallucinante il faut le répéter!

Pour illustrer son propos Audiard livre une mise en scène juste parfaite. Alternant de légers mouvements avec quelques effets de style bien placés (sa façon de faire baisser la lumière en passant la main devant la caméra c'est vraiment très beau), il nous fait ressentir ce que Malik ressent en resserrant le champ visuel après s'être fait tabasser ou en assourdissant le son après une fusillade... l'effet est efficace! D'ailleurs la fusillade en question, tout comme les quelques scènes "d'action" sont hyper immersives avec un cadre resserré au maximum, toujours dans des espaces limités. Et comme pour libérer un peu son héros, il ponctue le récit de scènes oniriques sous forme de métaphore de son sentiment de culpabilité
Voilà, il n'est pas toujours nécessaire d'amener une amélioration technologique pour révolutionner son art, il suffit souvent d'avoir la bonne idée au bon moment. Avec Un Prophète Audiard frappe très fort avec un film de genre, mais d'un genre nouveau, un long film pour illustrer un destin hors du commun. Et il fait d'un petit voyou, arabe de surcroît, une véritable icône du crime... franchement c'est très très fort et c'est un des meilleurs films français depuis longtemps!


9/10
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Re: [Niko06] Mes critiques en 2009

Messagepar kenshiro » Mer 09 Sep 2009, 12:34

un prophète :super:
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New York 1997 - 9,5/10

Messagepar Niko06 » Mer 09 Sep 2009, 12:38

New York 1997
de John Carpenter

Image

Pour son cinquième film, Big John frappait un très grand coup. Après avoir inventé le slasher avec Halloween, après avoir fait son Rio Bravo avec Assaut, après The Fog... il est déjà considéré comme le maître de l'horreur et du fantastique. En fait il était (on pourrait presque ne pas parler au passé...) le maître incontesté de la série B, un nom inventé par dédain envers un cinéma de "seconde zone" qui a paradoxalement offert au cinéma plus de films cultes que les films de série A... Quoi qu'il en soit, avec New York 1997, Carpenter signe une pièce angulaire de son oeuvre et un film qui restera une source inépuisable pour tous les pilleurs du cinéma jusqu'à aujourd'hui! Avec ce film d'anticipation, largement réfuté depuis mais qui contient tout de même des éléments qui sont proches de notre réalité contemporaine, Big John signe un mélange de genres assez extraordinaire qui a certes un peu vieilli mais qui possède une liberté de ton et une représentation de l'anti-héros fabuleux, ce qui en fait définitivement une oeuvre essentielle.

Car en restant objectif, ce n'est pas du côté du scénario qu'on tient quelque chose de grandiose... au contraire la trame des plus classiques ne contient rien de bien excitant. D'ailleurs l'amateur de SF qui s'attend à un pur film d'anticipation sera forcément déçu! Car ce film aux multiples influences en tient une principale, le western, genre que vénère Carpenter et qui se retrouvera dans plusieurs de ses films. Ici l'intrigue lorgne du côté de John Ford, et de la Prisonnière du Désert en particulier avec un héros lâché en plein milieu hostile pour une mission de sauvetage. Donc simplement en le prenant au premier degré on passe déjà un bon moment, grâce à une intrigue efficace et linéaire, des personnages attachants, des scènes d'action justement dosées... le tout dans un univers intéressant car crédible malgré le manque de moyens évident.

Avec sa côte de popularité au plus haut, Carpenter a pu bénéficier d'un casting en or massif! Kurt Russell bien sur qui trouve là son meilleur rôle (avec celui de Jack Burton), mais également l'immense Harry Dean Stanton, le non moins mythique Lee Van Cleef dont ce fut le dernier grand rôle, Donal Pleasence, Ernest Borgnine et l'étonnant Isaac Hayes... Ça en jette quand même pas mal!!! Tous sont parfaits c'est un fait mais il faut avouer qu'ils évoluent dans l'ombre de Kurt Russell. Il est Plissken, mais appelez-le Snake, l'anti-héros cool, stylé, anarchiste et nihiliste par excellence. Le type qui se fout royalement du monde qui l'entoure (ne parlons même pas du sort du président des USA!) et qui se retrouve ici érigé en icône indéboulonnable, version moderne du cowboy solitaire et individualiste mais qui bénéficie d'un charisme incroyable!

Ce genre de figure mythique se retrouve souvent chez Carpenter non seulement car il adore le western mais surtout pour une raison moins évidente. Ses personnages qui refusent d'obéir aux diktats de la société sont en fait une transposition fictionnelle du réalisateur lui-même, qui n'a eu de cesse de lutter contre la dictature des studios qui lui auront toujours posé des problèmes sauf sur le monumental The Thing. Ainsi dans New York 1997, on peut dire qu'on tient l'apothéose du symbole d'insoumission si cher à Big John. Et il aura réussi son coup car Plissken est devenu un personnage culte pour de nombreux cinéphiles bisseux (ou pas d'ailleurs), un symbole de la coolitude alors que c'est quand même un des types les plus égoïstes... quelle ironie!

Véritable déclaration d'amour aux personnages marginaux et à la liberté, New York 1997 résiste parfaitement à l'épreuve du temps, et en dehors d'une direction artistique datée, tout tient la route. Des punch lines incroyables et un gimmick légendaire ("je te croyais mort, Snake" viennent explorer un autre thème passionnant, la confrontation de la légende et du réel. Avant leur apparition, chaque personnage est précédé d'une légende, pour les autres personnages et pour le spectateur. La réalité déçoit forcément mais illustre de fort belle manière un concept qu'a puisé Carpenter chez Ford, dans l'Homme qui tua Liberty Valance, à savoir que "quand la légende devient la réalité, imprimer la légende".

Ainsi, comme pour donner un sens à la légende qui le précède, Snake nous livre une scène finale à la hauteur du mythe.
Carpenter livre comme toujours un film à la technique irréprochable, tourné dans un scope magnifique, avec de beaux mouvements de caméra dans des travellings bien sentis et qui met superbement en valeur la photographie majoritairement de nuit de Dean Cundey. Dans les autres éléments nécessaires au culte, la musique hypnotique composée par John Carpenter est excellente, avec une mention pour le thème du générique, tout simplement génial.
Bientôt trente ans plus tard, New York 1997 reste une référence. Certes si on le découvre aujourd'hui on n'y verra que peu d'originalité car la plupart des idées ont depuis été réutilisées ailleurs mais le mythe est bien là et il continue d'être alimenté. Et il faut savoir que le personnage de Plissken se trouve à la croisée des médium... largement inspiré par Nick Fury de chez Marvel, il fera plus qu'influencer Hideo Kojima pour la saga Metal Gear Solid et son personnage central Solid Snake... C'est ce qu'on appelle une légende, et ce n'est qu'une série B...


9.5/10
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Sex Addict - 7/10

Messagepar Niko06 » Mer 09 Sep 2009, 12:49

Sex Addict
de Frank Henenlotter

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16 ans d'absence... ça fait beaucoup pour un réalisateur. Véritable pape du cinéma underground new-yorkais des années 80, on doit à Henenlotter trois films cultes: Basket Case, Elmer le remue-meninge et Frankenhooker, trois films tordus, choquant le puritanisme à chaque coin de la pellicule, des films trash, gores, et très sexués. En donnant deux suites ineptes à Basket Case, il tue sa carrière et ne survivra pas à la fin des années 80. Et comme par miracle le voilà qui nous revient par surprise! Son film est sélectionné dans la majorité des festivals, misant sur son nom et son passé. A l'évidence il n'a rien perdu de sa verve, il signe un film complètement "autre", tragique, trash, érotique et très drôle qui prouve qu'il est toujours le même sale gosse qui s'amusait à choquer le bourgeois il y a vingt ans, sauf que le cinéma a évolué depuis et que du coup, Bad Biology (titre bien plus parlant que sa traduction racoleuse) a tout du film hors du temps et d'un côté, c'est tant mieux!

Le principe de départ n'est pas sans rappeler le mythe du Vagina Dentana, métaphore vieille comme le monde de la femme castratrice (et d'ailleurs vu au cinéma dans Teeth) sauf qu'il est ici détourné puisque Jennifer ne possède pas de dents à l'intérieur de son vagin mais sept clitoris... Batz de son côté est assez embêté avec son pénis mutant gigantesque, dopé aux stéroïdes, et qui possède sa propre conscience... Voilà le monde de Frank Henenlotter!! L'occasion de pondre un nouveau truc sexuellement incorrect et de reprendre de vieux thèmes qu'il avait laissé au placard depuis les années 80, avec en tête toutes les formes d'addiction.

Bon, là on est carrément devant un film déjanté! Déjà elle, outre son anatomie plutôt extraordinaire, est une nymphomane insatiable, qui lors de ses multiples orgasmes (et oui, 7 clitoris!) prend en photo ses amants (d'ailleurs les clichés sont magnifiques et bien glauques), et parfois les tue d'une façon relativement violente... De plus elle tombe enceinte à chaque fois d'un bébé qui nait au bout de deux heures et dont elle se débarrasse comme d'un kleenex usagé. Lui gave son sexe de médicaments en tout genre, lui fait des injections, a banni toute activité sexuelle de sa vie, mate quatre films pornos en même temps et s'est construit une sorte de machine de torture, seule solution pour qu'il puisse se masturber... franchement il faut le voir pour le croire! On a droit à de nombreux tête à tête avec Jennifer qui s'adresse directement au spectateur et qui nous fait partager ses pensées, voix off à l'appui.

On est clairement dans du cinéma underground comme on n'en fait plus, et dans le haut du panier de celui-ci car visuellement ce n'est pas de la DV crade, on a une vraie lumière, une vraie mise en scène... bref rien à voir avec du cinéma quasi-amateur cradingue. Les deux acteurs, physiquement en décalage complet avec leur personnage, car très beaux, sont excellents. On ne peut pas en dire autant des seconds rôles sous-exploités, qui n'ont rien à dire et qui ne font jamais avancer l'intrigue. Cela accentue le côté un peu bancal du film et qui souligne que si Henenlotter a toujours des choses à dire pour choquer les bien-pensants, il maitrise moins la façon de le dire...

Mais quoi qu'il en soit on a là un film bien barré, qui comporte son lot de scènes cultes avec des plans subjectifs du vagin et du pénis, un shoot photo avec des mannequins qui portent un masque représentant un sexe féminin, des accouchements dans des lieux incongrus et puis bien sur la rencontre entre ces deux freaks qui est encore plus explosive qu'on en pouvait l'imaginer!
Mais au-delà de l'humour franchement drôle et souvent proche du mauvais goût, au-delà d'un refus de la morale qui éclate à l'écran, on a une vraie réflexion sur la différence physique au sein de notre société moderne et son acceptation qui n'a jamais vraiment évolué...
Pas un grand film mais un vrai plaisir coupable, plutôt bien foutu d'ailleurs, la dernière oeuvre d'un inconscient en croisade contre le politiquement correct et qui se fait plaisir, une toute dernière fois.


7/10
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Be with Me - 8,5/10

Messagepar Niko06 » Mer 09 Sep 2009, 12:56

Be with Me
d'Eric Khoo

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Petit film tourné pour à peu près 100000€, Be with Me s'inscrit dans la tendance émergente de faire découvrir au monde un "autre" cinéma asiatique loin de Hong Kong, de la Thaïlande et de Bollywood. Ce film vient de Singapour, une des cités-états les plus intéressants de la planète, qui devient peu à peu le centre économique de l'Asie, et qui déjà dans les années 50-60, lorsqu'elle faisait encore partie de la Malaisie, était un foyer de production cinématographique important. Depuis quelques années, une poignée d'auteurs dont le présent Eric Khoo tentent de redynamiser l'industrie locale avec des films qui font souvent le tour des festivals du monde entier. Et preuve que ce cinéma possède sa propre identité, Be with Me ne souffre d'aucune influence extérieure et porte la marque d'un véritable auteur/réalisateur qui a des choses à dire sur son pays et sur le monde qui l'entoure. C'est un cinéma exigeant, qui peut rebuter, mais qui, si on se laisse happer, propose de très belles choses.

Dans sa construction ce film risque de laisser plus d'un spectateur sur la touche. En effet, on suit plusieurs histoires en même temps sans vraiment y voir de point commun, et ce jusqu'à la toute fin. De plus sur le plan formel l'utilisation de la HD déroute au premier abord avec une image tellement naturelle que c'est choquant, malgré une photo magnifique. Par la suite l'oeil s'habitue et on n'y fait même plus attention mais au départ la sensation est étrange. Et il y a également le fait que la première ligne de dialogue est prononcée au bout de dix minutes... et c'est une des rares, le film fonctionnant sur le principe d'un film muet, les émotions étant véhiculées simplement par les images. On n'est donc pas vraiment devant le film facile d'accès pour le spectateur lambda...

C'est un film qui parle d'amour avant tout, à plusieurs étapes de la vie: l'adolescence, l'âge adulte et la vieillesse. Et encore plus précisément du désir et du besoin d'être avec l'autre, le titre est sur ce point plus qu'évocateur. On y suit donc des personnages dont on ne connaîtra le nom qu'au générique de fin et qui vont souffrir chacun à leur manière de cette absence. Une absence due soit à une séparation lors d'un chagrin d'amour de jeunesse, une absence que l'on se crée en n'osant pas se déclarer à celle que l'on aime en secret ou encore, sans doute la pire, l'absence crée par le décès de celle qu'on a aimé toute une vie... Vu comme ça on pourrait croire à un film dépressif mais ce n'est pas le cas car tout le moteur du récit, sur lequel a été basée l'écriture, est l'espoir.

Et cet espoir il est incarné par un personnage à priori en marge des autres récits, celui de Theresa Chan. Dans Be with Me, elle joue son propre rôle, nous parle de sa vie à elle (dont certains passages nous sont racontés au travers des sous-titres. Devenue sourde puis aveugle dans sa jeunesse, elle a passé sa vie à se battre pour elle et pour les autres. Ce petit bout de femme aujourd'hui âgée de 65 ans, déborde d'énergie, de générosité et de gentillesse alors que son double handicap l'a toujours condamnée à la solitude. C'est elle qui a été l'inspiration principale du film, elle qui a poussé Eric Khoo à ne pas abandonner ce projet... elle représente l'espoir à elle seule, avec son destin hors du commun.

Car c'est aussi là le thème du film, le destin, ou comment ces quatre histoires qui n'ont rien en commun vont interagir pour se faire rencontrer, d'une façon tragique et heureuse, ceux qui souffraient de leur solitude. Cela rejoint bien sur le thème de l'espoir, les deux sont intimement liés. Ce qui fait que le film, avec sa galerie de personnages tantôt heureux tantôt anéantis, attachants ou pathétiques, ne tombe jamais dans le pathos facile. Au contraire, intelligemment il se crée une dynamique de la mélancolie, on se retrouve un peu dans chacun et dans leur drame personnel, c'est là que Be with Me réussit à nous toucher au plus profond.

Bien entendu, tout cela ne pouvait fonctionner que si la mise en scène ne venait rien gâcher. Khoo a construit son film en plans fixes d'une beauté toute simple mais qui marque. Il laisse ses personnages évoluer, réussit à saisir l'émotion de l'instant... c'est vraiment très beau. On en ressort avec un sentiment bizarre, un mélange de joie car le film nous donne de l'espoir mais une certaine tristesse également car l'amour qui n'est pas partagé est un des sentiments les plus difficiles à vivre.
Belle découverte que ce Be with Me dont la simplicité apparente ne cache pas une profondeur réelle dans sa réflexion. C'est un film intelligent, émouvant, certes un peu austère mais très humain et lucide et qui nous touche si on accepte certains parti-pris esthétiques et narratifs qui remplacent les dialogues par du texte (lettre, sms...).


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