Le Cercle Rouge Jean Pierre Melville - 1970
"Pour une fois le gibier est intelligent"
Dernier film de Melville (oui Un Flic n'existe pas). Melville signe ici le polar définitif à la française (et je parle de vrai polar, pas de merde à la Chabrol, du vrai film noir qui bats les meilleurs ricains), un Heat avant l'heure, un film qui s'intéresse aussi bien aux flics qu'aux truand, un caper movie culte. On est pas source d'inspiration de Woo, To, Lam et Mann par hasard (liste assez classe quand même, c'est autre chose que Refn ou Ritchie), le cinéma de Melville lui s'inspirait de Huston entre autre et on pense forcément à Asphalt Jungle.
Mis à part l'évasion du train qui m'a paru un poil abusé ( mais qui colle finalement bien avec la personnalité de GMV ) tout le reste du film frôle la perfection et même si Melville s'est toujours défendu de faire du cinéma réaliste, son approche méthodique et son soucis du détail tendent vers un cinéma réaliste ou du moins en apparence (car bon le casse est un peu nawak, le coup du super tireur c'est clairement du cinéma mais c'est la façon de mettre ça en scène qui rend le tout réaliste).
Un casting 4 étoiles ou il n'y a pas vraiment de personnages principal mais où chaque personnage est vraiment approfondit par leur faits et geste d'un coté les 3 qui prépare leur coup et de l'autre Bourvil qui cherche son prisonnier.
En fait à part Montand aucun perso n'est véritablement attachant (le perso de Montand acceptant le casse plus pour lui donner une raison de vivre que pour gagner de l'argent), ils sont tous très froid ( un coté stoïque en toute circonstance ) mais on est quand même triste pour eux à la fin, car c'est ça le talent de Melville pouvoir caractérisé des personnages, leur donner un style, une allure, un truc qu'il fait qu'immédiatement ils sont reconnaissable dans la masse. La stylisation a toujours eu une place primordial dans le ciné de Melville, et c'est que les cinéastes HK auront retenu de son cinéma surtout, on pourrait dire qu'il se sont inspiré de la forme alors que Mann s'est inspiré du fond, j'en viens même à me dire que le spleen cher à Mann pourrait ptet découler des longues scènes silencieuse de Melville. Chez Melville les personnages sont tous plus ou moins solitaire (comme le cinéaste d'ailleurs), ce qui le rapproche encore de Mann. Ici il n'y a pas de place pour les femmes (d'ailleurs aucune n'a de rôle parlant dans le film).
Comme tout Melville qui se respecte c'est super épuré à part Bourvil, les autres acteurs ont vraiment peu de dialogues, ça digresse jamais ça parle pas pour rien dire, par contre ça laisse les personnages exister dans le cadre ( voir cet incroyable scène du casse qui dure pratiquement 30 minutes et sans aucun dialogue ( comme dans un flic mais en maitrisé ) et sans musique, la tension est a son maximum, on pense à du Rififi de Dassin et on pense aussi au Thief de Mann des films où la méticulosité professionnelle des truands est elle aussi mise en avant. Ici les psychologie des personnages se dévoilent dans l'action et dans leurs faits. Et chez Melville les personnages sont souvent juste fonction, ils n'ont pas de vie privée, on s'en fout de leur vie privée d'ailleurs.
"Le crime vit à l'intérieur de tous"
Sur une intrigue type de polar qui pourrait durer 1h30 (d'ailleurs Melville disait que c'est pas l'histoire qui importe mais plus le traitement de l'histoire et il aurait aimé adapte un mauvais bouquin pour montrer qu'il avait raison ^^), Melville une fois de plus transcende le genre et livre un putain de grand film où ça dure 2h10 mais où on ne s'ennuie pas une seule seconde. D'ailleurs c'est marrant de se dire que le film dure aussi longtemps alors que c'est pas du cinéma bavard. Melville étant clairement un cinéaste de l'image et pas du dialogue (après c'est pas un défaut les dialogues, faut juste savoir écrire), ici un plan en dira à chaque plus qu'une ligne de dialogue : le meilleur exemple étant le face à face Delon/Volonté, ils se rencontrent, échangent 3 lignes de dialogues et décident de faire route ensemble et à partir de là on sait que l'un et l'autre ne se trahiront pas. Par contre ça s'arrête juste à ce code de l'honneur, ici il n'y a pas d'humanisme, si on ne se trahit pas et on se respecte ça va pas plus loin, on n'ira venger personne, l'humanisme c'est plus un truc qu'on retrouve chez Giovanni.
On reste fasciner par le choix des cadres de Melville toujours très classe : la scène du billard filmé en plan aérien c'est le plan le plus classe du film, classe étant la marque de fabrique de Melville. Melville aurait aimé être un cinéma des grands espaces mais il avait pas ça à sa disposition en France donc il s'est adapté (il remplace ainsi les prairies entendu de l'ouest par un champs très français). Par contre je comprend pas trop son choix de format et pourquoi il a pas opté pour un scope.
Le montage n'est pas en reste et certains enchainement de plan sont géniaux. Et la photo du film renforce vraiment ce coté de fatalité, on ne voit jamais le soleil, c'est gris et sombre.
Delon n'est jamais aussi bon que quand il joue des gars froid limite antipathique, a cette époque c'est encore un vrai acteur et pas "Alain Delon, il reprend un peu ici son personnage du samourai, il a pas besoin de jouer c'est ptet pour ça qu'il est aussi bon, il a juste à se déplacer avec son coté fauve toujours aux aguets et il garde la classe même avec sa moustache, la marque des grands. Et pour la première fois de sa carrière on commence à sentir le poids de l'âge et une certaine lassitude pour son personange. Son duo avec Gian Maria Volonté marche a merveille, leur première rencontre est une sacrée scène qui fait très western avec un super travelling et un choix des plans si évident, ils parleront peu, à quoi bon, quand on est un grand cinéaste, les dialogues sont souvent superflues.
GMV est lui aussi parfait en type brutal (mais avec un code de l'honneur), ça fait drôle de le voir doublé en français par contre, mais ça passe. Sa prestance compense largement.
Yves Montand que l'on découvre après seulement 1h de film (ce qui reste culotté) a droit a une première scène surréaliste avec ces/ses habitants du placard ( génial cette scène complétement glauque et surréaliste et j'aime bien quand il parle de ça à Delon ).
Quand à Bourvil alors mourant ( pour son dernier rôle où il est d'ailleurs nommé André Bourvil au générique ) il est tout simplement génial dans ce rôle de flic solitaire très malin qui aime bien les chats, et ça fait chier de voir qu'il a pas eu d'autres rôles comme ça surtout que là il bouffe l'écran et que c'est de loin son meilleur rôle ( c'est autre chose quand même que ce sois disant monument du ciné francais avec l'autre pas drôle de De Funes quand même ).
Dans les seconds rôle on retrouve notamment François Perier dont les dialogues avec Bourvil sont excellent.
Fan de jazz oblige, Melville nous en colle dès qu'il peut, et bon c'est toujours plus agréable que du Williams (alors ça c'est complétement gratuit).
Un film bilan de l'oeuvre de Melville, sec et froid, où on y retrouve tout ce qu'il a déjà fait avant : un truand qui se venge du milieu, une traque, des indics, du double jeu, des trahisons. Un vrai film noir remplit d'ambiguïté sans gentils ni méchants, juste des hommes cherchant à survivre.
"Quand des hommes même s'ils s'ignorent, doivent se retrouver un jour, tout peut arriver à chacun d'entre eux, et ils peuvent suivre des chemins divergents. Au jour dit inexorablement, ils seront réunis dans le cercle rouge."
Par contre attention le résumé dispo sur le dvd de studio canal raconte la fin du film
10/10
Pour finir un ptit avis de John Woo
"Le Cercle Rouge is visually arresting and powerful in its silence. There is not much dialogue and the silence creates a more dramatic cinematic language as it draws more attention to the story and the great moments of the actors’ performance. By creating a cool, calm atmosphere with immaculate camerawork and precise editing rhythms, his style and message move with his actors as they deliver their soulful performances.
Melville’s themes embody the spirit of honor, loyalty, and tragic destiny among characters played by fate. These classic themes are also found in ancient Chinese and Japanese philosophies and cultures. I believe in this kind of romanticism. These valuable lessons of spiritual morality draw me into his movies and make me feel like we are in the same world. The romantic values of friendship and brotherhood expressed in this movie are almost impossible to find today. They are another reason why Le Cercle Rouge became a classic gangster film.
There is no mistaking that Le Cercle Rouge is a Jean-Pierre Melville movie, as all of the elements synchronize to his vision. Melville was the coolest, most stylish auteur of his time. I've long admired him for his spirit and his movies. He's had a great influence on my work. John Woo, December 2002"