TwilightLe film débute sous des airs de l'excellent « Génération Perdue » (1987), le film de vampires culte de Joel Schumacher, ce qui présage que du bon, mais rien de vraiment nouveau, juste une réactualisation dans les années 2000 du film de vampires teenagers comme ce fut déjà le cas avec Buffy dans les années 90.
Mais on ressent vite de la part de l’auteur et de la réalisatrice (respectivement Stephenie Meyer et Catherine Hardwicke), une tout autre volonté que celle de créer une histoire cool et effrayante de vampires lycéens. Le film, par son ambiance très travaillée (musique au piano envoûtante de Carter Burwell, climat humide et brumeux, maquillages livides, décors de clairières et de sous bois teintés d’irréalité, jeu d’acteurs retenu, mise en scène lente et mystérieuse, et photographie blême et vaporeuse), nous plonge dans une bourgade qui semble appartenir à un autre monde, un monde propice au mystère et à la romance plus qu’au slasher movie. Car évidemment, le vampire n’est pas ici le sujet du film et on en apprend très peu sur leur origine et leurs propriétés.
Le sujet central du film, c’est cette histoire d’amour incompréhensible entre Bella (Kristen Stewart, déjà vue dans Zathura, Into The Wild et Jumper) et Edward le bel immortel. Le fantastique du film n’est alors qu’un prétexte à une intéressante et inédite réflexion sur la nature de l’amour. D’après le personnage d’Edward, le vampire est une machine construite pour attirer ses proies, un prédateur parfait en qui tout (odeur, apparence, voix,…) a été conçu pour attirer Bella à lui. L’amour n’est-il donc qu’une illusion envoyée au cerveau, motivée que par une nécessité biologique, que ce soit celle de la reproduction ou de la subsistance alimentaire ? Ceci explique l’attirance inexplicable de Bella et de toutes les femmes pour Edward, mais voilà, cela n’explique pas pourquoi Edward tombe lui aussi, éperdument amoureux de Bella, au point que la survie de Bella devienne plus cruciale à ses yeux que sa mort. Lutant contre un instinct qui le pousse à dévorer celle qu’il aime, son amour pour Bella n’a rien d’explicable car il n’est plus motivé par aucune raison biologique et semble devoir demeurer platonique. Est-ce là que l’amour devient la réunion spirituelle de deux âmes, lorsque le spirituel prend le pas sur l’amour biologique et physique ? Le film pose le constat de manière très troublante.
Bien loin du film cool pour teenagers, on obtient au final une œuvre qui, au moyen du fantastique, une rupture de l’état naturel des choses, parvient à réfléchir sur la plus ambiguë des émotions humaines, et ne se contente pas d’en faire une jolie histoire simplette pour jeunes filles. Le parti pris de se concentrer uniquement sur cet aspect réussit au film et l’esthétique générale du film, manipulée pour nous faire ressentir de toutes part le paradoxe amoureux qui s’opère, en fait une œuvre fascinante sur la fascination amoureuse, inexplicable et pourtant si puissante.
Note : 8,5/10