Vincent Francois Paul et les autres de Claude Sautet 1974
Le logiciel de la cinquantaine déploie allégrement ses angoisses sur cette bande de copains unis autour d’un gigot dominical à risques devant certains reproches à peine déguisés. Quelques allusions malsaines sur des envolées de jeunesses non exploités dans le temps jettent un froid heureusement temporaire.
Le temps a passé, certains couples à bout de souffle périclitent, d’autres se renforcent, l’argent manque, le monde se transforme. La connection aux projets devient de plus en plus ardue, compliquée, coûteuse. Prospérité et déconfiture se divertissent des humains, l’un va bien, l’autre pas.
Les femmes accusent certains maris distants, protégés, lâches au contact de la déveine de compagnons de toujours. L’adhésion générale se glane uniquement dans la convivialité du jeu improvisé en pleine nature ou de la farce de collégien, ça vole bas mais le courant passe, par contre si l’un des composants exprime timidement ses ennuis financiers, la collectivité déstabilisée se protège en adoptant la politique de l’autruche.
« Les Dettes quand ça arrivent c’est le désert ».
La vie continue avec ses remises en questions, ses optimismes surgonflés afin de conserver son aura sur les autres. Les femmes lassées s’en vont, la solitude extrêmement redoutée draine sur le terrain toutes les combinatoires pour l’éviter. Soudain tout devient flou et l’on s’effondre.
« Tu n’à plus vingt ans, nous n’avons plus vingt ans »
Dans ces conditions il faut regarder transpirer la génération montante sur un ring, l’encourager dans un dynamisme serein, maîtrisé. Ces quelques lucidités n’empêchent pas quelques gamineries forestières basculant dans la joie et l’insouciance quelques corps dans la marre.
La « cuisine « Claude Sautet est ici à son pic avec ses ingrédients de base, des numéros de séductions en trompe l’œil montrant maladroitement à l’autre que l’on existe, la femme se révolte, claque la porte en accusant l’homme de ne penser qu’a lui.
Reproches et encouragements sont distillés dans des endroits conviviaux, bruyants. Chacun montre à l’autre une force de composition, un comportement théâtral basé sur le verbe haut et l’abus du geste. Tout le monde fait semblant de faire semblant.
Un groupe dompte ses amertumes dans le bruit, la cigarette et la bière. Des endroits enfumés de décompression permettant de souffler quelques instants en confiant ses désarrois à une faune plus polie qu’intéressée. On se livre pour rien mais ça soulage.
Claude Sautet filme adroitement l'indifférence, le paradoxe d’un égoïsme indélébile ayant besoin de temps en temps de se tisser temporairement dans un groupe battant à l’unisson. Un potentiel virtuel d'amour à offrir. La conclusion reste encourageante, le groupe malgré ses différences reste soudé.
9/10 Frole le 10 sur 10 sans l'atteindre suite à certaines scènes trop jouées au lieu d'être ressentient comme souvent dans le cinéma de Claude Sautet.
Le zéro bipolaire. Le néant infini et son absolu infini. Une forme pleine dans une valeur nulle.