Hellboy II The Golden Army de Guillermo del Toro
Le mix improbable entre la poésie du Labyrinthe de Pan et son bestiaire et la fureur d'un Blade II peuvent ils être mixés par leur créateur, le bouillonnant Guillermo del Toro ? La réponse est dans la question, c'est oui, définitivement oui !
Hellboy constitue un peu la pierre angulaire de l'oeuvre de del Toro, son rêve de toujours, adapter l'oeuvre de Mignola sur grand écran et le compromis que l'on peut se faire de ce bonhomme, tantôt inspiré dans son cinéma européen (Pan et el espinazo del diablo sont ses oeuvres les plus personnelles et les plus réussies) et tantôt efficace dans son approche du blockbuster (Blade II, un modèle du blockbuster comics pour adultes et de film d'action).
Le premier opus se contentait d'exposer brillamment le personnage incarné par un Ron Perlman tout en grâce et en punchlines efficaces trouvant si ce n'est son meilleur rôle, au moins celui de son personnage le plus charismatique.
L'habile mélange de couleurs (emblématiques chez Mignola qui n'utilise le rouge que pour son "Red" boy) et de scènes d'actions mélangeant cinématiques et monstres de baudruche offrait au spectateur un divertissement de haute volée mal perçu par un public plus avide d'œuvres un poil plus commerciales comme Spider-Man et autres X-Men. Hellboy c'est un peu le freak du comics indépendant, ça ne le rend que plus fréquentable à mes yeux.
Puis après son semi échec, del Toro emballe son œuvre la plus réussie, ce fameux labyrinthe mais utilise sa notoriété à profit pour continuer ce qu'il aimerait être une trilogie : enchainer une séquelle à Hellboy dont les studios Sony ne veulent plus mais qu'Universal va donc récupérer pour nous offrir ce Hellboy 2 donc.
Et d'emblée, c'est une déception... Si l'on est ravi de retrouver le professeur Bloom, père spirituel de Hellboy incarné par John Hurt, l'histoire commence comme une classique séquence d'introduction rappelant la triste série de la Momie (également produite par ces "bons" studios d'Universal), une légende maudite parlant d'armée légendaire et invulnérable attendant son Roi et, ô surprise, la séquence est construite comme entrevue par les yeux d'un Hellboy enfant et son imagination, pâtes à modeler et fantasmes d'enfants, pour sur on est bien dans l'imaginaire d'un del Toro qui ne cherchera qu'à jouer avec sa figurine favorite : le démon rouge.
Le tout s'enchaine par après non sans déplaisir mais construit d'une façon identique au premier opus d'où persistance de la déception, après tout les séquelles ne sont elles pas là pour piller un peu de l'aura du premier épisode ? Sauf que le premier épisode n'a pas fait l'unanimité et que del Toro entend bien en faire à la fois le remake et la suite, tout du moins dans la première partie de son film.
Et là surprise, surprise de revoir le chanteur de Bros, euh pardon Luke Goss dans le rôle du grand méchant, un prince déchu blafard rappelant curieusement le prince Nomak de Hellboy 2 auquel le destin est curieusement similaire (et ce pour notre plus grand plaisir, une fois n'est pas coutume). L'obsession de ce personnage pour la reconstitution d'une couronne lui donnant les pleins pouvoirs sur la fameuse armée du titre servira de pitch principal à une intrigue ma fois bien mince mes amis mais suffissamment vitaminé pour laisser tous les protagonistes s'éclater et laisser parler leur pleine puissance.
Car dès la première scène d'action, on est amusés de voir des scènes parfaitement découpées, jouissives dans un bestiaire lorgnant autant du côté du Labyrinthe de Pan que de celui de Star Wars (je vous en laisse la surprise), le personnage d'Abe Sapiens est bien plus développé avec un petit côté sentimental pas si cucul que cela qui relance l'intrigue.
Alors il y a de belles séquences d'action, des répliques amusantes, l'exposition est vite amenée mais on ne voit pas le temps passer, on ajoute quelques scènes oniriques et poétiques dans un contexte inhabituel (voir la séquence final du dieu végétal), quelques réflexions sur le thème du monstre mal aimé propre à l'univers d'un Tim Burton, un affrontement final de toute beauté entre engrenages et armée invulnérable et on obtient ce qui aurait pu être le blockbuster de l'été si le film était sorti l'été justement (ce fut le cas aux USA) et si Nolan n'avait pas sorti de la hotte un héros encore plus sombre et désespéré mais ne boudons pas le plaisir car voici le film fun et pop corn de l'année, bien au dessus de la Momie et de son Jet Li de plus en plus décevant !
8/10 : vivement la suite !
PS : et pour tous les déçus comme moi de ne pas retrouver le personnage de Kroenen, le nazi mécanique, on peut applaudir l'arrivée dans ce nouvel opus de Johann Strauss, un curieux personnage ectoplasmique dont la prise de bec avec Hellboy vous arrachera quelques sourires !
Danny Elfman fait un score honorable, Guillermo Navarro rempile pour une photographie super léchée, les effets spéciaux sont de toute beauté, bref, ruez vous en salles pour passer 2h coupables de pur divertissement !
Maintenant un petit film d'auteur de la part de del Toro du tonneau de ses deux oeuvres "hispaniques" et un Hellboy 3 concluant le tout pour deux chouettes trilogies du même auteur, qui dit mieux ?