Dans le quatrième épisode de ses aventures, Indiana Jones, bien que sur le retour, trouvera peut-être la clé, en tout cas cinématographique, du mystère des crânes de cristal. Mais la légende, elle, remonte à la nuit des temps. Jamais résolue, objet d'un culte chez les derniers prêtres mayas du Mexique, elle fait aussi rêver les férus d'ésotérisme de tous poils.
D'après cette fascinante histoire, les Mayas possédaient 13 crânes de cristal aux vertus surnaturelles qui, une fois réunis, auraient le don de sauver la Terre de la destruction finale. Les Aztèques auraient ensuite été responsables de la dispersion des crânes.
Mais cette légende se retrouve à travers les siècles et les continents, et les chasseurs de crânes n'ont pas abandonné la quête.
Le secret étant bien gardé, on ne sait guère quelle version du conte sera mise en scène dans "Indiana Jones et le royaume du crâne de cristal" (sortie le 21 mai en France, le 22 aux Etats-Unis). Mais le gentleman-archéologue interprété par Harrison Ford y fera la course au crâne contre de méchants Soviétiques.
Et si l'action se déroule principalement au Pérou, la Paramount évoque également le "Crâne du Destin", qui aurait été découvert en 1924 dans les ruines d'un temple maya au Belize, et dont la provenance reste mystérieuse.
Dans la réalité, il existe 12 crânes de cristal répertoriés, aux origines douteuses et dont l'authenticité est contestée. Ces faux ont en effet été fabriqués par des trafiquants d'antiquités au XIXe siècle. L'Europe s'était à l'époque prise de passion pour les antiquités mésoaméricaines, et un certain Eugène Boban, marchand d'antiquités haut en couleurs et faussaire, s'était lancé, après l'intervention de la France au Mexique, dans ce juteux trafic, approvisionnant en crânes les collectionneurs de New York, Paris et Mexico.
On pensait alors qu'il s'agissait de crânes mayas, dont la civilisation connut son apogée entre 300 et 900. Mais aucun crâne n'a jamais été retrouvé dans des fouilles archéologiques de sites précolombiens.
Selon la légende, les crânes émettent et refractent la lumière, projettent des visions, parlent voire chantent, et influent sur les forces terrestres. Des croyances toujours vivaces dans la forêt lacandone (Chiapas, sud mexicain), où vivent les derniers mayas de la région.
A l'ombre du site de Palenque, le prêtre K'in Garcia fait brûler le copal, brandissant au-dessus de sa tête un lourd crâne de cristal, au cours d'une cérémonie à Hacha'kyum, divinité maya de la création.
Le chaman est fils d'un des anciens les plus respectés des Lacandons mayas. Pour lui, le crâne, dont il ne connaît pas la provenance, peut aussi éloigner les maladies et lutter contre la déforestation. "Quand je suis seul, la nuit, vers deux heures du matin, il commence à briller, il émet de la lumière, et reste comme ça environ une minute", explique-t-il.
A des milliers de kilomètres de là, à Washington, Jane MacLaren Walsh est l'heureuse gardienne d'un des crânes de cristal "officiels", celui du Smithsonian Institution. L'anthropologue doute que les mayas d'autrefois aient possédé ce type d'objet et note ironiquement qu'ayant passé 16 ans dans le même bureau que lui, elle n'a jamais constaté aucun des pouvoirs qu'on lui prête...Jane MacLaren a étudié plus de dix ans les crânes les plus connus: outre celui du Smithsonian, ceux du British Museum à Londres et du musée du Quai Branly à Paris, qui expose le sien à compter du 20 mai, à l'occasion de la sortie du nouveau volet des aventures d'Indiana Jones.
Comme ses collègues européens, Jane MacLaren note que ces crânes, stylistiquement éloignés des crânes classiques mésoaméricains, portent la trace d'outils de polissage bien trop modernes pour être honnêtes. "Probablement européen, XIXe siècle", note le British Museum au sujet de son propre crâne.
Ces crânes à taille humaine pourraient avoir été inspirés par deux crânes de cristal tout petits, exposés au Musée anthropologique de Mexico, datant soit de la fin de l'ère pré-colombienne.
Et la légende court toujours. Aux chamans traditionnels sont venus s'ajouter des adeptes New Age. La croyance principale est qu'en vertu du calendrier maya, le monde doit disparaître le 21 décembre 2012, fin d'un cycle de 5 126 ans. Ce jour-là, les 13 crânes doivent être alignés ensemble, pour empêcher la Terre de basculer.
"Je crois que les crânes ressortent maintenant parce que l'humanité a besoin de ces informations, de leur énergie, et qu'ils ont leur propre objectif: nous aider à créer la paix dans le monde", déclare Joshua Shapiro, 53 ans, un de ces aficionados et chasseurs de crânes de cristal. Pour lui, les crânes nous relient aux savoirs des mondes disparus, mayas, Atlantide, extraterrestres... Et il considère "Indy" comme un débutant: "Je portais son chapeau depuis très longtemps, bien avant qu'ils aient même l'idée d'aller coller un crâne de cristal dans un film d'Indiana Jones".
© La Presse Canadienne, 2008