[Olrik] Mes 8/10 minimum de 2024

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Ichiko - 6/10

Messagepar Olrik » Lun 30 Déc 2024, 10:44

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Ichiko
Akihiro Toda - 2023


Pour bien comprendre l’intrigue d’Ichiko (qui pourra parfois paraître un peu cryptique), il faut savoir qu’il existe au Japon plusieurs milliers de Japonais fantômes, c’est-à-dire qui ne figurent pas dans les registres de l’état civil. L’héroïne du film, Ichiko, en fait partie. Elle est née à Osaka en 1987 trois cents jours après le divorce de sa mère avec un mari violent. Elle aurait donc dû être inscrite sous le nom du père, mais soucieuse de garder son ex hors de leur vie, la mère, Natsumi, a décidé de ne pas enregistrer sa fille, la condamnant à vivre en marge de la société, incapable d’obtenir une carte d’assurance maladie ou d’obtenir un emploi régulier.
Cela posé, il faut aussi savoir que le film se présente comme un kaléidoscope temporel. On commence par une scène où le compagnon d’Ichiko (alors âgée d’une vingtaine d’années) lui fait sa demande en mariage, demande que la jeune femme accepte les larmes aux yeux. Et puis, on passe au lendemain et là, surprise ! Ichiko a disparu. Pourquoi ? C’est là que commence une série ininterrompue de flashbacks et de prolepses allant de son enfance à l’enquête menée par son compagnon pour trouver la vérité, en passant par des épisodes de son adolescence. On comprendra au fur et à mesure pourquoi elle se faisait appeler Mitsuko à l’école plutôt qu’Ichiko mais aussi pourquoi, la veille de sa disparition, elle s’est mise à pleurer lors de la demande en mariage, alors qu’à l’arrière-plan, les infos de sa TV indiquaient qu’un cadavre à l’état de squelette avait été découvert dans une contrée non loin.
C’est tout un mystère Ichiko qui va peu à peu se clarifier, porté par l’excellente interprétation de Hana Sugisaki, actrice arrivée à l’âge de la maturité et dont il sera intéressant de voir la suite de la carrière. Après, pas sûr de la pertinence de la structure éclatée alternant les témoignages de différentes personnes ayant connu Ichiko. Ce qui était fascinant et efficace dans Rashomon l’est peut-être moins dans ce film. À trop vouloir donner à l’héroïne une aura de caméléon mystérieux, on en arrive à susciter peut-être pas de l’indifférence, mais au moins un certain détachement émotionnel. Il faut dire aussi que ce portrait de femme suit dans mes visionnages deux autres plus linéaires et portés eux aussi par des interprétations de premier ordre (Ann no koto et 658km Yoko no tabi). L’empathie était totale avec les protagonistes. Là, avec Ichiko, on ne sait trop si l’on doit la voir comme une victime ou une sorte de monstre, et c’est tout le problème.


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Re: [Olrik] Mes 8/10 minimum de 2024

Messagepar osorojo » Lun 30 Déc 2024, 11:13

J'étais intéressé jusqu'à l'évocation de la structure rashomesque. C'est comme les boucles temporelles, je suis très las de cet artifice narratif.

En revanche, je vais essayer de voir les deux autres films.
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Re: [Olrik] Mes 8/10 minimum de 2024

Messagepar Olrik » Lun 30 Déc 2024, 11:22

Le réal' a choisi la voie du mystère. Franchement, le film aurait été plus fort je pense en suivant chronologiquement la trajectoire d'Ichiko.
Si tu apprécies 658km Yoko no tabi, tu peux continuer d'explorer la filmo du réalisateur, il y a vraiment de bons films (Antena notamment).
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Maman et la putain (La) - 10/10

Messagepar Olrik » Mar 31 Déc 2024, 11:05

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La Maman et la Putain
Jean Eustache - 1973


Quoi de mieux pour bien préparer le réveillon du jour de l’an que de (re)mater La Maman et la Putain ? C’est ce que j’ai fait hier dans mon home cinéma : 3h40, une image avec trois mètres de largeur, copie restaurée HD qui m’a permis de savourer le moindre grain sur la gueule de Jean-Pierre Léaud, le volume bien poussé pour entendre les détails des élucubrations de son personnage, Alexandre, partagé entre l’amour pour Marie (Bernadette Lafont) et Veronika (Françoise Lebrun). Et j’en suis ressorti comme lors de ma première fois avec le chef-d’œuvre de Jean Eustache, il y a plus de vingt ans lors d’une diffusion sur Arte : impressionné.

Je précise ici que pour des raisons pratiques (faut bien faire les courses pour le réveillon), je l’ai vu en deux parties : 1H20 dans l’après-midi, 2H20 le soir. Mais à chaque fois, je n’ai pas ressenti le temps, le voir d’une seule traite n’aurait pas été un problème. Il y a une certaine fascination à être plongé dans cette œuvre qui se fout éperdument de construire une histoire avec les habituels ingrédients du storytelling. N’attendez pas une intrigue au cordeau, des rebondissements, de la variété. Sur les 3H40, on se limite vraiment à trois personnages et deux au trois autres vraiment secondaires. Variété des lieux ? Mais non voyons, pour quoi faire ? On n’est pas bien, là, à Saint-Germain et en terrasse des Deux Magots à siroter un bon café ? Une bonne OST alors ? Oh bin oui : prêtez donc l’oreille au vieux vinyle tout crachotant de chansons de Marlène Dietrich qu’Alexandre écoute religieusement chez lui, vous m’en direz des nouvelles !

Non, sur le papier, tout, absolument tout peut faire office de repoussoir. Mais c’est là qu’intervient la magie du film, magie qui a pu lui donner la réputation de « joyau noir du cinéma français ». Alexandre est souvent insupportable et en même temps, il fascine, magnétise, fait rire (car oui, le film est souvent drôle). On le voit deux ou trois fois plongé dans la lecture d’À la recherche du temps perdu. Ou plutôt, dans une tentative de lecture, toujours perturbé qu’il est par son environnement. C’est assez symbolique du personnage : il a beau affirmer à Veronika qu’il est très occupé, aux yeux du spectateur il donne surtout l’impression de ne rien faire de ses journées, de « perdre son temps ». Ce qui n’est pas le cas du spectateur qui, scène après scène, répétition après répétition (on alterne bien souvent entre scènes aux Deux Magots et scènes chez Marie), logorrhée après logorrhée alexandresque, se familiarise avec ces trois personnages, les aime et voit surtout se dessiner une terrible force chez Veronika.

À la sortie du film, on a pu reprocher au film d’être finalement réac de par la conception d’une relation amoureuse selon la jeune femme, à savoir que « baiser » (je n’ai jamais entendu autant de fois prononcé ce mot dans un film) oui, mais baiser avant tout dans le but de concevoir un enfant. On est loin de l’amour libre, en effet. Mais la rage alcoolisée qui saisit Veronika à la fin du film (car si l’on parle beaucoup dans ce film, on picole encore davantage) n’a rien de réac. Au contraire, dans sa longueur, sa violence et sa fin en apothéose, elle a tout pour heurter les réacs. Ce n’est pas rien que d’entendre cette belle femme égrener sa rage désespérée tandis qu’Alexandre fait une chose qu’il n’a plus l’habitude de faire : se taire. Aux enjolivements, aux paradoxes, aux références parfois choisies de ce dernier succède la poésie de l’ordure de Véronika. Le style du premier agace et réjouit, celui de l’infirmière émeut et bouleverse. Et quand arrive enfin le générique de fin, générique absolument silencieux, on entend encore résonner les voix, les pots d’échappement de Saint-Germain captés en prise directe et, pour peu que l’on ait fait partie des heureux élus qui ont suivi le film sans regarder leur montre toutes les cinq minutes, on sait alors que La Maman et la Putain rejoindra notre petit panthéon cinématographique personnel, à une place de choix, celle d’un joyau noir effectivement.
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Auteur: Alegas

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Re: [Olrik] Mes 8/10 minimum de 2024

Messagepar Val » Mar 31 Déc 2024, 13:56

Je tourne autour depuis longtemps, ton avis me motive un peu plus à me lancer. :super:
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Re: [Olrik] Mes 8/10 minimum de 2024

Messagepar osorojo » Mar 31 Déc 2024, 14:02

Idem, la durée m'a toujours freiné malgré l'envie de le découvrir. Faut que je me bouge.
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Re: [Olrik] Mes 8/10 minimum de 2024

Messagepar Olrik » Mar 31 Déc 2024, 14:08

Franchement, n'hésitez pas. C'est un film expérience qu'il faut tenter. De préférence en faisant comme les personnages, c'est-à-dire en fumant cigarette sur cigarette et en enquillant les verres de whisky. Si vous passez la première heure sans regarder votre montre, alors vous êtes ferrés, vous irez au bout.
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