Marquis
Henri Xhonneux & Roland Topor
Téléchat, dans les 80’s, ça décoiffait. Mais
Marquis, réalisé par Henri Xhonneux et avec Topor en directeur artistique, ça décoiffait encore plus. C’est bien simple, parmi tous les films traitant le sujet du Marquis de Sade ou de certaines de ses œuvres (en particulier
Les Malheurs de la vertu),
Marquis se situe clairement au top dans ce qui a été fait de plus bizarre (cela dit, je m’avance peut-être). Certainement moins dérangeant que le
Salo de Pasolini, mais quand même, pour celui qui s’y aventure bien content de retrouver l’esthétique de
Téléchat, oui, ça déconcerte. On est plongé en 1789, dans une cellule de la Bastille où le Marquis (un avatar de Sade) écrit clandestinement des récits pornographiques tout en débattant avec Colin, son sexe doué de parole et qui exige d'être satisfait.
Peut-être le sera-t-il avec Justine, une jeune femme enceinte d'un enfant bâtard du roi et que l’on vient d’incarcérer non loin de lui ? Pas impossible car, afin d'éviter le scandale que cette naissance causerait, un prêtre corrompu imagine qu’il serait adroit de faire croire que le Marquis est le père du bébé…
Marquis est la réponse aux esprits déviants, après chaque séquence post-générique de
Téléchat, se demandaient si Groucha allait finir la soirée en se tapant Lola. Sans ambiguïtés, Topor donne à ces mêmes esprits de quoi satisfaire leurs penchants zoophiles :
Mais limiter
Marquis à une curiosité libidineuse et arty, avec l’usage de ces masques animatroniques fabriqués par Topor, serait trop simple. Si tout n’a pas bien vieilli et si l’on peut ressentir ici et là quelques longueurs, l’intérêt principal est tout de même d’avoir fait feu de tout bois pour restituer plusieurs aspects de cette époque, à savoir une ambiance pré-révolutionnaire, le quotidien de Sade embastillé, le sort incertain de certains de ses manuscrits lors de son emprisonnement, l’esthétique de ses écrits, la réception à cette époque de la littérature pornographique ainsi qu’un goût pour la dissertation philosophique à laquelle Sade n’a eu de cesse de s’adonner.
Mine de rien, Topor et Xhonneux, tous deux aux manettes du scénario, ont cherché à fournir un ovni cinématographique ambitieux sur un tel sujet et donnant une idée assez nette sur ce qui se trame dans les romans du divin Marquis. On y fout, certes, mais pas que. L’amateur y trouvera quelques clins d’œil à son œuvre. Celui qui ne l’est pas aura peut-être la curiosité de s’y plonger, intrigué de s'apercevoir qu'elle ne peut être réduite au simple adjectif « sadique ».