[Alegas] Mes Critiques en 2024

Vos critiques de longs-métrages

Modérateurs: Dunandan, Alegas, Modérateurs du forum

40 000 ans de rêve - 7,5/10

Messagepar Alegas » Sam 03 Aoû 2024, 21:04

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40,000 years of dreaming (40 000 ans de rêve) de George Miller
(1997)


C’était le dernier long-métrage qu’il me restait à découvrir de George Miller, et le moins qu’on puisse dire, c’est que c’est assez surprenant. Déjà, c’est forcément curieux de voir Miller faire un documentaire, qui reste à ce jour le seul qu’il ait jamais réalisé. D’autre part, comme souvent avec Miller, c’est le traitement du sujet qui étonne, car ici il n’est nullement question de faire un historique didactique de l’histoire du cinéma australien, mais bien d’en faire une analyse, de comprendre ce qu’il cherche à raconter, quelles sont ses origines, et ce qui le motive à évoluer. L’autre point fort, c’est que Miller ne se contente pas d’être un simple narrateur : il a bien conscience qu’il fait partie prenante de ce cinéma, et qu’il est un de ses plus grands représentants contemporains. Cela ne l’empêche pas de faire preuve d’humilité (si Mad Max est évoqué, pas question de l’analyser ou de montrer des séquences, Miller préfère se concentrer sur des films moins connus), mais surtout cela le pousse à parler de sa propre expérience en tant que réalisateur-cinéphile, et donc de faire finalement l’équivalent australien de ce que Scorsese a fait avec le cinéma américain, ou ce que fera plus tard Tavernier avec le cinéma français.

C’est donc un film de cinéphile, pour les cinéphiles, et qui a vocation de parler de Cinéma avec un grand C, Miller évoquant le 7ème Art comme la continuation logique et technologique des histoires des premiers temps, et donc ici des récits aborigènes, notamment à travers le monomythe théorisé par Joseph Campbell, et qu’il a découvert suite au succès de deux premiers Mad Max à l’international. Autant dire que c’est un documentaire passionné qui porte le cinéma en grande estime, et qui rend un hommage singulier à tout un pan de culture australienne souvent méconnu : les premiers films muets, les figures typiquement australiennes qui vont en naître (les descendants de bagnards, les aborigènes, …), la rapide volonté des réalisateurs de filmer le bush et les pionniers qui s’y sont aventurés. Pour le coup, c’est un documentaire particulièrement instructif, qui va retrouver des archives qu’on aurait pu imaginer perdues à jamais, et qui va même jusqu’à expliquer l’absence totale de films australiens pendant des décennies d’après-guerre.

Ensuite, on est déjà en terrain plus connu, avec l’évocation de Wake in fright et de Peter Weir, mais c’est toujours fascinant de voir le regard que porte Miller sur ces films, qui tient plus du cinéaste australien conscient de l’héritage culturel que ces films portent et vont transmettre, que celui de simple spectateur. Et sans surprise, comme avec les équivalents américains et français, c’est typiquement le genre de bobine qui vient ajouter à la watchlist quelques dizaines de titres, quand bien même certains sont difficiles, voire impossibles, à trouver. Même si ça s’adresse aux cinéphiles purs et durs, c’est dommage que ce documentaire ne soit pas plus connu, même si sa visibilité réduite n’aide pas du tout (pour le voir, il a fallu que je découvre qu’il existait en tant que bonus sur un vieux dvd de The Last Wave, puis mettre la main dessus, sinon c’est dispo en VO only sur le net). Bref, c’était vachement bien.


7,5/10
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Qiu Ju, une femme chinoise - 7,5/10

Messagepar Alegas » Dim 04 Aoû 2024, 11:58

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Qiū jú dǎ guānsī (Qiu Ju, une femme chinoise) de Zhang Yimou
(1992)


C’est le cinquième film de Yimou, et je vais vraiment finir par penser que les meilleurs films de ce réal se trouvent dans sa première partie de carrière, tant le fossé qualitatif est dingue entre ce qu’il peut faire dans les années 90, et le moment où il a passé le cap des années 2000 avec Hero. Comme avec Ju Dou et Épouses et concubines, on est ici dans un film qui va critiquer la société chinoise, sauf que là où les deux premiers le faisaient de façon indirecte et/ou métaphorique via des récits ancrés dans le passé, ici on est devant un long-métrage qui ne prend pas de gants et qui dénonce ouvertement un système rongé par l’injustice et l’incompétence. On va suivre le combat d’une femme enceinte qui, parce que son homme a été roué de coups par le chef de son village, veut obtenir des excuses publiques, et va passer successivement les strates du système judiciaire chinois pour obtenir réparation.

A priori, on pourrait penser que ça va être un récit idéaliste à la Capra, et même si ça l’est un peu au début le film va progressivement devenir de plus en plus noir. Non seulement le récit est une descente aux enfers au sein d’un système qui fait tout pour que l’héroïne n’obtienne pas ce qu’elle demande, mais c’est surtout l’idée de départ qui va peu à peu être remise en question : jusqu’à quel point il faut se battre pour ses idées ? Faut-il aller jusqu’à risquer le bien-être de sa famille, de soi ? De se ruiner financièrement ? Et surtout, à trop pousser le combat, ne finit-on pas par obtenir l’extrême inverse de ce que l’on souhaite à la base ? C’est toutes ces questions qui vont être posées au sein d’un film patient, anxiogène et pessimiste. Pour mettre en image un tel récit, Yimou fait le choix d’un volte face : là où ses précédents films se voulaient être des pièces indéniablement travaillées visuellement, il y a ici la volonté de plonger dans le naturalisme. Yimou reprend les codes de la Nouvelle Vague française et livre un métrage qui pourrait parfois s’apparenter à du documentaire : une caméra qui reste toujours à hauteur d’homme, qui ne cherche pas le beau cadre, une photographie qui fait le choix d’être terne, etc…

Sur le papier, il y a tout pour me faire fuir d’un point de vue formel, mais c’est tellement ancré dans la note d’intention du récit que ça passe comme une lettre à la poste. D’autant que cela contribue au regard réaliste sur la société qu’il filme, en témoigne les nombreux passages tournés en ville, filmés de façon clandestine, et qui permettent d’avoir des plans larges avec des centaines de figurants, qui sont simplement des citoyens chinois vaquant à leurs occupations. C’est d’autant plus pertinent que le film parle aussi d’une opposition ruralité/urbanité à travers l’héroïne qui doit sortir de sa campagne et découvrir les coutumes de la ville pour porter son affaire, et donc avoir ce réalisme qui transparaît à chaque plan est un véritable atout. Enfin, difficile de ne pas parler de Gong Li qui n’a pas volé les éloges qu’elle a pu avoir avec ce film, elle le porte sur ses épaules de la même façon que son personnage porte ses idées jusqu’au bout. Un super film, mon préféré de son auteur jusqu’ici, et qui pose à nouveau l'énigme : comment un réalisateur aussi critique sur son pays a fini par être l'instrument de son gouvernement par la suite ?


7,5/10
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Cent et une nuits de Simon Cinéma (Les) - 3/10

Messagepar Alegas » Mar 06 Aoû 2024, 16:08

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Les Cent et une nuits de Simon Cinéma de Agnès Varda
(1995)


Qu’est-ce qu’on ne regarderait pas pour avoir des castings de fou à l’écran :eheh: . Pour le coup, ici c’est pas tant le prestige du casting qui m’intéressait, mais plutôt son côté hautement improbable (c'est quand même un film où on a Depardieu, De Niro, Bruel, Delon et Stephen Dorff au sein de la même distribution :mrgreen: ), surtout dans un film qui se voudrait être un hommage total et absolu à un siècle de cinéma. Le pitch pose le niveau de l’aspect hautement perché de la production, puisqu’on suit Julie Gayet qui doit tenir compagnie à un vieil qui incarne d’une certaine manière le cinéma dans sa globalité, et qui souhaite se remémorer sans réelle logique ni continuité des souvenirs d’antan, de ce qui constitue sa grandeur. A partir de cette base, Varda se lâche complètement, le métrage étant un festival de petites scénettes où on va rejouer des scènes de films célèbres, faire des hommages, des parallèles entres différentes œuvres, et balancer tout une galerie de caméos.

Est-ce que ce concept marche ? Sur les premières minutes, il faut avouer qu’il y a un côté amusant, mais on ne peut pas vraiment dire que ça tienne sur la longueur, le côté vain de la chose l’emportant sur la curiosité. Car répétitif, le film l’est assurément. On comprend vite la mécanique du concept et ce qu’en fait Varda devient carrément embarrassant au fur et à mesure que le non-récit avance. Les jeux de mots juste là pour faire du trait d’esprit, les caméos sont gratuits et souvent inutiles (genre pas compris celui de De Niro et Deneuve, si ce n’est avoir deux gros noms à rajouter au générique :? ), et le tout devient assez lourdingue à suivre. Pourtant, il y a quelques bonnes idées dans le lot, notamment quand il y a un rapport à la réalité qui se joue, avec Simon Cinéma qui se rappelle qu’il est joué par Piccoli et donc se rappelle d’avoir joué dans Le Mépris, ou encore la discussion avec Depardieu où on a le sentiment que le film aurait mieux fait d’être un documentaire qu’une œuvre de fiction. Mais ça ne suffit clairement pas à sauver un film particulièrement barbant, surtout si on rajoute en plus une storyline complètement pétée avec Gayet et ses potes qui essayent de monter un projet de court-métrage.

Mais je crois que le pire dans ce film, c’est que d’un côté ça se voudrait être un film hommage à tous les tous types de cinéma, mais que de l’autre ça reste bien centré sur le nombril de Varda, ses proches (tiens, et si je donnais un rôle important à mon propre fils ?), et les films qu’elle semble apprécier. Du coup, difficile de prendre réellement au sérieux un film qui n’évoque que Kurosawa et Oshima en guise de cinéma asiatique, qui ne mentionne jamais le cinéma d’animation hormis Blanche-Neige, qui ne cite ni Spielberg, De Palma ou David Lean, mais qui à côté de ça prend le temps de bien s’autociter en évoquant Sans toi ni loi, les films de Demy, ou de bien dire à quel point Sandrine Bonnaire est une grande actrice (lol). Bref, il y a un côté faux-jeton et opportuniste qui ressort de ce projet hors-norme et inclassable, et qui n’a en réalité pas grand chose pour lui hormis son concept WTF et son casting impressionnant.


3/10
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2024

Messagepar pabelbaba » Mar 06 Aoû 2024, 16:42

Tu parles d'un film de 95. L'animation n'existait pas pour 99% de l'industrie de l'époque, Spielberg avait fait un bon film et le ciné asiate se résumait bien à Kuro/Oshima. C'est le miroir de l'époque. Qui colle bien avec la sitcom de Gayet et ses potes d'ailleurs. :mrgreen:
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2024

Messagepar Mark Chopper » Mar 06 Aoû 2024, 17:00

le ciné asiate se résumait bien à Kuro/Oshima


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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2024

Messagepar Alegas » Mar 06 Aoû 2024, 18:53

pabelbaba a écrit:Tu parles d'un film de 95. L'animation n'existait pas pour 99% de l'industrie de l'époque, Spielberg avait fait un bon film et le ciné asiate se résumait bien à Kuro/Oshima. C'est le miroir de l'époque.


Je trouve que tu donnes de bien mauvaises excuses au film. L'animation fait partie des bases du cinéma (on en faisait avant l'invention du cinématographe) et n'a jamais été seulement cantonné à Disney (si Varda avait voulu faire sa chauvine, elle aurait pu au moins citer Laloux ou Grimault).
Pour Spielberg, que tu ne sois pas fan, soit, mais il avait déjà à l'époque marqué l'histoire du cinéma avec Jaws, Rencontres du troisième type, Indy et E.T. (et je ne cite pas Jurassic Park qui est probablement sorti alors que Varda pensait déjà son projet). Mais là n'est pas vraiment la question : c'est pas tant juste Spielberg, c'est tout simplement le Nouvel Hollywood qui est globalement zappé comme s'il n'avait pas d'importance. Sauf erreur, pas de mention de Coppola ou de Scorsese non plus.

Et si Varda s'est contenté de refléter la vision d'un cinéma au lieu de faire l'hommage global qui est sa note d'intention, c'est bien la preuve que son projet est foiré.
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2024

Messagepar pabelbaba » Mar 06 Aoû 2024, 20:01

J'aime bien Spielberg, mais tu regardes le film avec des yeux d'aujourd'hui. Avant Schindler, l'intelligentsia ciné ne calculait pas Spielberg. L'animation c'était 100 fois pire, un truc pour gosse ou mongolo. C'est une vision du ciné ultra réductrice, qui se regarde la bite (ou la chatte). Je trouve ça normal que Varda ait une vision si étriquée, c'était la pensée de l'époque. Tarantino se fait insulter lors de sa remise de prix à Cannes au même moment...
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2024

Messagepar Alegas » Mar 06 Aoû 2024, 20:15

Je pense sincèrement qu'il est possible de faire des films hommage au cinéma sans tomber dans ces délires de "tel film vaut mieux que d'autre". Si Varda était effectivement dans ce mode de pensée, je trouve ça grave pour quelqu'un qui livre un film pareil.
Même si très différent, car pas le même registre ni fait pour célébrer un siècle de cinéma, Cinema Paradiso évitait ce piège.
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Messagepar pabelbaba » Mar 06 Aoû 2024, 20:25

Bien sûr, il est bien plus réussi. Mais ce n’est pas la même démarche, Tornatore raconte quelque chose. :chut:

Le Varda est plus bordélique et nombriliste, mais c’est aussi dû au fait que Varda fait elle même partie de l’histoire du cinéma quand elle réalise ce machin, alors que Tornatore allait y entrer.

Je trouve que tes reproches ressemblent un peu à ceux que certains peuvent faire sur les films des années 50 parce que le rôle de la femme ne leur plaît pas.
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2024

Messagepar Mark Chopper » Mar 06 Aoû 2024, 20:45

Pour Spielberg, que tu ne sois pas fan, soit, mais il avait déjà à l'époque marqué l'histoire du cinéma avec Jaws, Rencontres du troisième type, Indy et E.T.


Je rejoins Pabel.

On peut dire ça de Spielberg aujourd'hui, mais on ne le pensait pas avant Liam Neeson VS les nazis.

On le respectait autant que George Lucas. Pas du tout donc. Un gentil faiseur.

Ça me rappelle votre débat sur Les Raisins de la colère en fait.
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Messagepar pabelbaba » Mar 06 Aoû 2024, 20:51

On a eu un débat sur Steinbeck? :shock:

Bordel.... Zéro souvenir. Je gatise de plus en plus. :chut:
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2024

Messagepar Mark Chopper » Mar 06 Aoû 2024, 20:53

Faire des reproches à un film sans tenir compte du contexte de sa sortie...

Relis-toi, c'était intelligent :mrgreen:
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2024

Messagepar pabelbaba » Mar 06 Aoû 2024, 20:57

C'est pour ça, je retiens que mes conneries. 8)
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2024

Messagepar Alegas » Mar 06 Aoû 2024, 21:47

Mark Chopper a écrit:On peut dire ça de Spielberg aujourd'hui, mais on ne le pensait pas avant Liam Neeson VS les nazis.


Comme je l'ai dit, ce n'est pas que Spielberg. Vous allez me dire aussi que Coppola et Scorsese n'étaient pas des réals respectés de la profession en 95 ?
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2024

Messagepar Mark Chopper » Mar 06 Aoû 2024, 21:52

Coppola était mort depuis Coup de coeur. Il s'apprêtait à tourner Jack, donc niveau respect, bof :chut:

Scorsese... Bah il y a De Niro dans le film et les deux étaient indissociables depuis le milieu des 70's.
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