Après 36h de sueurs froides et de cris d’extases, je suis venu à bout du terrifiant et exaltant Bloodborne.
N’ayant jamais eu le courage de m’attaquer à la saga des Souls, Bloodborne fut pour moi la première excursion dans un jeu From Software. Car contrairement aux Souls, ce Bloodborne semblait un poil plus accessible et, surtout, plus nerveux, avec un personnage rapide et constamment en mouvement, bien loin de la rigidité des protagonistes des précédents jeux. Mais ce qui m’a surtout donné envie de me plonger dans cette aventure, c’est la direction artistique, gothique à souhait, Lovecraftienne. Totalement ma came.
Et pour le coup, je peux dire que le jeu a tenu cette promesse du début à la fin. L’univers de Bloodborne est un « enchantement » permanent, tellement la direction artistique transpire la maitrise et le goût du travail bien fait. Des ruelles délabrées de Yarnham à l’imposante Cathédrale, en passant par le bois interdit, le château hanté de Cainhurst où les décors oniriques de la frontière du cauchemar et du rêve du chasseur, voilà un jeu qui revisite avec brio tout un pendant de la culture de l’épouvante. Car oui, du début à la fin, on ne se sentira jamais en sécurité dans cet univers. Parfois-même, on se chiera carrément dessus comme dans un bon Survival Horror (le Château de Cainhurst et la Cathédrale supérieure m’ont donné des sueurs froides), d’autant que plus on progresse dans l’aventure, plus la nuit tombe…
L’insécurité est bien entendu renforcée par la difficulté impitoyable du jeu, qui revient 20 ans en arrière en remettant sur la table le game over dans tout ce qu’il a de plus punitif. Si vous perdez, vous retournez au dernier checkpoint (assez espacés), les ennemis respawn, mais pas les objets à ramasser. Tous les objets consommés le sont pour de bon, et vous perdez tous les points d’xp acquis depuis. En gros, il ne s’agit pas d’un reload à la dernière sauvegarde (le jeu sauvegarde votre progression en permanence, à chaque ennemi tué, chaque objet ramassé ou consommé), mais bien d’un retour à la case départ qui prend en compte tout ce qu’on a fait et perdu entre temps. Impossible donc, après une mort, de recharger sa partie pour recommencer avec ce qu’on avait en stock avant de crever. Dur, très dur. Mais aussi extrêmement motivant, car la moindre action se fait avec précaution, le moindre combat s’aborde avec une sorte de respect de l’ennemi (ils font tous très mal et peuvent rapidement nous faire mourir en cas d’erreur), et donc la moindre victoire procure un sentiment de satisfaction assez jouissif et incomparable.
L’aspect punitif est heureusement un peu modéré, essentiellement par 2 éléments :
Premièrement, la possibilité de récupérer ses points d’xp perdus en retournant à l’endroit où on est mort la dernière fois. Mais attention, parfois, au lieu d’être laissés au sol, les xp auront été absorbés par un monstre, il faudra le tuer pour les récupérer. Et attention encore, si vous mourrez une nouvelle fois avant d’avoir pu les récupérer, ils sont définitivement perdus
La 2ème forme de modération est en fait un élément essentiel du game design, qui consiste à débloquer des raccourcis permettant de revenir rapidement au dernier checkpoint. La plupart du temps, un raccourci est déblocable aux environs d’un boss (mais pas au pied du boss non plus). Et là, on aborde un des éléments les plus réussis du jeu : son level design, absolument fantastique. Bloodborne est tout sauf linéaire. Toutes les zones explorées proposent de multiples embranchement et raccourcis, pour former un tout cohérent, avec pas mal de verticalité. Mieux encore, toutes les zones sont rattachées entre elles, si bien que Bloodborne est en fait un vaste open world, chose que l’on ne perçoit pas au départ. Mais un open world à débloquer au fil de l’aventure, tortueux à souhait, et non un bac à sable façon GTA ou Assassin’s Creed. Quelle ne fut pas ma surprise, au bout d’une bonne quinzaine d’heures de jeu, de découvrir que le bois interdit (flippant à mort si vous avez la phobie des serpents…) est en fait juste à côté du lieu où on débute l’aventure, alors que je pensais m’être éloigné de cet endroit depuis bien longtemps.
L’autre grande force du jeu, bien entendu, c’est son gameplay. Le level design magistral permet bien entendu d’offrir un aspect exploration très poussé et gratifiant, mais le centre du jeu, c’est essentiellement le système de combat. Archaïque et simpliste aux premiers abords, il recèle en fait de nombreuses subtilités que l’on découvre soi-même (oubliez les tuto, il n’y en a pas) et qui ne cessent d’enrichir le gameplay par petites touches, pour former au final quelque chose de très riche. L’impression de bourrinage des débuts laisse finalement place à quelque chose de très réfléchi et riche en mouvements. Voici, pèle mêle, les possibilité : attaque simple, attaque puissante, attaque chargée, le tout avec armes courtes ou déployées (sachant que chaque arme offre des types d’attaques différents), attaque sautée, attaque en sprint, attaque de « déploiement d’arme » dans un combo, backstab, attaque au gun permettant de placer un contre, esquive, saut arrière, objets spéciaux à lancer (couteaux, cocktails molotov…), sans oublier la possibilité d’attribuer des éléments de feu ou de foudre aux armes… Bref, c’est très riche, et chaque monstre a son point faible nécessitant l’adoption d’une stratégie ou l’emploi d’une arme en particulier (par exemple, l’attaque puissante de la hache déployée permet de frapper au sol par un coup vertical, idéal pour les ennemis rampants).
Et puisqu’on parle des combats, comment ne pas parler des boss ? Là, on touche le graal, avec des affrontements absolument dantesques, démesurés, soutenus par une musique orchestrale de toute beauté (glaçante). Presque chaque boss a droit à son thème, rendant chaque affrontement unique et mémorable. Là aussi, il faut trouver le point faible, la bonne stratégie, et ce n’est pas une mince affaire tellement ils font mal. Certains vous donneront des cauchemars. Pour ma part, la bête cléricale (premier boss du jeu, qui vous calme direct), la bête assoiffée (et son putain de poison) et le boss de fin m’auront rendu la vie dure. Mais alors, quelle satisfaction quand la barre de vie s’amenuise et que l’on porte le coup fatal. Une impression de David ayant vaincu Goliath, d’avoir remporté un combat pourtant perdu d’avance. Grisant.
Cerise sur le gâteau, le jeu a une vraie dimension RPG, avec création de personnage poussée, et des systèmes d’évolutions simples mais bien foutu (et toujours gratifiant) : amélioration de diverses stats (vie, force, endurance, magie), amélioration des armes + possibilité d’y attribuer des gemmes pour obtenir des bonus, grande variété d’équipements (tête, corps, bras, jambes) conférant diverses statistiques (renfort de la défense physique, de la défense au poison, à la magie etc.) . Ultra complet.
Finalement, pas grand-chose à redire. Au rayon des points négatifs, on pestera surtout sur la caméra et le système de lock, qui s’affolent dans les zones étriquées et quand on s’approche des ennemis imposants. Plutôt que de s’éloigner pour offrir une meilleure visibilité, la caméra se rapproche alors du personnage et se fout en contre-plongée, dans les pattes de l’ennemi. Pas terrible… Je reprocherais aussi une zone particulièrement retorse, qui abuse un peu sur la progression par l’échec.
Techniquement, c’est pas toujours au point, avec quelques textures peu réussies et des chutes de frame rate par endroits (surtout au début). Mais tout ceci est vite oublié face à la DA du jeu.
Bref, ce jeu est une tuerie. A faire absolument, pour peu que vous ayez le courage de vous mesurer à ce défi. Mais dites-vous que j’ai réussi à le finir, alors que je suis habituellement assez nul dans ce genre de jeu. En prenant son temps pour maitriser le gameplay, on parvient à en voir le bout. Avec un sentiment de satisfaction unique.
Les + :- DA et Level design fabuleux
- Cette ambiance…
- Système de combat riche et dynamique
- Exploration très présente et gratifiante
- Des boss mémorables
- Musiques démentes
- L’aspect RPG très réussi
Les - : - Caméra et lock capricieux face aux ennemis imposants
- Quelques chutes de frame rate
- Un très beau jeu PS3…
- Difficulté un peu abusée sur 2 ou 3 passages
9/10