Furin (aka Strange Triangle) / Shigeo Tanaka (1965)


Un écrivain qui rejette en bloc l'idée de mariage - et, plus encore, celle de monogamie - entretient deux relations amoureuses. D'un côté, avec Ayako Wakao, irrésistible beauté froide dont il apprécie la compagnie deux jours par semaine (surtout que la belle s'occupe de ses tâches ménagères). De l'autre, avec Kyōko Enami, femme plus moderne qui satisfait surtout ses besoins sexuels. Bien sûr, les deux femmes finissent par se rencontrer et l'écrivain craint le pire. Mais voilà : elles s'entendent bien. Très très bien même (le lesbianisme n'est que suggéré, mais il crève les yeux). Au point de s'imposer toutes deux de plus en plus dans la vie de l'écrivain qui n'a plus un moment à lui. Pendant une bonne partie du film, je me suis dit : "Tiens, on dirait une adaptation d'un roman de Jun'ichirō Tanizaki, mais en moins pervers". Moins pervers car le film, à l'esthétique travaillée (magnifique photographie en noir & blanc), semble froid en apparence - une froideur formelle qui atténue la perversion du fond. Mais plus le film progresse, plus les sujets évoqués se révèlent sombres (avortement, suicide...) et / ou tabous pour l'époque (saphisme donc, mais aussi ménage à trois). Et à la fin, que je ne spoilerai pas totalement, le doute n'est plus permis : l'écrivain, loin d'avoir un sort enviable - car oui, le porc pas tout à fait déconstruit que je suis l'a envié - fait peine à voir et donne surtout l'impression de se retrouver coincé avec deux sacrées détraquées du bulbe. Moins pervers que du Tanizaki ? L'homme qui a écrit Le Tatouage, La Clé / La Confession impudique et Le Journal d'un vieux fou ? Oh que non.
Note : 6/10