KILLERS OF THE FLOWER MOON de Martin Scorsese

[pabelbaba]

Il va reconstituer Monument Valley sans fond vert et en studio.

[osorojo]

Si on me promet Margot dans le plus simple appareil, je donne toutes mes économies.

[lvri]

On est pas dans le social là, avec des budgets aussi énormes, c'est logique que la rentabilité ait son mot à dire.

Mais je ne dis pas le contraire. Évidemment que produire un film en sachant que ce ne sera pas rentable, c'est débile. Le problème que je pointe, c'est le besoin d'un gros retour sur investissement, et ce rapidement. D'où ma remarque sur la prise de risque. Et cette remarque est générale encore une fois. Je comprends que le budget demandé par Scorsese est sûrement gigantesque, mais n'ayant aucun détail, difficile de juger... (Quand on voit le prix des Marvel, je pige pas plus....).

[Creeps]

Vous êtes marrants vous, il faut bien nourrir les acteurs

[osorojo]

Je veux bien nourrir Margot, bénévolement.

[Mark Chopper]

[Alegas]

Et puis la rentabilité sur le long terme ça existe plus vraiment aujourd'hui en fait, ou alors sur des blockbusters sur lesquels on peut vendre des jouets et faire des suites.

Mais sinon, autant à une époque on pouvait espérer un bouche à oreille qui maintienne le film sur plusieurs mois en salles, de la rentabilité vidéo et des achats pour les droits télévisuels, autant maintenant c'est quand même très différent : les films restent peu de temps au cinéma, la vidéo devient d'année en année moins importante financièrement, et les droits TV/VOD/SVOD sont négociés très rapidement.

[lvri]

les films restent peu de temps au cinéma, la vidéo devient d'année en année moins importante financièrement, et les droits TV/VOD/SVOD sont négociés très rapidement.

Tout se recoupe. Il y a trop de sorties, pas assez de place, et seuls les plus gros sortent gagnant. Si un film n'atteint pas x entrées ou x millions le premier weekend, on le vire pour en mettre un autre.
Le support physique n'est pas soutenu, et les droits TV bordéliques. On en revient donc toujours au même point : de rares prises de risques, et un souhait de rentabilité maximal en un minimum de temps.
Le monde du cinéma brasse des millions qui se concentrent toujours aux mêmes endroits. Une vraie belle industrie

[Mark Chopper]

Tu as une vision Mélenchoniste du problème là...

Nous vivons dans une économie de marché. Le manque de prise de risques existe du côté de l'offre en partie parce qu'il existe du côté de la demande : le spectateur, qui n'a jamais eu accès à autant de contenu, se révèle de plus en plus frileux au fil des ans.

Donc pourquoi tenter un investissement risqué si l'on sait que les spectateurs ne suivront pas ?

C'est bien beau de toujours critiquer d'un côté, mais la balle est une fois sur deux dans le camp des consommateurs.

[lvri]

mais la balle est une fois sur deux dans le camp des consommateurs

Totalement, je n'ai aucun doute là-dessus. Mais ça ferait du bien au consommateur d'être contraint de changer aussi. Ce n'est pas le consommateur qui demande à l'origine. Mais son mode mouton le pousse vite à aimer être abreuvé de la même chose. Donc on continue ad vitam nauseam jusqu'à une nouvelle prise de risque qui fait évoluer les choses. Le cinéma en 100 ans, n'a pas proposé que des films de superslips à 250 millions.

Tu as une vision Mélenchoniste du problème là...

Extrêmement réducteur...

Nous vivons dans une économie de marché

Et ? On est obligé d'y rester ? Je sais bien que ma vision est très utopique. Mais si on continue à dire "notre monde est comme ça, donc...", C'est sûr que Avengers 22, Spiderman 33 et LGBTHero ont de l'avenir et que le cinéma est bel et bien mort...
Et ma dernière remarque n'est pas anodine : la concentration des richesses créé ce problème. Ce sont les plus gros studios qui prennent le moins de risque.... Et là, on est clairement dans qqchose d'illogique. Car soyons honnête, le projet de Scorsese, bien que le budget soit sûrement bien trop élevé, c'est un mini pari pour Apple équivalent à l'achat d'un millionnaire pour toi (ça existe encore ce truc d'ailleurs ?).

[osorojo]

Non mais concrètement, où veux-tu en venir ?

Qui doit prendre des risques ? Comment est-il possible de contraindre le public à sortir de sa zone de confort pour un loisir ? Comment les studios doivent être bousculés ?

[Mark Chopper]

Et ? On est obligé d'y rester ?

Visiblement, oui. Sinon tout s'effondre.

Et puis "contraindre le spectateur"... Comment dire... Tu es dictateur dans l'âme ?

[lvri]

Oso et Mark, sérieux, le public demande des films Marvel depuis les années 20 ? C'est bien grâce à des tentatives, des prises de risques ou autre que le visage du cinéma a évolué ? (Avec plus ou moins de réussite, mais c'est un autre sujet). Un style fonctionne, tout le monde entre dans la brèche et on ne voit plus que ça.

Qui doit prendre des risques ?

Les Studios, les investisseurs, le spectateur, tout le monde, ... Les mastodontes ne sont plus ceux qui osent alors qu'ils peuvent, c'est quand même dommage. Et voir Apple débarquer n'est pas le meilleur signe qui soit d'ailleurs.

Comment est-il possible de contraindre le public à sortir de sa zone de confort pour un loisir ?

Quand un multiplex propose 10 salles, dont 9 remplies de marvel, on peut clairement se poser la question de la diversité dans la culture. Steve Jobs avait dit à juste titre que le consommateur ne savait pas ce qu'il voulait, et je pense qu'il a raison. Alors ok, sans parler de contraintes pour éviter d'être traité de Mélenchoniste dictatorial, on peut pousser à un équilibre plus sain, un minimum obligatoire de présence en salle, un % de diffusion en VO, ... Créer une sorte d'égalité de traitement entre tous les genres.

Comment les studios doivent être bousculés ?

Je vais garder ma Besancenotite aigu pour moi....
Je ne vois qu'une véritable solution : c'est à nous de les bousculer... Il est maintenant trop tard pour empêcher la création de mastodonte qui n'aide pas, et je vais éviter le sujet des actionnaires...

Alors encore une fois, je me répète : c'est très utopique, et j'en ai conscience. Mais j'ai de plus en plus de mal avec les "c'est comme ça", alors que clairement, il y aurait des tas de solutions pour retrouver un équilibre qui rendrait les choses plus saine. Je suis pas Mélenchoniste, mais sûrement très rêveur.

[Jed_Trigado]

Le gros problème du cinéma actuel, c'est qu'au niveau des budgets, j'ai l'impression que c'est tout ou rien, soit on a du blockbuster méga-friqué ou de la prod bien pauvre a la Blumhouse où ça ne dépasse pratiquement pas les 5 millions de $ où tout passe uniquement dans la promo, on a perdu la notion des budgets "moyens" dans les studios qui étaient pourtant légion pendant des décennies. Pourtant, c'est là où sont souvent les meilleures surprises au BO, Mr Bobine en avait fait une bonne vidéo :

[Mark Chopper]

Oso et Mark, sérieux, le public demande des films Marvel depuis les années 20 ?

Parce qu'il n'y a que des films Marvel ?

Sinon, le cinéma a toujours fonctionné selon des modes. Et quand le public se lasse, la mode change. C'est aussi simple que ça. C'est la demande qui conditionne l'offre, plus que le contraire... Tout le contraire d'une prise de risques.

Quand un multiplex propose 10 salles, dont 9 remplies de marvel,

Tu ne caricatures pas du tout.

on peut pousser à un équilibre plus sain, un minimum obligatoire de présence en salle, un % de diffusion en VO, ... Créer une sorte d'égalité de traitement entre tous les genres.

Oui, demandons aux cinémas qui actuellement tournent à vide de sacrifier des salles au moment de la reprise et au diable leurs pertes.