Les "vrais" savent que le premier Terminator est meilleur que le second, dont est extirpée une bonne partie de la noirceur originale. Tout comme
Predator, nul besoin d'explication à rallonge (qui n'intervient qu'au milieu) pour introduire l'univers entourant l'histoire, qui se soutient par lui-même. James Cameron prouvait avec ce film qu'il faisait parti des réalisateurs (comme Ridley Scott) capables de produire un
Level design suffisamment efficace et crédible sans faire intervenir (à part une petite ligne introductive) le contexte, ce que j'appelle du grand art visuel. On en reconnaît déjà la patte à travers l'arsenal de machines futuristes qu'il déploie, et son thème de toujours, mis en scène plus que réellement développé : le combat de la technologie contre la civilisation.
Arnold Schwarzenegger tient ici l'un de ses meilleurs rôles, taillé pour lui. Sa carrure massive, sa figure carrée et son regard monolithique, et même son accent au couteau, sont un atout pour camper cet androïde totalement froid et implacable. Le petit détail qui tue, les habits que les deux résidents du futur volent : une combinaison en cuir de punks pour le T-101 qui lui donne un look d'enfer, et des trucs de clochard pour Kyle qui sont comme une répétition du futur misérable d'où il vient, et induisent immédiatement une personnalité à chacun. La présence et le charisme d'Arnold font beaucoup pour son personnage (l'arsenal de guerre qu'il transporte aussi !), sans quoi les indices de sa technologie futuriste qui l'abritent ne produiraient pas le même effet (dont le fameux ordinateur de données, qui comporte même le choix de répliques !). Michael Biehn, acteur récurent de James Cameron, malheureusement souvent sous-estimé, fait un très bon Kyle, presque aussi froid que celui qu'il combat non par choix mais pour survivre, au regard animé par le désespoir et la paranoïa. Par contre il faut avouer que Linda Hamilton n'a pas encore la classe qu'elle aura dans
Terminator 2, même si c'est bien vu cette incursion dans le quotidien, accentuant l'oppression qui va atteindre ce petit cadre presque douillet, et préparant sa légende.
Le script, tout le monde le connaît, axé essentiellement sur les approches du terminator, et de Kyle qui le pourchasse pour protéger Sarah. Le premier est une brute utilisant parfois une stratégie plus fine pour attrapper sa proie, et l'autre n'est qu'un humain, mais enseigné par la survie, se démerde comme un chef pour trouver ce dont il a besoin pour s'équiper. Beaucoup plus que sa suite, la grande force de
Terminator est son traitement cash et sans concession proche d'un Verhoeven (accompagné d'une bonne dose d'humour à froid), essentiel pour sur-ligner l'absence de sentiments du T-101 et le destin qui est tout proche de s'accomplir (beaucoup de balles perdues, et un Terminator qui prend son temps, pour notre grand plaisir, avant de se montrer plus intelligent dans sa chasse à l'homme). A ce titre, les scènes d'action rivalisent d'efficacité, et je pense surtout à celle du commissariat, carrément culte (qui a presque un côté John Woo par sa crudité, son découpage, la manière dont la caméra suit les mouvement du Terminator au plus près), sans oublier celle dans l'usine de robots, oppressante comme il faut, et les flash-backs du futur (rah ces crânes humains écrasés par le robot-tueur !). Il y a bien quelques détails qui ont un peu vieilli comme le look de Sarah Connor (sa tignasse n'a plus rien de sexy), l'ambiance musicale très 80's, et quelques FX visibles (le visage tuméfié du Terminator, et l'animation du terminator), mais le côté "nature" de cette série B a du charme à revendre. Enfin, la musique électronique reproduisant le rythme d'un battement de coeur, accompagnant chaque apparition de Arnold, fait toujours son petit effet.
Bref,
Terminator, le film qui met d'accord toutes les personnes de bon goût, et surtout ceux qui savent apprécier un bon divertissement couillu et qui tâche.