Infernal Affairs, d'Andrew Lau & Alan Mak (2002) L'histoire : L'affrontement de deux infiltrés, un policier dans le milieu des triades et un gangster dans le monde de la police...Infernal Affairs, c'est avant tout un scénario en béton, une merveille de concision qui parvient à exploiter un sujet qui m'a toujours fasciné : celui des infiltrés. Des hommes qui permettent au duo de réalisateurs Andrew Law et Alan Mak de creuser la question de l'
identité, et de manière double puisque, contrairement à quelques prédécesseurs, comme la série
Un flic dans la mafia ou le film
Donnie Brasco, au demeurant excellents, ici il n'est pas seulement question de se pencher sur un policier amené à vivre parmi les truands et à souffrir de cette schizophrénie, de la nécessité de violer la loi qu'il a juré de faire respecter et d'entretenir un mensonge permanent qui l'empêche d'entretenir de véritables relations : non, il est en plus question d'un truand infiltré dans la police. Et le scénario va s'employer à tirer partie de cette richesse, à jouer sur la question des faux-semblants, à travers une partie de cache-cache entre ces deux hommes qui, loin de cette confrontation née de leurs rôles respectifs, auraient pu, c'est une évidence, devenir amis. Le spectateur, à l'époque, pouvait-il attendre un tel coup de génie de la part de ces cinéastes ?
Non, vu leur passé de tâcherons, et d'ailleurs, la fausse suite/vraie préquelle de ce film mis à part, ils n'ont plus jamais retrouvé par la suite ce niveau d'excellence. Qui plus est, à l'époque, cinq ans seulement après la rétrocession, peu attendaient encore un tel coup d'éclat :
Time and Tide n'avait guère été qu'un cas isolé et le polar hongkongais ne brillait plus. Mais difficile de se manquer avec un tel script et un tel casting : Tony Leung Chiu-wai et Andy Lau n'ont peut-être jamais été aussi classes, Anthony Wong trouve l'un de ses rôles les plus touchants en policier/figure paternelle (sa dernière scène m'estomaque à chaque vision) et Eric Tsang trouve le rôle de sa vie, qu'il étoffera dans
Infernal Affairs 2. Plus connu pour ses interprétations bouffonnes, il en impose en chef de triade, à tel point que Jack Nicholson lui-même ne parviendra pas à le surpasser en reprenant ce personnage dans le
remake signé Martin Scorsese. A quelques rares fautes de goût, comme des effets stylistiques poseurs, Law et Mak offrent au film une facture visuelle aussi élégante que ses interprètes.
En résumé : l'un de mes cinq polars hongkongais préférés, que je ne me lasse pas de revoir. Pour ses moments de tension (le deal de drogues raté, la dernière scène de Wong), son casting, sa classe et sa richesse thématique : une claque que Scorsese lui-même n'a pas réussi à égaler.
Note : 9,5/10