Quartier violent, de Hideo Gosha (1974) L'histoire : Pour déclencher une guerre de clans, des hommes enlèvent une actrice appartenant à l’un d'eux. Mais l'affaire dégénère et finit par opposer un yakuza retiré du milieu, patron de bar, et un autre toujours actif, dont les méthodes très "vieille école" déplaisent à ses supérieurs...Première incursion de Hideo Gosha dans le
yakuza eiga contemporain,
Quartier violent détonne. L'intelligence du cinéaste, ici, est de rester fidèle aux codes alors en vigueur, avec notamment un casting composé d'habitués, une violence assez graphique (le sang gicle assez souvent) et cette esthétique propre au cinéma-pop japonais (très coloré, proche du style de Seijun Suzuki, le film est visuellement une tuerie) tout en apportant son propre regard sur le sujet : à savoir l'exclusion des marginaux et les relations entre
yakuzas et sphère économique. Pourtant, au premier abord, avec ses personnages parfois
over the top (un tueur travesti, un autre qui ne se promène jamais sans son perroquet ou encore le
coolissime Bunta Sugawara en flingueur mélomane),
Quartier violent a parfois des airs de film d'exploitation : c'est cette schizophrénie, entre sérieux du propos et délire potache, qui fait toute la force du film. Pendant les quatre-vingt-dix-minutes qui séparent son introduction musicale de sa conclusion nihiliste, qui rapproche son cinéma de celui de Sam Peckinpah, Hideo Gosha nous fait comprendre qu'une page s'est tournée pour le milieu criminel de Tokyo au début des années 1970 : les apparences et la respectabilité priment, l'important est de contrôler les différents rouages économiques de Tokyo et de fuir le regard des médias, en aucun cas de se satisfaire d'une vie de marginal ou de multiplier les actions violentes en plein jour. Voilà pourquoi les anti-héros d'hier sont amenés à disparaître : ce monde n'a plus besoin d'eux et les trouve embarrassants. Malgré sa richesse visuelle, son excellente interprétation et l'intelligence de ses thématiques,
Quartier violent ne m'a pourtant pas passionné du début jusqu'à la fin, la faute à un coup de mou en milieu de parcours : un petit défaut pour un essentiel du genre, hautement recommandable.
Note : 7,5/10