Clairement l'un des films que je préfère dans la filmographie du maître Stanley Kubrick. Le genre de films qui par son côté atypique va forcément diviser les spectateurs et impressionner ceux qui sont réceptifs à l'ambiance unique d'un tel métrage.
A Clockwork Orange, c'est tout d'abord un film dont l'héritage hante véritablement tout un pan du cinéma contemporain (comme peut le faire
Shining sur le cinéma d'horreur ou
2001, A Space Odyssey sur la science-fiction), que ce soit sur des réalisateurs bien précis (Gaspar Noé évidemment, mais aussi Nicolas Winding Refn et bien d'autres) ou tout simplement sur la façon la violence a pu être digérée via le format cinématographique. Une pièce maîtresse de l'histoire du cinéma, dont l'importance est aussi grande que le refus total de la société de l'époque, qui n'y voyait qu'un simple déluge de violence, sans même aller chercher une quelconque signification (ceci dit, le problème est encore clairement d'actualité quand on voit la réception de films comme
Irréversible). D'ailleurs, c'est bien là où le film de Kubrick se révèle être le plus perturbant : non pas dans sa violence, mais bien dans la réception qu'elle a reçue. Car oui,
A Clockwork Orange est, de toute évidence, un film qui se met en abimes, et il est difficile de ne pas voir dans le monde décrit par Kubrick un reflet de notre propre société face à la violence incarnée. On retrouve donc dans le film, via certains personnages, la caractérisation des spectateurs qui tenteront de faire interdire le film par incompréhension et par peur, ainsi que cette éternelle volonté de changer son prochain, sans même se demander si l'on est meilleur que lui.
Nul doute que Kubrick avait, lors de la production de son long-métrage, anticipé les réactions futures d'une catégories de spectateurs, ainsi que les retombées politiques qui ont finalement utilisées le film comme porte-étendard d'une violence grandissante, de la même façon que le Premier Ministre, dans le récit, utilise Alex pour arriver à ses fins. De ce point de vue là donc, le film est tout simplement captivant de bout en bout, devenant ni plus ni moins que le film ultime sur la façon dont est reçue la violence dans la société occidentale, une société que Kubrick s'amuse à rendre aussi déplaisante que possible à regarder, avec un look kitsch 70's très prononcé mélangé à une vision d'anticipation presque déroutante (le langage anglo-russe, l'une des particularités du roman de base). Néanmoins, il y a véritablement une volonté d'esthétiser à fond la violence et les lieux utilisés, et cela donne quelques-uns des plans les plus beaux de la filmographie de Stanley Kubrick, en particulier lorsqu'il décide d'iconiser son acteur principal (Malcolm McDowell, juste génial du début jusqu'à la fin, clairement le rôle de sa vie) ou d'utiliser de la musique classique refaite au synthé pour créer une ambiance très dérangeante (l'ouverture, la scène de sexe accélérée, le vengeance d'Alex sur les droogs, le viol sur Singin' in the rain ou encore la scène de démonstration du procédé anti-violence).
A Clockwork Orange, ni plus ni moins qu'un très grand film dont l'importance n'est plus à démontrer, le genre de film qu'il faut avoir vu au moins une fois dans sa vie, que l'on aime ou pas.