La Nuit nous appartient |
Réalisé par James Gray
Avec Joaquin Phoenix, Mark Wahlberg, Robert Duvall Drame, Thriller / USA - 1h54 2007 |
9.5/10 |
SynopsisNew York, fin des années 80. Bobby est le jeune patron d'une boite de nuit branchée appartenant aux Russes. Avec l'explosion du trafic de drogue, la mafia russe étend son influence sur le monde de la nuit.
Pour continuer son ascension, Bobby doit cacher ses liens avec sa famille. Seule sa petite amie, Amada est au courant : son frère, Joseph, et son père, Burt, sont des membres éminents de la police new-yorkaise...
Chaque jour, l'affrontement entre la mafia russe et la police est de plus en plus violent, et face aux menaces qui pèsent contre sa famille Bobby va devoir choisir son camp...
CritiqueFilm d'exception de James Gray qui réunit un script poignant rythmé, casting trois étoiles, réalisation sobre mais efficace.
La scène d'ouverture entre Joaquin Phoenix et Eva Mendes est cultissime, d'une rare beauté visuelle avec une atmosphère sensuelle et bande originale 80's qui nous met tout de suite dans l'ambiance.
De nombreux thèmes sont évoqués ici mais surtout la fatalité, les relations familiales tumultueuses , la loyauté...
Ici, Bobby (Joaquin Phoenix) est un individu qui détonne dans sa famille si parfaite. C'est un homme de la nuit, trempe dans des histoires louches de trafic de stupéfiants dans le milieu de la mafia russe. Homme libre et libéré follement amoureux de Amanda (Eva Mendes), de caractère plutôt spontané et irréfléchi.
Joseph Grusinsky (Mark Wahlberg) est à l'opposé de son frère, droit dans ses bottes et dans son uniforme de flic sous le joug de son père (Robert Duvall). Un homme très respectable et respecté, un flic modèle sans reproche, bon père de famille, un homme d'exception.
Burt Grusinsky (Robert Duvall) est le père de Bobby et Joseph. C'est aussi un flic, haut placé et expérimenté avec des années de service à son compteur. Ici, Robert Duvall amplifie le coté vieillissant et protecteur de son rôle, avec une démarche peu assurée et des gestes peu affirmé. Mais, mémé si physiquement il est limité, moralement c'est le boss très respecté, mais dans son cœur Joseph est son fils préféré qu'il a su guider pour en faire presque un héros, alors que Bobby est plutôt le fils indigne et il le lui fait comprendre.
Joaquin Phoenix est ici remarquable et offre une belle palette d'émotions et son personnage évolue énormément dans le film passant du simple voyou au flic vengeur. Enorme charisme et charme fou avec une justesse dans son jeu. Un dieu de la nuit qui rêve de jours meilleurs, écartelé entre ses deux familles.
Mark Wahlberg est bon samaritain discipliné et est plus en retrait dans le film car son personnage est plus linéaire et moins torturé que Bobby, tout en retenue.
Robert Duvall joue "the boss" et est the boss de l'actor's studio, donc tout va bien.
Eva Mendes est crédible ici séduisante et touchante, et loin des potiches habituelles. Certes, elle joue sur son physique avantageux mais sans en faire trop. C'est un peu la Sharon Stone de Casino, le bling bling en moins qui doit suivre son mec malgré les histoires pourries qui lui tombent dessus.
Film très bien mené et intéressant grâce à l'évolution des relations au sein de la famille Grusinsky.
Gray nous fait assister au début du film à une cérémonie entre flics où les relations sont ultra tendues entre flics et voyou. Les flics trouve que Bobby n'a pas sa place parmi eux et lui montre un certain irrespect, et Bobby lui est là en mode touriste et ne pense qu'à enlacer sa copine et à se tailler au plus vite. Les relations de famille sont donc minimales et plutôt tumultueuses et c'est surtout la relation de Bobby avec son père qui semble la plus tendue.
Puis, en fin de film la boucle est bouclée avec une autre cérémonie de flics mais ici la famille est à la fois éclatée en ayant perdu des plumes dans la bataille mais profondément unie à jamais mais il a réussi à rentrer dans le droit chemin.
Bobby est tiraillé entre sa loyauté envers la famille de la mafia et sa vraie famille.
Rejeté par sa vraie famille, il ne voit pas pourquoi il irait trahir ses amis, et ceux qui l'ont fait grandir dans le milieu car eux ne l'ont jamais trahi,
Le personnage de Bobby est face à de dures épreuves qui le font évoluer de façon radicale vers un homme profondément blessé mais qui a eu le déclic et est enfin de retour dans sa vraie famille au détriment de l'amour de sa vie.
On assiste à la rédemption de Bobby puis il passe par la reconquête de son identité et de l'amour des siens, mais il doit faire une croix sur sa vie passée de mauvais garçon et dire adieu à ses désillusions . Mais, on voit bien qu'à la fin Phoenix terrassé et accablé retombe sur terre et réalise qu'il a perdu l'amour de sa vie en croyant l'apercevoir parmi la foule et peut à peine ouvrir les yeux et doit surement regretter un part de ses décisions.
Les quelques invraisemblances (Mark Wahlberg qui n'est pas défiguré après son incident par exemple) seront vite pardonnées face à la force de ce long métrage.
Le film comporte de nombreuses scènes fortes visuellement et émotionnellement avec plusieurs ambiances sur une musique des années 80 : boite de nuit, scènes plus intimistes entre Eva et Phoenix, poursuite en voiture sous une pluie battante, infiltration, chasse à l'homme dans les champs de blés ...
Une fin intense à la "French Connection" avec ambiance western enfumé est magnifique.
Le réalisateur aime aussi se jouer d'effets sonores : respiration, battements de cœur, battements d'essuie glace, tic-tac, bruit d'assourdissement.
Gray se joue du contraste et des parallèles et entraine le spectateur dans ce drame très sombre.
La mise en scène est travaillée et maitrisée d'une main de maitre par James Gray.
Cette famille éclatée et opposée qui par la force des choses s'unit contre la danger, une belle tragédie moderne. Le spectateur suivra la succession des épreuves subies par cette famille de façon douloureuse et implacable.