VORACE - Antonia Bird (1999)
Sorti en 1999 dans l’indifférence générale et suivi d’un bide total au box office (2 millions de dollars de recettes sur le sol américain pour 12 de budget), Vorace s’impose pourtant aujourd’hui comme un film à l’aura culte chez les cinéphiles.
En le revoyant, on comprend aisément pourquoi le film n’a pas marché, tant il est provocateur, subversif et politiquement incorrect à l’égard de la nation américaine et de ses origines.
L’intrigue se déroule au 19e siècle, pendant le conflit américano-mexicain, on suit le capitaine Boyd (Guy Pearce) récemment muté dans une autre garnison, isolée dans un fort en Californie. Mais bientôt, l’arrivée de Colqhoun, un homme étrange et apeuré, va changer son destin. Celui ci raconte qu’il a été témoin d’actes abominables alors qu’il était bloqué dans une grotte avec d’autres personnes. Le commandant du fort décide alors d’envoyer une équipe dans la grotte pour sauver d’éventuels survivants. Mais ce qu’ils vont découvrir sur place dépasse leur imagination.
Un postulat qui permet à la réalisatrice Antonia Bird (dont c’est le premier et malheureusement le dernier film hollywoodien) de mélanger plusieurs genres, principalement le western, le film d’horreur et la comédie bien noire, et d’offrir une relecture très intéressante du mythe du vampire et du cannibalisme. C’est aussi une métaphore violente sur la construction de la future plus grande puissance mondiale, qui se fera inévitablement dans le sang. A travers ces deux mythes, Bird livre une réflexion culottée et ambiguë sur la nature humaine, où l’homme doit dévorer son voisin pour survivre.
Un scénario à l'écriture soignée, où chaque personnage a de la profondeur et où les retournements de situations sont quasiment imprévisibles et parfaitement menés. Coté mise en scène, c'est aussi d'une grande maitrise, Bird soigne ses cadres, instaure une ambiance malsaine et crée une tension qui trouve son paroxysme dans la fameuse scène de la grotte, où l'alliance du cadrage, du découpage et de la musique donne une scène totalement envoutante. La B.O magistrale signée par Michael Nyman et Damon Albarn donne au film un ton totalement atypique et décalé.
Bird dirige également très bien ses acteurs, Robert Carlyle en tête, qui trouve certainement ici le meilleur rôle de sa carrière en incarnant un personnage totalement dément, qui peut passer du calme impérial a la sauvagerie pure en quelques secondes. Guy Pearce n'est pas en reste dans le rôle du capitaine Boyd, un personnage plutôt lâche et qui va lutter pour ne pas devenir comme son ennemi., et qui prendra véritablement de l'ampleur au cours du récit. On retrouve également Jeffrey Jones, Jeremy Davies et David Arquette dans de solides seconds rôles.
On peut quand même apporter quelques nuances sur la grande réussite du film, notamment une deuxième moitié moins percutante et un climax pas tout a fait à la hauteur des enjeux, mais ce sont vraiment des détails face à la force de cet OFNI à la liberté de ton salvatrice et au propos d'une violence qui a dû totalement décontenancer les dirigeants de la FOX, qui n'ont d'ailleurs jamais su comment vendre le film (revoir les bandes annonces d'époque et les affiches complétement hors sujet) !
Treize années après sa sortie, le film n'a rien perdu de son pouvoir de fascination et de subversion, et continue d'accroitre sa réputation grâce aux cinéphiles, ce qui en fait aujourd'hui un véritable film culte !
8,5/10