MEMENTO - Christopher Nolan (2000)
Spoilers
Alors que Christopher Nolan est désormais un des réalisateurs les plus bankables de la planète, et dont les derniers films bénéficient d’un budget colossal, que reste t’il du film qui l’a fait connaître, plus de dix ans après sa sortie ?
Et bien, il faut dire que Memento vieillit plutôt bien. Partant d’une nouvelle de son frère Jonathan (dont les qualités d’écriture ne sont plus à prouver), Nolan nous livre un excellent film noir dont la structure scénaristique complexe apporte une réelle fraicheur au genre.
En effet, la narration à rebours adoptée ici est très bien utilisée, puisqu’elle permet au spectateur d’avancer dans l’enquête au même rythme que le personnage interprété par Guy Pierce. Sa femme a été violée et assassinée et il rêve de se venger. Seul problème : il n’a pas de mémoire à court terme, ce qui l’oblige à tout noter sur son corps (notamment en se faisant tatouer) afin de poursuivre ses recherches.
Un point de départ malin, qui prend tout son sens au fur et à mesure que l’intrigue avance (ou recule c’est selon). Une idée grandement exploitée à travers un montage alternant flashbacks en noir et blanc (pour ne pas perdre davantage le spectateur) et scènes en couleur pour ce qui se déroule au présent, mais montée en parallèle.
Le spectateur découvre ainsi les actions du héros sans en comprendre le sens immédiatement, tout comme le personnage lui même. Une mise en abyme assez virtuose en termes d’écriture, dont le final viendra remettre en perspective tout ce qui a été vu précédemment.
Ce montage donne un rythme trépidant à l’ensemble, bien équilibré et qui nécessite chez le spectateur une attention de tous les instants (c'est suffisamment rare pour être souligné).
Là où le film trouve ses limites, c’est tout d’abord dans l’utilisation des flashbacks, qui ne sont là que pour aider les spectateurs les moins attentifs et apporte finalement assez peu au récit.
Et puis, comme pour la plupart de ses films, Nolan n’est pas aussi doué derrière la caméra qu’avec une plume dans les mains, et sa réalisation n’atteint pas la qualité de mise en scène que nécessite un tel scénario, se limitant la plupart du temps à du champ/contre champ.
Une limite qui le poursuit depuis même s’il s’améliore de film en film, sa plus grande réussite à ce jour restant le fabuleux Prestige.
Coté casting, c’est du bon travail : Guy Pierce qu’on a déjà vu meilleur est tout de même bien choisi, Joe Pantoliano est comme souvent très bon dans un rôle pour le moins ambigu et Carrie Anne Moss en femme fatale s’en tire honorablement, même si elle n’est pas l’incarnation de l’actrice talentueuse et charismatique.
Au final, Nolan nous retourne le cerveau dès son second film et prouve qu’il était déjà un excellent scénariste et un solide directeur d’acteur, a qui il ne manque plus qu’une mise en scène à la hauteur de ses autres talents pour devenir un grand cinéaste !
8,5/10