[Alegas] Mes Critiques en 2012

Modérateur: Dunandan

Re: [Alegas] Mes Critiques en 2012

Messagepar Killbush » Jeu 05 Jan 2012, 10:42

Très bien les critiques sur les Balaguero, bon t'es un peu radin sur A Louer mais ça va vu que tu dis que Fragile est son meilleur film :wink:

Et finalement, je vais surement me le prendre le Man from Nowhere, tu m'as bien motivé là !
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Mort ou Vif - 8/10

Messagepar Alegas » Jeu 05 Jan 2012, 14:21

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The Quick And The Dead (Mort Ou Vif) de Sam Raimi

(1995)


Une excellente surprise de la part d'un film dont je n'attendais finalement pas grand chose. Il faut dire qu'un western réalisé par Sam Raimi est quelque chose pour le moins étonnant et surtout très risqué, l’expérience pouvant être plus casse gueule qu'autre chose et ce, malgré le gros casting qu'il y a derrière. Pourtant, The Quick And The Dead (titre à privilégier par rapport au titre français qui perd clairement le sens réel du terme en rapport avec le tournoi) s'inscrit véritablement dans la lignée des meilleurs films du réalisateur, à savoir un sujet sérieux et intéressant traité avec une mise en scène qui repousse les limites du fun, le genre de films où l'on sent véritablement que Raimi se fait véritablement plaisir. C'est d'autant plus étonnant qu'il est évident à la vision du film que Sam Raimi avait les mains libres et pouvait donc tout se permettre comme folie visuelle, chose qu'il ne pouvait pas forcément avoir sur un film comme The Gift. On se retrouve donc ici en face d'un western qui vire clairement dans le spaghetti, les références au genre sont d'ailleurs nombreuses, la plus évidente étant le trauma du personnage de Sharon Stone qui rappelle immédiatement celui de Charles Bronson dans le chef d’œuvre de Sergio Leone, et si le scénario possède son lot de clichés indissociables au genre (notamment via le personnage de Gene Hackman) The Quick And The Dead se révèle être un film très original grâce à l'idée du tournoi qui dirige totalement le rythme du métrage. Le script est d'autant plus étonnant qu'il se révèle très profond sur ses thématiques (la vengeance, la recherche de la non-violence, la quête du respect) ainsi que sur les relations entre ses personnages (si le tandem Stone/Crowe bat un peu de l'aile, on ne peut qu'être étonné devant la relation troublante entre Gene Hackman et Leonardo DiCaprio) mais aussi sur les motivations des protagonistes (chaque personnage du film a une raison différente de combattre : vengeance, contrat à remplir, recherche de l'adversaire ultime, etc...), se rapprochant donc encore plus du western-spaghetti.

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Le film révèle en plus de très jolies surprises, on regrettera seulement le fait qu'il soit un peu trop prévisible, chaque finalité du duel pouvant être facilement prédite à l'avance (ce qui neutralise la notion de suspens, chose regrettable pour un film qui se base totalement sur un tournoi de duels). Pourtant, Sam Raimi compense clairement les défauts de son film via une réalisation tape à l’œil qui fait tout le charme du film. A l'instar de ce qu'il a pu faire avec Evil Dead 2 et de ce qu'il refera plus tard avec Spider-Man 2, The Quick And The Dead est un film de pure mise en scène, où les cadrages originaux sont légions et où la quête d'originalité à travers des séquences vues mille fois ailleurs se révèle être la grande force du métrage. Si certaines idées portent clairement la marque du réalisateur (la caméra embarquée dans un verre lancé à travers une pièce est un plan assez récurrent chez Raimi, tout comme les brusques zooms sur les visages des protagonistes), d'autres se révèlent être très originales, apportant un vent de fraîcheur bienvenue sur un genre qui en a souvent besoin. Ainsi, les balles traversent les corps pour permettre au soleil de passer à travers, les colts sont magnifiés comme jamais et les travellings compensés sont une nouvelle manière de fabriquer la tension avant un duel à mort. Quand au casting du film, il est tout simplement magistral, Sharon Stone malgré un jeu un peu limité sur les scènes d'émotion se débrouille de façon admirable (et puis le plan où elle se réveille en chemise de nuit est à tomber), Gene Hackman rejoue le même rôle de pourri dans Unforgiven, Russel Crowe dans un de ses tout premiers grands rôles fait du bon travail et Leonardo DiCaprio montre ici tout le talent qu'il ne fera que confirmer par la suite (j'aime beaucoup son personnage très mystérieux, dont on ne saura jamais les réelles motivations). Notons aussi une belle brochette de second rôles, avec notamment Keith David, Gary Sinise ou encore Tobin Bell. Enfin, la musique de Silvestri est vraiment sympathique avec un thème principal qui renvoie directement au travail d'Ennio Morricone sans chercher à le copier. Sam Raimi signe donc là ni plus ni moins qu'un de ses meilleurs travaux de mise en scène, qui ne ravira pas tout le monde de par ses partis pris qui le démarque clairement du genre auquel il s'attaque. Clairement l'un des meilleurs westerns contemporains en ce qui me concerne.



NOTE : 8/10
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2012

Messagepar Killbush » Jeu 05 Jan 2012, 15:12

Excellente critique qui brasse bien tous les aspects du film (notamment sur la mise en scène absolument géniale du père Raimi) :super:
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2012

Messagepar Milkshake » Jeu 05 Jan 2012, 19:41

Le meilleur Raimi avec Spiderman 2 :super: Les duels très cartoon ça donne vraiment un côté rafraîchissant au genre.
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2012

Messagepar Scalp » Jeu 05 Jan 2012, 19:45

Killbush a écrit:Et finalement, je vais surement me le prendre le Man from Nowhere, tu m'as bien motivé là !


tu fais plus confiance à Logan qu'a moi en matière de polar asiat :shock: déçue je suis :(
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2012

Messagepar Killbush » Jeu 05 Jan 2012, 19:47

Bin c'est pas Logan, c'est Alegas, et puis toi aussi tu m'en as dit du bien :wink:
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2012

Messagepar Scalp » Jeu 05 Jan 2012, 20:00

Ah oue lapsus, faut dire je les confonds les 2 fans de jupette.
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Delicatessen - 8,5/10

Messagepar Alegas » Sam 07 Jan 2012, 15:35

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Delicatessen de Jean-Pierre Jeunet & Marc Caro

(1991)


En 1991, dans le paysage d'un cinéma français qui tournait en rond depuis plusieurs années (il est d'ailleurs déprimant de voir à quel point c'est toujours le cas aujourd'hui) sort un film pour le moins atypique. Ainsi, Delicatessen, premier long-métrage d'un duo prometteur (le réalisateur Jean-Pierre Jeunet et son directeur artistique et ami de toujours Marc Caro) déjà auteurs de plusieurs courts-métrages fabuleux ( dont notamment Le Bunker de la Dernière Rafale, clairement la meilleure œuvre du duo, on pourrait aussi citer Foutaises que reprendra allégrement Jeunet dans sa carrière solo), sort en salles avec la véritable intention d'apporter un vent de fraîcheur. Se rapprochant du film de genre via une mise en scène osée et imposant aux spectateurs un univers jamais vu ailleurs, Jeunet et Caro démontre avec Delicatessen que le cinéma français peut encore se démarquer du reste du cinéma mondial avec un budget limité (24 millions de francs, l'équivalent d'environ 3 millions d'euros, là où une comédie française actuelle approche souvent des 10 millions...). Fort d'un script pour le moins intriguant (dans un futur Paris apocalyptique où la nourriture se fait de plus en plus rare, un boucher loue un appartement pour mieux assassiner son propriétaire et ainsi nourrir les autres occupants aisément), le premier long-métrage de l'association Jeunet/Caro montre ici toutes les possibilités que peuvent offrir un cinéma fauché. Ainsi, la superbe direction artistique de Marc Caro fait ici des merveilles, créant un univers sépia entre le réalisme poétique (souvent cité à travers de nombreux dialogues) et le post-apocalyptique, un univers pourtant limité (seulement deux décors différents, l'immeuble et les égouts) mais diablement efficace puisque ne s'attardant pas sur les causes d'un futur aussi pessimiste.

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Si le script accuse de quelques défauts (quelques personnages sous traités comme le militaire vivant avec les crapauds et les escargots ainsi qu'un final un peu trop précipité où la mort d'un antagoniste suffit à conclure les hostilités), on ne peut qu'être ébloui encore aujourd'hui devant son efficacité ainsi que par son originalité (une histoire aussi glauque aurait un peu plus de mal à passer aujourd'hui). Les personnages sont plus loufoques les uns que les autres, certains donnant lieu à des scènes excellentes (les tentatives de suicide de la bourgeoise sont hilarantes, la scène du thé à l'aveugle idem,et que dire de la séquence où l'immeuble entier s'agite au rythme du copulage du boucher hormis qu'elle est tout simplement brillante?). Quand à la réalisation, elle montrait déjà l'ambition du duo à travers des plans osés pour l'époque (la caméra passant dans les tuyaux d'évacuation ou à travers la rampe d'escalier), des gimmicks sympathiques (le générique live avec une caméra fluide) ainsi qu'avec un choix de décors et de photographie qui magnifie véritablement l'univers présenté (les passages dans les égouts sont superbes). Difficile donc de rester de marbre devant une telle maestria technique, d'autant qu'on a rarement vu mieux depuis au sein du cinéma français. On regretterait presque que le film soit aussi court, le manque de budget et le fait d'être un premier film interagissant vraiment avec ce sentiment d'en avoir vu trop peu. Clairement l'un des films les plus atypiques de l'histoire du cinéma français qui fait encore aujourd'hui regretter la superbe association entre Jeunet et Caro qui avaient véritablement de quoi devenir les ambassadeurs d'une nouvelle vision artistique au cinéma.

NOTE : 8,5/10
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Film: Delicatessen
Note: 9/10
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2012

Messagepar osorojo » Sam 07 Jan 2012, 17:24

:super: Yep, gros coup de coeur pour ce film la première fois que je l'ai vu. Je n'en avais jamais entendu parlé, je l'avais lancé un peu septique et ce fut une grosse claque. Jeunet et Caro au meilleur de leur collaboration, l'époque Delicatessen, la cité des enfants perdus. Après, ils m'ont un peu laissé au bord de la route, mais rien que pour ces deux films là (et leurs CM comme tu le dis), j'ai beaucoup d'estime pour ces deux gadji qui ont su marquer, de leur marque de fabrique peu commune, le paysage très pauvre du cinéma français :)
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Americain à Paris (Un) - 7/10

Messagepar Alegas » Dim 08 Jan 2012, 15:27

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An American In Paris (Un Américain à Paris) de Vincente Minnelli

(1951)


Seconde vision du film et je conserve mon avis d'origine, à savoir que le film n'est pas forcément fidèle à sa réputation, trop souvent vendu comme l'une des meilleures comédies musicales alors qu'on se retrouve en face d'un film du genre efficace et bien foutu, mais largement perfectible (qui aura néanmoins son influence sur des films comme Marry Poppins). Personnellement, le film trouve grâce à mes yeux non seulement parce qu'il est le premier film avec Gene Kelly que j'ai pu voir (une sacrée découverte, dans une salle de cinéma qui plus est) mais aussi puisqu'il offre une vision magnifique d'un Paris utopique, où tout les espoirs, professionnels ou amoureux sont permis, où un simple artiste sans le sou trouvera le bonheur à travers quelques notes de musique. Ce qui choque avec An American In Paris, c'est de voir à quel point le film est la rencontre ultime entre trois arts, le cinéma, la peinture et la musique, pour ne former qu'un tout ultime. Ainsi, la profession du personnage de Gene Kelly est loin d'être anodine puisqu'elle sera le prétexte à un climax musical de grande ampleur. Bien que ce ne soit pas là sa première comédie musicale (il avait notamment réalisé Ziegfeld Follies et quelques films avec Judy Garland comme Le Chant du Missouri), Vincente Minnelli offre là une mise en scène classique mais efficace, on lui préférera largement ses travaux sur des films comme Brigadoon ou The Band Wagon puis-qu’ici, hormis les vingt dernières minutes, on peine à retrouver la maestria du metteur en scène. En effet, dans la plupart des morceaux musicaux qui composent le film (tous sympathiques mais pas forcément mémorables hormis cette délicieuse séquence où Gene Kelly chante et danse avec les enfants parisiens), seule la chorégraphie orchestrée par Gene Kelly lui-même sauve les meubles, la réalisation se contentant du strict minimum.

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Cela donne lieu à des scènes très belles (la danse sur les quais de la Seine) mais jamais exceptionnelles, pire encore certaines séquences souffrent véritablement d'une durée excessive, à l'image du passage où le pianiste s'imagine tenir un concert symphonique, séquence magnifiée par la musique mais très pauvre visuellement hormis un effet de style emprunté au Fantasia de Walt Disney. Mais c'est lors du climax musical que l'on se rend compte à quel point An American In Paris aurait pu être un modèle du genre, vingt minutes totalement muettes où Gene Kelly va se retrouver dans un Paris onirique, se baladant de toiles en toiles (on retrouve notamment du Toulouse-Lautrec), ce qui donne un univers visuel véritablement unique. De plus, la réalisation de Minnelli s'accorde vraiment avec l'aspect sensationnel de la séquence et même si l'on peut reprocher une longueurs excessive (d'autant que ça ne raconte pas grand chose, au contraire du climax de Singin' In The Rain) force est de constater qu'une telle scène ne se voit que rarement au cinéma. Autre point fort du film, sa reconstitution de Paris en studios vraiment convaincante, la scène des quais est impressionnante de réalisme au point que l'on se demande souvent si ce n'est pas tourné réellement dans la capitale. Enfin, si Gene Kelly est comme d'habitude excellent, aidé par un personnage charismatique et intéressant, il est dommage de constater qu'un personnage comme le pianiste est clairement sous-traité par rapport aux autres, d'autant que Oscar Levant se débrouille vraiment bien. Sinon, la happy-end passe très bien (et pourtant j'avais des doutes) en grande partie grâce au personnage de Georges Guétary, excellent acteur au passage. Bref, loin d'être le chef d’œuvre de la comédie musicale comme le laisse penser sa réputation, An American In Paris reste clairement un honnête film qui, malgré ses défauts, envoutera aisément les amateurs du genre notamment par une vision d'un Paris magnifié qui fait véritablement toute la force du film, porté par un Gene Kelly en excellente forme.

NOTE : 7/10
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Take Shelter - 9/10

Messagepar Alegas » Dim 08 Jan 2012, 17:55

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Take Shelter de Jeff Nichols

(2010)


Décidément, l'année 2012 commence bien, très bien même avec l'arrivée de ce Take Shelter qui, après avoir accumulé les nominations et prix dans de prestigieux festivals (notamment Cannes et Sundance pour ne citer qu'eux) se décide enfin à sortir en salles en France, l'occasion de découvrir le second film d'un réalisateur prometteur (il me tarde vraiment de découvrir son Shotgun Stories) ainsi que le nouveau représentant de la vague indépendante américaine qui, cette fois, ne fait pas les choses à moitié. Car il est de mode depuis plusieurs années de survendre ces films tout droits sortis de l'Amérique profonde, souvent primés au Festival de Sundance, leur donnant souvent énormément de mérites à tord. Ainsi, si Little Miss Sunshine avait su en 2006 faire réellement effet (le film reste encore aujourd'hui l'une des meilleures comédies du début du siècle), Winter's Bone, sorti l'année dernière, n'arrivait clairement pas à convaincre totalement alors qu'il était vendu comme un réel chef d’œuvre. Ainsi, ce Take Shelter avait de quoi faire peur, les seuls détails rassurants étant son pitch, inhabituel pour une production de ce genre (on est très proche de l'apogée du cinéma de M. Night Shyamalan sur beaucoup de points) ainsi que son casting, réunissant Michael Shannon, acteur fétiche du réalisateur et bien trop souvent cantonné à des seconds rôles hélas, et Jessica Chastain, révélation ultime que nous offrait Terrence Malick l'année dernière avec son Tree Of Life. Personnellement, j'ai eu la chance énorme de découvrir le film en salles sans en savoir quoi que ce soit (hormis les rapprochements vis à vis de The Happening que j'avais pu lire un peu partout) et la surprise a été d'autant plus grande, Take Shelter ne ressemblant en rien à ce que le cinéma indépendant américain avait pu nous offrir jusque là. Dès son introduction hypnotique, le film de Jeff Nichols crée une tension que le spectateur ne peut expliquer, l'ombre d'une menace planant sur la totalité du métrage, avec notamment une alternance rêve/réalité qui donne beaucoup d'ampleur à un film qui se veut clairement être la représentation ultime de la paranoïa américaine depuis plusieurs années.


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Obligé par le scénario écrit avec une très grande justesse, le spectateur remet sans cesse en question ce qu'il voit à l'écran, que ce soit la réalité des images, la possible schizophrénie du personnage de Shannon (l'idée d'intégrer un trauma concernant la maladie de sa mère est une idée tout simplement excellente qui permet au métrage d'atteindre une toute autre ampleur), les raisons de sa peur grandissante et surtout la véracité de la tempête qu'il annonce. Ainsi, pendant près de deux heures, on se demande réellement comment un tel film peut aboutir, les conclusions possibles étant multipliées à chaque nouveau rêve qui annonce un autre détail à craindre. Take Shelter joue clairement sur l'attente, se rapprochant énormément du Signs de Shyamalan (la comparaison est loin d'être anodine, la scène dans l'abri ressemble beaucoup à celle de la cave dans Signs et même la partition musicale ressemble à s'y méprendre à du James Newton Howard) mais aussi du sentiment paranoïaque que l'on pressentait dans le cinéma américain des années 60-70. Enfin, le film jouit de plusieurs niveaux de lectures, non seulement via son final étonnant (clairement les minutes les plus intenses vues dans une salle de cinéma depuis longtemps, j'aurais presque envie de dire que le film dure quelques minutes de trop mais trois derniers plans rattrapent clairement l'affaire) mais aussi par sa vision d'une Amérique profondément touché par la crise, que ce soit au niveau d'un prêt immobilier, du chômage, du système de santé médical mais aussi du prix de l'essence. Cette vision réaliste empreigne tellement la pellicule qu'on en vient à se demander si la tempête annoncée n'est pas justement celle de la crise, et à ce niveau là Take Shelter est clairement un reflet de son époque et qui donc sera d'autant plus intéressant à analyser dans les prochaines années (au contraire d'un Winter's Bone). Notons aussi la réalisation de Nichols qui, malgré une volonté de ne pas faire dans le tape à l’œil, donne une réelle identité à son film, que ce soit sur les cadrages judicieusement choisis que sur les scènes oniriques toujours prenantes, et je ne parle pas des deux grosses dernières séquences qui valent à elles seules la vision de Take Shelter, le film qui réussit là où The Happening et Melancholia se vautraient lamentablement, à savoir livrer un film de fin du monde filmé à hauteur humaine. Une grande réussite donc qui annonce clairement le niveau de qualité pour 2012. Vivement le prochain film de Jeff Nichols qui s'annonce très intéressant avec un casting pour le moins alléchant.


NOTE : 9/10
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Dangerous Method (A) - 5,5/10

Messagepar Alegas » Dim 08 Jan 2012, 18:28

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A Dangerous Method de David Cronenberg

(2011)


Déception assez conséquente de la part d'un film réalisé par David Cronenberg, cinéaste qui avait su se renouveler avec seulement deux films tout en conservant ses thèmes fétiches. Le projet avait clairement de quoi exciter, le réalisateur de la chair se décidait à réaliser un film sur les débuts de la psychanalyse et donc irrémédiablement sur le personnage de Sigmund Freud, révélateur des pulsions sexuelles de l'être humain, pourtant Cronenberg livre là un film étonnamment édulcoré et même si A Dangerous Method est loin d'être un mauvais film, il reste la question qui remet tout en cause : pourquoi le film ne va pas plus loin, surtout avec un tel réalisateur aux commandes. Annonçons déjà d'entrée les mauvaises nouvelles, le film ne parle finalement que très peu de la relation entre Sigmund Freud et Carl Jung et préfère plutôt se concentrer sur la relation ambiguë entre ce dernier et l'une de ses patientes. Ainsi, le scénario accumule plusieurs bonnes idées et surprises (le personnage de Freud apparaît assez tardivement dans le récit, les retours à la raison de Jung) mais est rapidement limité par une volonté de ne pas aller trop loin. Ainsi, l'apparition du personnage de Vincent Cassel aurait pu clairement donner un tout autre sens au film mais ce personnage très intéressant (à la limite de la folie mais brillamment intelligent) n'apparaît en tout et pour tout qu'une dizaine de minutes à l'écran. Quand à la relation entre Jung et sa maîtresse, elle aurait pu être bien plus osée, il est triste de voir d'ailleurs à quel point Cronenberg filme les scènes de sexe de façon très convenue, lui qui avait su traiter le thème de la sexualité déviante de plein front à travers des films comme Crash ou Frissons.

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Enfin, il est réellement dommage de constater que les meilleures scènes du film sont les plus rares, à savoir celles qui traitent de la relation entre Freud (génial Viggo Mortensen) et Jung (Fassbender qui confirme encore une fois son talent malgré une écriture de personne limitée), la totalité de leurs scènes traitant de leur amour de la recherche psychanalytique et leurs violentes confrontations écrites sur l'avenir de celle-ci sont de loin les passages les plus intéressants du métrage, dévoilant ce qui aurait clairement pu donner un grand film. Le point faible de A Dangerous Method vient donc non seulement de l'écriture alambiquée mais aussi du personnage de Keira Knightley, fausse bonne idée qui a comme seule avantage d'apporter un brin d'émotion sur la fin du film mais qui limite véritablement la plupart des thématiques lancés au cours du métrage. Toutefois, même si le film a son lot de défauts, il serait dommage de le condamner tant Cronenberg arrive à porter le film sur ses épaules, ainsi la mise en scène, bien que classique en apparence, jouit d'un véritable travail visuel, notamment sur la courte focale que le cinéaste se plaît à utiliser pour mettre en avant la dualité et le déchirement des envies passionnelles. Quand à la partition de Howard Shore, elle se révèle très agréable à écouter. Cela peut paraître peu, mais A Dangerous Method gagne beaucoup de points grâce à son réalisateur qui permet à son film de flotter correctement, celui-ci n'étant jamais ennuyeux malgré les faibles prises de risque. Un Cronenberg mineur donc mais on reste quand même très loin de ses pires œuvres.

NOTE : 5,5/10
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Re: Take Shelter - 8/10

Messagepar Moviewar » Dim 08 Jan 2012, 18:36

Alegas a écrit:


Take Shelter de Jeff Nichols

(2010)


NOTE : 8/10


:super: :super: :super:
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Malveillance - 7,5/10

Messagepar Alegas » Dim 08 Jan 2012, 19:25

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Mientras Duermes (Malveillance) de Jaume Balaguero

(2011)


Jaume Balaguero fait une pause dans la saga [REC] en attendant l'opus ultime qu'il est censé réaliser seul et en profite pour ajouter un long-métrage assez atypique à sa filmographie. Entendons-nous bien, si le cinéaste espagnol a su se faire connaître et reconnaître par l'aspect fantastique de ses thématiques récurrentes, Mientras Duermes se pose comme la parfaite antithèse d'un film comme Fràgiles ou [REC]², ce sixième long-métrage se déroulant intégralement dans un univers totalement réaliste. C'est ce qui permet d'ailleurs à Balaguero de réaliser son film le plus humain, le plus touchant même, Mientras Duermes contant l'histoire de César, concierge d'un immeuble huppé de Barcelone (encore que aucune indication géographique n'est donné durant la totalité du film), qui en façade ressemble au plus normal des êtres humains (comme le démontre sa première journée : serviable, attentif et généreux) alors qu'il n'est rien de plus qu'un cauchemar ambulant, le genre d'homme que l'on aimerait ne jamais rencontrer. Pourtant, dès le début du film, Balaguero se plaît à nous faire prendre en pitié ce pauvre concierge, obligé chaque matin de trouver une nouvelle raison de vivre, totalement insensible à la capacité de connaître un jour le bonheur. Cette partie du film, très touchante fait véritablement la force du film puisqu'elle pose le personnage comme quelqu'un de bon sur le fond, mais c'est à partir de la seconde bobine de métrage que le film révèle ce qu'il est véritablement, à savoir une descente aux enfers prenante et sans concession orchestrée de main de maître par ce même César (le film va tellement loin à ce niveau là qu'on en est à se demander si César n'est pas une nouvelle vision de l'antéchrist). Il est étonnant de se dire d'ailleurs que Mientras Duermes ne conte ni plus ni moins que la recherche du bonheur que chaque être humain entreprend dans sa vie, César, n'obtenant son bonheur qu'en détruisant celui des autres, se voit ici dans l'obligation de détruire à petit feu la vie de ceux qu'il est censé satisfaire. Et si certains de ces actes sont clairement provoqués par une impulsivité philosophique à fleur de peau (la tirade contre la dame aux chiens est d'une méchanceté sans nom mais toujours juste, quand à ce qu'il fait contre la petite fille impolie de l'immeuble, son acte la remet véritablement dans le droit chemin), César est véritablement un être minutieux, en témoigne son chef-d’œuvre de cruauté que raconte finalement la totalité du film et porté contre Clara, une jeune femme magnifique, débordante de vie, la girl next door parfaite, et dont César a décidé d'en faire sa plus grande victime.

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Ainsi, Mientras Duermes est construit tel un gigantesque crescendo, commençant par des actes puérils (destruction d'une montre) pour finalement révéler via un twist monstrueux la puissance démoniaque du personnage principal (le final est magistral par ailleurs, Balaguero confirme une nouvelle fois son amour pour les fins tragiques). Le plus étonnant étant de voir à quel point Balaguero fait tout en sorte pendant la première moitié du film pour que le spectateur se prenne d'affection vis à vis de César (la scène de tension en milieu de métrage est la plus grande preuve de cette prise de position, impossible d'espérer qu'il se fasse prendre, cela fait d'ailleurs beaucoup penser sur le principe à une certaine scène de Five Fingers) pour que ce même spectateur se sente terriblement mal à l'aise lors de la seconde moitié, ayant cautionné tout ce qui a permis à César d'en arriver là. A ce niveau là, le film se révèle donc bien plus intelligent et surtout bien plus glauque qu'il n'y paraît en surface, ce qui donne lieu à ce que beaucoup pourront considérer comme le meilleur film de son auteur (bien que personnellement je garde une légère préférence pour Fràgiles, bien que cela puisse changer avec le temps lors d'une seconde vision). Quand à la mise en scène, si Balaguero conserve son style habituel, il est évident qu'ici il passe un certain cap. Moins tape à l’œil, plus mature et surtout très réfléchie, la réalisation étonne aussi bien sur les cadres soigneusement choisis (le flou artistique est une nouvelle fois magnifié par Balaguero et certains plans sont vraiment réussis comme ce travelling sur la baignoire qui déborde de sang) que sur le montage excellent (encore une fois la scène de tension est admirable de ce point de vue). Et si les influences habituelles du cinéaste sont ici proscrites, on retrouve néanmoins une certaine envie d'approcher du cinéma d'Alfred Hitchcock, notamment via une séquence où César doit s'échapper d'un appartement avant de sombrer dans un sommeil inévitable (d'ailleurs je suis certain d'avoir vu une situation semblable dans un autre film mais impossible de m'en souvenir). Quand au casting, aucune faute de goût et encore une preuve du talent de direction du cinéaste, Marta Etura est craquante et Luis Tosar, acteur assez reconnu dans son pays et que l'on a pu apercevoir dans le Miami Vice de Michael Mann, est ici tout simplement énorme, arrivant à donner beaucoup d'émotions à son personnage malgré un visage de glace, un excellente révélation donc. Il y a même un petit rôle sympathique pour le résident gay de [REC]. Bref, Mientras Duermes est clairement un excellent thriller, offrant à la fois un scénario étonnant, des scènes marquantes et surtout une autre vision de ce que peut offrir Jaume Balaguero au cinéma. Pour le coup, on est véritablement en droit d'attendre qu'il en ait fini avec la saga [REC] car il y a clairement possibilité d'envisager une autre tournure pour sa carrière décidément sans fautes.

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NOTE : 7,5/10
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2012

Messagepar zack_ » Dim 08 Jan 2012, 19:45

J'avais pas tord de faire un parallèle avec sleeping beauty sur le bomcast, même si ca a certainement rien à voir, mais les affiches se ressemblent (je la découvre)
En tout cas tu m'a bien donné envie de le voir celui-là
zack_
 

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