Le sabre du malAvant l'arrivée de Wild Side et même de Internet pour voir des chambara en France fallait s'accrocher si on s'appelle pas Kurosawa, et le Sabre du Mal c'est le premier Chambara hors Kurosawa que j'ai donc vu et finalement j'ai pas vraiment vu mieux en suite, à part Goyokin.
Le ciné japonais des 60's c'était rules the world quoi, entre Okamoto, Kobayashi, Gosha et Kurosawa c'était la Champion's League, aujourd'hui c'est des vieux matchs de L1 où Benjamin Nivert serait le meilleur joueur.
Ici c'est une adaptation du Le Col du Grand Bouddha (donc les autres films sont souvent bien chiant ). Un chambara très noir où l'intrigue politique un peu bordélique n'est ici que prétexte à mettre en avant un personnage sombre et destructeur, alors que la plupart des chambaras ont tendance à mettre en personnage principal un héros (ou anti héros), ici on a vraiment un bad guy, dans sa première scène il tue un vieillard, pourquoi ? sans raison, enfin la seule raison est de sortir son sabre car la soif de tuer est plus forte.
Un homme cynique possédé par son sabre, qui ne vit que pour le combat et tuer (son sabre le perverti petit à petit et lui fait commettre des actes de plus en plus répréhensibles), les seules moment où son visage s'éclaircit c'est lorsqu'il peut se servir de son sabre ( on rajoute a cela qu'il viole et tue des innocents ) on a donc pas un enfant de coeur. Et du fait de cet aspect "fantastique" le film ne s'embarrasse pas de motivation, on ne sait pas réellement pourquoi il est devenu comme ça, son père regrette juste de lui avoir apprit le sabre, le sabre a rarement été plus phallique que dans ce film.
Chaque petit détails de l'histoire aura son importance pour la suite ( les scènes avec la jeune fille au début je voyais pas trop l'intérêt ), le scenario est vraiment brillant, j'avais peur d'être déçu par la fin ( plus le film avançait plus je m'attendais a un duel final contre Hyoma ) et bein la fin est à la hauteur du reste : parfaite, le plan final y tue !!!
On sent véritablement l'ambiance fin de règne des samourais où le code du bushido ne sert plus a rien ( Seul Mifune et son élève en sont encore garant ).
Le sabre étant presque un personnage du film, il a ici une grande importance et on a donc des scènes de pratiques ( quand le jeune samourai s'entraine seul à répéter encore et encore le même mouvement ), duel au boken basé sur le suspense de l'Attente et la technique ( et ça donne une des scènes les plus réussie du film ), embuscade (super scène du bateau où on comprend pourquoi Shinosuke est allé chercher un défi dans l'école de Mifune), duel 1 contre 20, 1 contre 100 ou presque.
Par contre au contraire d'un Kobayashi ou d'un Gosha, Okamoto n'est pas là pour critiquer un système, il a une approche plus visuelle à la Misumi. Ici le seul réel message c'est la voie du sabre mène à l'autodestruction.
La réalisation de Okamoto est géniale, les 1 vs 1 sont particulièrement réussi avec une camera focalisé sur les pieds et le regard des adversaires (l'attente est toujours importante dans ces films avec le temps en suspend où chaque geste peut s'avérer mortel), le scène en foret en plan séquence c'est beau tout simplement ( le plan qui finit le duel tue !!! ), et pis ce climax final ou Ryunosuke ne lâche rien c'est la perfection et le noir et blanc rend tout ça encore plus magnifique, et finir son film sur un freeze comme ça c'est la classe. L'ambiance général est funèbre et le N/B est forcément de toute beauté, Okamoto étant très à l'aise pour trouver la composition d'image qui aura le plus de gueule. Et il est bien aidé par un scope de toute beauté, car on le dira jamais assez mais le scope c'est LE cinéma.
Bonne musique de Sato ( comme toujours quoi ).
Une fois de plus Nakadai en impose carrément, un simple regard suffit pour donner de l'intensité a son personnage et il livre une prestation vraiment bluffante, il aurait pu tomber dans le one man show comme il sait faire mais il reste sobre et quand son personnage se déchaine ça prend encore plus de puissance, Mifune en une seule scène prouve que c'est un putain d'acteur (oui bon ça c'est pas un scoop), le duel sous la neige est carrément puissant ( c'est la seule scène ou Ryunosuke éprouve un sentiment de peur ).
Tout comme Gosha était un pendant du cinéma de Leone, le film de Okamoto est un pendant des films de Peckinpah : c'est la fin d'Une époque qui est montré. Et d'un point de vu visuel c'est un peu la fin d'un cinéma un peu statique du coté des chambara, j'exagère un peu mais c'est vraiment à partir du milieu des 60's que le chambara deviendra vraiment inventif.
9/10