Alien : Covenant de Ridley Scott
(2017)
En voilà un film cruellement sous-estimé dans la carrière de Scott. C’est un film que je considère grosso modo comme l’égal de son prédécesseur, et pourtant ce dernier a eu le droit à une réception nettement moins froide que ce Alien : Covenant, cité un peu partout comme un des pires films de Ridley Scott, ce qu’il n’est clairement pas de toute évidence. Alors c’est certain que le film a été très mal vendu : ça se voulait être un épisode à part entière de la saga Alien, alors qu’au final c’est uniquement la suite de Prometheus. Pas un film de monstre donc, mais un film où Scott peut continuer à expérimenter sur plusieurs de ses thèmes fétiches, comme le rapport au divin et la création de la vie, naturelle ou artificielle. En cela, le film aurait mérité de s’intituler tout simplement Covenant : comme Prometheus, c’est l’histoire et la destinée tragique d’un équipage que l’on suit, l’alien étant ici plus que secondaire.Alors clairement, c’est pas un film que je chercherais à faire passer pour un chef-d’oeuvre, et pour cause, il a des défauts bien visibles. On sent que Scott est bien moins libre que sur Prometheus, on imagine bien que le dernier acte un peu artificiel a été demandé par la Fox suite à l’une des critiques faites sur Prometheus (à savoir qu’il n’y avait pas assez de xénomorphes), l’écriture de l’équipage est perfectible (et pour le coup, contrairement à Prometheus, les scènes coupées ne peuvent pas sauver la mise) et à bien des égards on sent le budget moindre (30 millions de moins), notamment sur les FX inégaux.
Pour le reste, en revanche, je trouve ce Alien : Covenant vraiment admirable, tant il cherche souvent à aller à contre-courant des productions actuelles, que ce soit à travers des références poussées (on y cite ouvertement Wagner, Shelley ou encore Böcklin à travers la composition d’un plan) ou son nihilisme affiché (une fin pareille, on n’avait pas vu ça depuis longtemps dans un film à 100 millions). Mais c’est aussi et surtout ses thématiques qui trouvent grâce à mes yeux, Scott se permettant d’aller très loin dans l’analyse de la Création via David, simili-humain qui se rêve divin, définitivement le personnage le plus captivant du diptyque. Là encore, cela permet à ce qui devrait être un film d’épouvante d’être bien plus, à savoir un prolongement thématique de toute la carrière de Scott, répondant à des questions posées dans Blade Runner ou Conquest of Paradise pour ne prendre que ces exemples. A la fin du métrage, on en vient à rêver d’un troisième film qui viendrait conclure l’arc de David, sa chute, à mon sens inévitable, en tant que Créateur, mais entre le “flop” financier du film et le rachat par Disney, je doute sérieusement qu’on puisse voir un jour ce que Scott souhaiterait raconter.
7/10