J'inaugure avec
Les Monstres mon entrée dans la comédie
all dente que je connais très mal, et ma foi, c'est de la bonne pioche, et me confirme tout le bien que j'avais entendu à propos de ce metteur en scène qui compte parmi les plus réputés du genre. On a affaire à un film de 19 sketchs d'une durée de quelques secondes à quelques minutes, qui nous présentent des tranches de vie abordant une myriade de thèmes tels que l'éducation, la vie politique et artistique, et surtout l'adultère, le plus souvent traités de manière tordante et provocatrice, le tout me rappelant le style des westerns spaghettis dans cette tendance à la farce assassine, ainsi que le burlesque des années 30 (les bouts les plus courts sont d'ailleurs les plus visuels où le comique de situation prend une importance particulière). Alors certes la diversité thématique n'est pas toujours au rendez-vous (la vie de couple est particulièrement dans le collimateur), mais Dino Risi s'évertue à varier les goûts et les couleurs tout en proposant comme fil rouge (entre des sketchs très disparates en termes de cadre et d'atmosphère) une verve constamment mordante envers ces petits «monstres» donnant à voir un aperçu peu reluisant des travers de la société italienne.
Pour ce faire, Dino Risi s'attarde souvent sur un petit détail dans le seul but d'en grossir exagérément les traits, pour ensuite déplacer notre regard d'une manière totalement inattendue (
Le rapt et
Le monstre sont une petite merveille en ce sens), ou bien pour dresser un portrait d'une précision chirurgicale du comportement déviant alors disséqué. Mais si la satire se prête souvent à la franche rigolade, il arrive cependant qu'elle nous laisse un petit pincement au coeur, à l'image de cet ultime baroud d'honneur d'un boxeur retraité dont la renommée sera tristement instrumentalisée par un gagne-petit, bien qu'au final, chose incroyable, c'est toujours la dérision qui prend le dessus, aussi sombre et amer le dénouement des scénettes soit-il parfois (je ne savais plus par exemple si je devais rire ou pleurer avec ce dernier sketch). Alors certes la qualité peut varier d'un épisode à l'autre avec une chute plus ou moins prévisible, mais franchement, le ton et l'approche que j'ai soulignés ci-dessus sont suffisamment variés et travaillés pour éviter le sentiment de redondance tant il y a toujours quelque chose à glaner dans cette façon enjouée et féroce d'égratigner les moeurs, où personne n'est épargné, les privilégiés comme les pauvres, les institutions comme les individus.
Ce qui fait aussi la force des
Monstres, c'est son casting, comptant en son sein de jolis minois féminins (aux atours chouettement mis en valeur) et des tronches masculines au faciès très prononcé, parfaitement à leur aise dans le rôle de la crapule, du profiteur, de la pauvre victime, ou du simple personnage de fait divers, débitant des dialogues croustillants qu'on se délecte comme du petit lait (une langue que je trouve décidément parfaite pour ridiculiser sans prendre de haut, tout en étant violemment jubilatoire par son flux verbal paradoxalement lyrique malgré un contenu bien souvent relevé, les petites et grandes bassesses humaines). Si on ajoute à cela une musique en osmose avec les images, insufflant un sens du rythme proprement redoutable,
Les monstres constituent une bobine racée et habitée, au fond acéré mais offrant en contre-point une forme légère, que je ne peux que conseiller comme initiation à la comédie italienne tant elle s'apparente à un «best-of» condensé de ce que ce genre peut proposer. En tous cas, ça donne envie d'approfondir la filmographie de Dino Risi, surtout si ses autres films savent aussi bien marier la farce à la fronde.
Note : 8/10