[Jed_Trigado] Mes critiques en 2016

[Scalp]

C'est Logan en premier role ?

[Jed_Trigado]

Je crois qu'il arrêterait de mater le docu dès les premières paroles.

[Jed_Trigado]

Chino - John Sturges & Duilio Coletti (1973)

L'un des grands maitres du western US qui débarque dans les plaines d'Almeria a la demande de Charles Bronson au sommet de sa gloire et produit par Dino DeLaurentiis qui n'est pas le plus pingre des producteurs italiens, il y avait de quoi trépigner a l'idée de voir deux courants du western converger le temps d'un film et pourtant, ça va être vite réglé : Chino est un film honteux, le pire jamais réalisé par Sturges (Brion confirme bien dans les bonus qu'il était pas du tout fier du résultat final) ou comment faire d'un pitch simple comme bonjour de vengeance, une ode au métier d'éleveur chevalin. Du générique de début, avec une musique des frères De Angelis du plus bel effet (j'avais l'impression de revoir la Petite Maison dans la Prairie), jusqu'au climax honteux, on va se bouffer du cheval a foison avec Bronson qui va livrer des canassons au village du coin, Bronson qui va faire accoucher une jument, Bronson qui apprend a faire du cheval a Jill Ireland, Bronson qui dresse ses bêtes, etc...Il ne manquait plus que le logo RMC Découverte ou Equidia que je n'y aurai vu que du feu, tellement le film ne se focalise que sur le métier de Bronson. Parce que le pitch nous vend au départ une bonne histoire de vengeance, ben c'est 10 petites minutes a tout casser dans le film, même Bozzuffi qu'on nous introduit comme le gros méchant du film, se limite a un emploi de deus ex machina ridicule pour justifier le fait que Bronson tienne un shotgun sur l'affiche (pas un coup de feu avant le climax, pour un western fallait oser).

Seuls points positifs : Charles et Bozzuffi qui malgré l'ineptie de ce qu'on leur fait jouer pètent la classe, ainsi qu'une réal bien dans les rails de l'école américaine avec peu de zooms et pas mal de plans d'ensemble (confirmant bien contrairement a la légende, que Sturges a assuré la plus grosse partie du tournage) qui donne une aura différente au désert d'Almeria, bien que le choix inhabituel du 1.33 limite les possibilités d'exploitation de l'espace.

2/10

[Jed_Trigado]

Monk Comes Down the Mountain - Chen Kaige (2015)

Je vais la faire courte : J'ai eu le même sentiment que devant The Midnight After, par le passif très "auteurisant" de son réal qui décide d'investir pleinement le film de genre et mieux, de toucher l'essence d'un cinéma HK révolu en réalisant une kung fu comedy a l'ancienne, de l'acteur principal que je connaissais pas qu'on croirait sorti d'un Michael Hui des grands jours, les combats sur-câblés magnifiquement dingues et le scénar sans queue ni tête qui modifie ses enjeux pratiquement tout les 15 minutes, franchement j’étais comme a la maison. Mais avec en prime un budget maousse qui permet d'avoir une prod design de malade et une réal hyper-soignée, ce qui est loin d'être un détail tant le précédent essai de Kaige dans le domaine, Wu Ji était un supplice.

S'il y a un film HK/Chinois a découvrir ces derniers temps, c'est bien celui-là, bordel ça me change de ces films bien solennels en costume. Gros bonus qui fera plaisir aux vieux cons comme moi : c'est Yuen Wah le grand méchant du film !

7/10

[pabelbaba]

T'es sûr que c'est pas un homonyme?

En tout cas je le note.

[Alegas]

C'est référencable si le cœur t'en dis.

[Jed_Trigado]

Je viens de lui demander, et il m'a dit non.

Edit : tu aimerais sans problème, Mark devrait le mater aussi, ça le vaccinera de la vision horrible de Ip Man 3.

[Jed_Trigado]

Je viens de mater la dernière livraison de l'ami Sammo, My Beloved Bodyguard.

Que les choses soient claires, la BA est l'une des plus mensongères que j'ai pu voir ces dernières années, elle y case absolument toutes les scènes d'action, qui sont au nombre incroyable de...4. Mais derrière le film propose un drame vraiment bien fait et émouvant avec une structure en crescendo, comme pouvait l'être First Mission en fait, porté par un Sammo d'une justesse rare dans ce rôle de papy solitaire brisé par la vie, bref le rôle parfait pour exploiter un acteur qui commence ne plus être tout jeune et qui n'a plus forcément les capacités de sa jeunesse sans être ridicule dans l'action (n'est ce pas Jackie ?). Il y a quelques notes d'humour par-ci par-là mais c'est soft (c'est marrant de revoir le trio Shek/Maka/Hark en vieux papys ) et les combats s'ils souffrent d'un montage assez daté restent particulièrement brutaux avec une palanquée de triple ou quadruples fractures en gros plan (on refait même le coup des rayons x qu'on voyait dans Roméo doit Mourir).

[pabelbaba]

Même si je ne suis pas super fan de First Mission. De toute façon, le truc qui me plait dans ce que tu dis c'est :

c'est marrant de revoir le trio Shek/Maka/Hark en vieux papys

[Jed_Trigado]

Il y a aussi Yuen Wah en facteur et Yuen Biao a une petite scène avec Sammo vers la fin, ça m'a fait bizarre de revoir les deux potes ensemble a l'écran.

[Jed_Trigado]

Runaway Train - Andrei Konchalovsky (1985)

"I'm worse than an animal ! I'm human !"

Seconde vision de ce film qui fut pour moi une mini-claque a sa découverte, probablement ce que la Cannon aura produit de plus "noble" dans toute son existence. L'histoire du film est démente, celle d'un rendez-vous manqué qui s'est transformé en un dialogue passionnant entre deux artistes a la vision du monde différente mais pas antagonistes pour autant, puisqu'au départ Akira Kurosawa avait écrit la base du récit (l'idée du train instoppable) pour ce qui devait être alors son ticket pour Hollywood mais par on ne sait quel miracle, le script débarque entre les mains de la Cannon quinze ans plus tard et réactivent le projet en s'entourant d'une équipe de rêve, histoire de bien appuyer la noblesse du projet : le soviétique Konchalovski autrefois abonné aux films d'auteurs, Jon Voight en lead et surtout la présence d'Edward Bunker au script qui va beaucoup apporter a la réussite du film, puisqu'il va irriguer sans cesse ses thèmes mais y apporter une dimension philosophique nouvelle qui va pousser a la réflexion. Pourtant vu de loin, Runaway Train ne pourrait être qu'un simple actionner haletant mais pourtant sa profondeur thématique semble toujours ressurgir, avec cette idée du run ininterrompu qui se voit a mon sens comme l’obsession maladive pour la liberté, fuir sans se retourner, quitte a faire tous les sacrifices possibles pour rester libre et bien sur Bunker qui nous dit tout le mal qu'il pense du système carcéral qui crée davantage de bêtes sauvages que de citoyens modèles, difficile de ne pas comprendre le mal être du perso de Voight (pas fan du gars habituellement, mais là il m'a bluffé), écorché vif par les multiples humiliations qu'on lui a fait subir sans pour autant en faire un enfant de choeur, d'ailleurs en cela, c'est une très bonne idée d'avoir démarré le film par un prologue assez long dans la prison, pour contextualiser parfaitement la chose et poser la majorité des personnages.

A partir du moment où l'action se déroule dans le train (pratiquement dans une seule cabine de quelques mètres carrés, balèze), Konchalovsky ne relâche quasi-jamais la pression par un montage et des dialogues au cordeau où l'on a presque l'impression d'avoir Bunker et Kurosawa qui nous exposent chacun tour a tour leur vision de l'existence, par un effet d'analogie j'ai vu la fatalité du perso de Voight comme le reflet de Bunker, tandis que l’optimisme moderé et la foi en la société de Roberts fait penser logiquement a Kuro. Deux hommes, deux pensées qui sous l'urgence de la situation vont fatalement s'entrechoquer et aboutir a un constat dur mais lucide sur la nature humaine. Quelque part, j'y vois le vrai ancêtre de Mad Max Fury Road dans sa façon de jongler entre divertissement pur (on s'y emmerde jamais et même les passages obligés avec les équipes censées gérer les chemins de fer sont réduites a peau de chagrin) et thématiques humaines (jusqu'où on est prêt a aller pour être libre ?). Dommage que le personnage de Rebecca de Mornay soit trop fonctionnel a mon goût, il représente l’œil raisonné du spectateur et n'avais pas grand chose a foutre dans cette confrontation intense. Mis a part ça, c'est un vrai bon film qui m'avait donné envie de découvrir les autres films US de Konchalovski, qui a part l'ennuyeux Maria's Lovers, a eu une carrière hollywoodienne assez sympa (Homer et Eddie, puis Tango & Cash c'est la base. ).

8/10

[Val]

Celui-là, j'ai vraiment hâte de le découvrir, Carlotta l'a ressorti il y a quelques temps en salles, ce serait cool si il débarquait dans la Midnight Collection par exemple.

Sinon :

Quelque part, j'y vois le vrai ancêtre de Mad Max Fury Road

Avec une phrase comme ça, Alegas va le DL sous peu, lui mettre 6, en disant : "Ouais, ça ne vaut pas le Miller, mais c'est pas mal quand même et heureusement que le script de Kurosawa à été retravaillé sinon on avait tout les éléments pour avoir un truc chiant".

[Jed_Trigado]

J'ai pensé a la même chose en écrivant ça.

[Alegas]

[Jed_Trigado]

Chicken & Duck Talk - Clifton Ko (1988)

Le film culinaire c'est un genre en soi en Asie, je ne compte pas le nombre de films tournant de l'univers de la restauration, avec un petit paquet de pépites qui font partie de mon panthéon perso, Chicken and Duck Talk c'est de loin mon préféré du genre avec Le Festin Chinois parce que ça fuse de la première a la dernière minute. L'action est posée en peu de temps, dans une quasi-unité de lieu (une simple rue) et narre le combat d'un restaurateur qui propose une alimentation traditionnelle mais avec des problèmes d'hygiène, contre un fast-food nickel chrome qui va lui piquer en deux temps trois mouvements sa clientèle. Donc le film va essentiellement compiler les coups fourrés que chacun des camps vont se faire pour avoir a nouveau les faveurs du quartier et là c'est du open bar, humour cantonais oblige : Michael Hui qui se déguise en femme hindoue pour aller espionner l’intérieur du resto d'en face, son frère Ricky qui subit l'entrainement façon Rocky de son nouvel employeur ou la meilleure scène du film, une pluie de rats qui se déverse dans le resto pourri de Hui pendant la visite d'un inspecteur de l'hygiène, l'obligeant lui et sa brigade a utiliser différents stratagèmes pour dissimuler petit a petit les bestioles, ce qui se termine par une improbable séquence où ils se mettent a danser l'aérobic a cause des rats qui continuent de bouger sous les bols.

Mais au delà d'être une comédie vachement efficace qui pourrait plaire a un public pas forcément acclimaté a l'humour cantonais (il y a finalement pratiquement aucun gag qui soit hermétique culturellement), c'est qu'il apporte un discours léger mais pas con pour autant sur la question de la malbouffe et l'invasion McDo qui uniformise progressivement la cuisine dans le monde entier, faisant perdre ce qui fait son charme, celui d'avoir des saveurs et des horizons différents, ainsi qu'une nourriture plus saine. Question casting, on est gâté puisqu'en plus des frères Hui, on a plein de seconds couteaux qu'on voit souvent dans des bonnes productions et on a surtout Ku Feng, le grand méchant de la Shaw Brothers qui nous refait une version moderne de son registre préféré. Donc, vous l'aurez compris, c'est la preuve qu'on peut parler d'un sujet a priori pas cinégenique en ayant les bonnes idées pour le faire.

8,5/10

Pour faire plaisir a pabel s'il ne l'a pas vu, un gentil youtubeur avait enregistré le film en vostfr lors de son passage sur ARTE il y a un paquet d'années :