Tengoku to jigoku (Entre le ciel et l'enfer) de Akira Kurosawa
(1963)
C'est clairement parmi ce que j'ai pu voir de mieux de Kurosawa mais encore une fois, j'ai beaucoup de mal à y voir un grand film et oui, encore une fois, la durée est à mettre en cause. Pourtant le film démarre vraiment bien et de façon assez incongrue. Quand on n'a absolument rien lu sur le script, difficile de savoir dans quelle direction ça va aller avec cette histoire d'investisseur de société de chaussures qui voit les choses en grand. Et même lorsque le récit se met en place avec un kidnapping hors-champ (toute la première partie du film étant un quasi huit-clos), bien malin sera celui qui pourra deviner l'issue de cette histoire. Alors clairement, toute la première partie jusqu'à la conclusion de la séquence du train est vraiment excellente. C'est tendu à souhait, bien interprété (Mifune est ici tout en sobriété, ça fait plaisir à voir), ça développe des thématiques très intéressantes (un homme est prêt à sacrifier sa fortune et son avenir pour son fils, mais est ce qu'il le ferait pour le fils d'un autre ?) et ça prend son temps dans le bon sens du terme, sans jamais que les longueurs soient inutiles.
Malheureusement, je pourrais difficilement dire la même chose de la seconde moitié du métrage, nettement inférieure et où Kurosawa se laisse aller à ses divagations temporelles habituelles. L'intention est pourtant louable, à savoir montrer une enquête du début jusqu'à la fin en y montrant parfois des détails insignifiants. Cela donne toue une partie du film prenante et documentée, mais étonnamment c'est lorsque la conclusion commence à pointer le bout de son nez que le film perd clairement en puissance, en témoigne une séquence de filature inutilement longue qui ruine en partie l'ultime scène du métrage. En effet, revoir débarquer Mifune alors qu'on l'avait abandonné quasiment une heure plus tôt donne l'impression que le film essaye de jouer sur deux tableaux, à savoir l'enquête minutieuse et l'intimité de la vie de Mifune. Du coup, le face à face final me donne vraiment l'impression de sortir un peu de nulle part, et j'avoue que le propos imposé par Kurosawa via cette séquence m'échappe, ne sachant pas quel personnage il condamne réellement. Une nouvelle fois, c'est certainement pas un grand film à mes yeux, mais ça possède des qualités indéniables et ça s'impose comme l'un des Kurosawa que je préfère avec Les Sept Samouraïs.
6,5/10