BRONCO APACHE
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Robert Aldrich (1954) | 6/10
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Lorsqu’on nourrit sa platine avec un western comme Bronco Apache, on est bien conscient que l’on va se heurter à quelques choix discutables, reflets d’une époque (peut être pas aussi) révolue (qu’on veut bien nous le faire croire). Ainsi, et même s’il est très difficile de s’y accoutumer, il serait cavalier, et un soupçon ingrat, de reprocher au film d’Aldrich son casting de blanc becs censés représenter un couple typique de fiers guerriers indiens. Mieux, à cette déconvenue chatouilleuse de zygomatiques, il est préférable d’opposer le côté novateur de Bronco Apache dans sa façon de représenter le peuple indien autrement qu’en tant qu’assoiffés de scalps aux mœurs douteuses.
A ce niveau là, Aldrich remporte son pari haut la main en proposant une réflexion agréable qui ne verse jamais dans le manichéisme primaire. Bronco Apache est le reflet d’une époque délicate où américains colonisateurs et indiens lassés de livrer bataille courbent chacun le dos pour essayer de cohabiter. La transition ne peut se faire sans ultimes estocs d’âmes farouches, ni sans esprits apaisés prêts à ouvrir la porte à un autre mode de pensée. Aldrich véhicule ce message à travers les fougueux protagonistes de son film : Burt « the kangaroo » Lancaster étant le guerrier fier et intrépide prêt à s’abandonner à l’appel de la terre que prône avec sagesse la charmeuse Jean Peters.
A cette intention très louable de porter à l’écran une variation du western traditionnel s’ajoute l’énergie intarissable de Lancaster. L’acteur ne se ménage à aucun moment et offre à Aldrich une performance physique à l’origine des seuls passages dont la mise en scène est digne d’intérêt. Le reste du film est, lui, d’une platitude telle qu’on se laisserait volontiers sombrer par moment pour une petite sieste revigorante.
Ce sentiment de trop peu plane en permanence sur Bronco Apache. Comme si son réalisateur n’avait pas eu les mains aussi libres qu’il l’aurait voulu. En témoigne cette fin complètement manquée dont l’absurde niaiserie ferait cohabiter Aldrich avec les auteurs de la petite maison dans la prairie. Un choix de producteur qui ampute le film de la fin noir et sans appel qu’avait envisagé le réalisateur. Sourds aux appels à la raison de Lancaster qui soutenait son directeur, le studio força la main du jeune metteur en scène pour qu’il tourne un happy end complètement déphasé avec le cheminement narratif qu’il avait pourtant mis en place.
Un choix de cancre effrayé qui réduit le film à une curiosité amusante, réservée aux complétistes intéressés par l’œuvre du réalisateur ou le western dans son ensemble. Aldrich s’étant trop endormi sur son pitch de départ sans réellement l’enflammer, la fin définitive qu’il avait prévue était nécessaire pour faire oublier le relatif manque d’intérêt du chemin qui y conduit.
Pour toutes ces raisons, Bronco Apache fait l’effet d’un galop d’essai un peu laborieux, qu’on serait tenté d’imputer au manque de savoir-faire d’un cinéaste en début de carrière. Mais quand on a vu le terrible Vera Cruz, sorti en salles tout juste 6 mois après, avec l’intrépide Burt Lancaster toujours à la carte, on se doute que la vérité est ailleurs, et que le père Aldrich n’a pu pleinement exprimer son tempérament dans cette bobine un peu trop convenue.