Les combattants de Thomas Cailley (2014) - 7/10
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Rester à l’affut, voilà le mot d’ordre d’une jeunesse, le regard vers l’horizon, qui se crée son propre monde post apocalyptique aux perspectives d’avenir de plus en plus fluettes dans un cadre social volatil. La menuiserie, la macroéconomie, tout semble bien dérisoire face à ce qu’il nous attend, un je ne sais quoi d’inquiétude presque divinatoire. Alors autant prendre son courage à deux mains et tout plaquer pour vivre la grande aventure dans les yeux d’un coup de foudre, dans une sorte de mini récit initiatique pour enlever le voile d’un certain désarroi existentialiste. Adèle. C’est le prénom en vogue dans le cinéma français actuel. Après l’Apollonide et Suzanne, Adèle Haenel démontre tout son talent dans une comédie un peu bancale mais à l’allure terriblement énergisante. Elle crève l’écran avec sa dégaine hirsute et son discours qui ne va pas par quatre chemins, quitte à être prise pour une folle. Mais la force de son personnage est aussi le défaut d’un film semblant un peu trop lisse et trop mignon pour porter l’ampleur et la candeur de son propos. Il y a un petit côté Take Shelter, dans cette peur de fin du monde, mais Thomas Cailley prend le pouls de son film par le biais de la compassion divertissante et d’une empathie comique faisant crapahuter les codes de la comédie romantique.
La première apparition d’Adèle Haenel donne le ton : avec des ateliers mis en place par l’armée, elle participe à des duels de défense sur la plage. Elle mettra au tapis le jeune Arnaud, qui de fils en aiguilles sera son acolyte durant une expédition survivaliste. Les combattants, c’est vouloir survivre, dépasser ses limites mais c’est une chose qui ne peut se faire seul. Madeleine le comprendra à ses dépens, elle ne pourra pas porter toute cette fougue sur ses épaules. Sans s’attendre à Full Metal Jacket, le camp militaire où Madeleine et Arnaud feront leurs stages durant la deuxième partie du film, parait bien lisse et trop mollasson dans ses situations pour mettre la mise en image en corrélation avec son propos survivaliste diluant son atmosphère pesante et contemplative dans un écrin un peu toc. Mais l’intérêt est ailleurs dans une œuvre survitaminée, fraiche, à la fougue musicale électro électrisante. Avec ses épaules un peu larges, son regard furtif, sa voix un peu brusque, la jeune actrice incarne le personnage de Madeleine, jeune étudiante en macroéconomie occupant son temps à apprendre des techniques de survie. Elle veut se prépare à survivre à la fin qui nous attend : le climat, la fin, la sécheresse, tout est possible selon elle.
Elle mange des sardines crues passées au mixeur, elle plonge dans une piscine avec des tuiles dans un sac, veut se faire frapper sur l’épaule pour démontrer sa force, donne des coups de tête aux premiers lèches bottes opportunistes venus. Elle a des « couilles », une virilité extravagante, mais une fragilité qu’elle essaye de cacher, même à elle-même. Dommage que le film manque d’ambition qui l’empêche d’aller aux bouts de ses idées notamment un dernier acte, pas aussi survivaliste et jusqu’auboutiste qu’il pouvait l’être malgré un changement des rapports de force donnant vie à une solidarité et un sens du sacrifice charmant dans une forêt contemplative face à une nature maternelle et dangereuse. Les combattants est un mélange des genres déterminé par sa ribambelle de situation absurde et à l’ironie gentillette qui voit les stéréotypes de séduction s’étioler pour donner corps à un duo aussi attachant qu’euphorisant comme durant cette superbe scènes de maquillage.